ℂ𝕙𝕒𝕡𝕚𝕥𝕣𝕖 𝓝𝕖𝕦𝕗

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Les rues se remplissaient de jour en jour, et la gaieté se diffusait partout. De plus en plus d'enfants sortaient jouer à l'extérieur, tout comme les affiches de fête foraine qui tapissaient les murs de la mairie, de la poste, des écoles fermées, et presque chaque recoin de la ville. À tous les cinq mètres, on se noyait dans ces annonces colorées. Cela éveillait les cœurs endormis des habitants, transformant l’atmosphère de la ville en un lieu de rires et de discussions sous la chaleur de l'été. Les adultes profitaient de l'air frais, tandis que les enfants couraient et s'amusaient sans relâche.

La date du 27 juillet, inscrite partout, était désormais sur toutes les lèvres : le jour tant attendu de la fête. Santana savait que le compte à rebours avait commencé. Pourtant, malgré l'enthousiasme ambiant, elle se sentait partagée. Gill rôdait toujours dans les parages, et elle se demandait comment gérer sa présence ainsi que les complications qui allaient inévitablement suivre.

Les Dupont revenaient de leurs courses, ayant décidé de rentrer à pied pour profiter du beau temps. Santana, chargée de six bouteilles de lait, peinait à avancer, mais elle ne se plaignait pas. Ses parents, eux, avaient chacun un sac plein dans chaque main, avançant à grands pas.

— La date approche à grands pas ! Ça va être super ! On pourrait inviter Gill à venir avec nous puisqu'il est ici, proposa Mme Dupont avec enthousiasme.

— Pourquoi pas, mais je ne tolérerai pas qu'il touche à une seule goutte d'alcool, répondit sèchement M. Dupont. La dernière fois a été un vrai désastre... comme toutes les autres fois, ajouta-t-il en soupirant.

— Je suis d'accord, je lui en parlerai, tenta d'apaiser Mme Dupont.

— Non, c’est moi qui vais le faire, répliqua M. Dupont, la voix impatiente.

— Je préférerais que tu ne t'en charges pas...

— Pourquoi ? Pour qu'il recommence encore ? trancha M. Dupont avec un brin d'agacement.

— Cette fois, je ne me montrerai pas aussi indulgente, répondit Mme Dupont avec assurance.

Santana, qui écoutait la conversation, n'y croyait pas une seconde. Gill recommencerait, c’était certain, et les choses finiraient encore mal, comme toujours.

Gill était étendu sur le canapé, les bouteilles de bière jonchaient le sol autour de lui, et l'une d'elles pendait encore faiblement dans sa main. Ses yeux, à peine ouverts, clignaient lourdement tandis qu'un rire étouffé échappait de ses lèvres, sans qu'il ne semble prêter la moindre attention au programme insipide diffusé à la télévision.

Dans sa chambre, Santana jouait silencieusement avec ses poupées, veillant à ne faire aucun bruit. Elle essayait d'oublier sa présence, mais un grincement pénible venant de la porte la fit sursauter. Lentement, la porte s'ouvrit, dévoilant Gill, titubant et complètement ivre. L’odeur âcre d’alcool l'accompagnait comme une ombre.

Santana le fixa, partagée entre dégoût et horreur. Elle n'aimait pas le voir ainsi, surtout lorsqu'il franchissait la porte de sa chambre.

— Allons Santana, ne fais pas ta pimbêche, dit-il d'une voix pâteuse. Je n'aime pas voir ton joli visage si crispé.

Malgré les litres de bière qu’il avait ingurgités, il restait étonnamment maître de ses mots, même si son langage devenait de plus en plus vulgaire. Il tituba jusqu'à elle, cherchant maladroitement à se pencher à sa hauteur, mais perdit l'équilibre et s'effondra presque sur la petite fille. Santana, frêle, ne put l’esquiver complètement et sentit une griffure légère sur son avant-bras lorsqu’il se rattrapa sur elle. Il ne sembla même pas s’en apercevoir. Son regard, trouble, glissa sur elle, lourd et désagréable.

La fête foraine : La pomme d'amourOù les histoires vivent. Découvrez maintenant