ℂ𝕙𝕒𝕡𝕚𝕥𝕣𝕖 𝓗𝕦𝕚𝕥

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Gill était parti depuis environ une heure. Une heure passée à tourmenter l'esprit de Santana, à la détourner de ses soucis à Etretat, à la replonger dans des souvenirs douloureux. Même un épisode d'Albator n'avait rien arrangé. Cette visite l’avait perturbée, et pourtant, elle aurait dû s'y attendre. Mais elle ne l'avait pas fait, comme si les événements récents avaient justifié le fait d’oublier tout le reste. D'habitude, elle était toujours prête, toujours sur le qui-vive, et cela la fatiguait mentalement. Mais cette fois, tout était différent. Et dire qu’elle en voulait au magicien… Pour une raison qui lui échappait, elle semblait presque vouloir le remercier. Il lui avait permis, ne serait-ce que momentanément, d’oublier son principal problème.

Son père était assis dans son fauteuil vert caca d'oie, plongé dans son journal. Albator venait de se terminer à la télévision, mais Santana continuait à fixer l’écran, sans vraiment prêter attention à ce qui s'y déroulait. Elle aperçut les mots "fête foraine" et "pomme d'amour", mais cela ne lui fit ni chaud ni froid, alors que cela aurait dû.

Sa mère traversa soudain la pièce avec une énergie inhabituelle.

— Chéri, viens voir par la fenêtre ! lança Mme Dupont, une paire de jumelles en main, visiblement excitée.

Mr Dupont abandonna sa lecture à contrecœur, obéissant à l'enthousiasme de sa femme. Il échangea un regard complice avec sa fille, un regard qui signifiait qu’il trouvait cette situation tout aussi ridicule qu’elle. Malgré tout, il suivit sa femme, et Santana fit de même.

— Regarde là-bas, on dirait que les parents de TA copine se disputent, dit Mme Dupont avec un mélange d'intrigue et de jubilation.

Son ton trahissait sa curiosité morbide. Il ne se passait jamais grand-chose ici, alors une querelle de voisinage était un vrai spectacle pour elle. Mr Dupont prit les jumelles, observant la scène à contre-cœur. De loin, Santana aperçut Louisa, immobile dans le jardin, visiblement affectée par la dispute de ses parents.

Les éclats de voix des parents de Louisa résonnaient dans tout le quartier. Certains voisins s’étaient arrêtés pour écouter discrètement, tandis que d'autres préféraient ne pas s'immiscer dans leur vie privée. Santana, poussée par une curiosité grandissante, sortit de chez elle pour rejoindre Louisa.

— Que se passe-t-il ? demanda Santana doucement, ne voulant pas déranger les parents en pleine altercation.

Louisa la regarda tristement avant de répondre d’une voix basse.

— Mes parents se séparent...

— Pourquoi ?

— À cause de ma sœur.

Santana fut sous le choc. Louisa avait une sœur ? Pourquoi ne l'avait-elle jamais vue ?

— Tu as une sœur ? s’étonna Santana.

Louisa sembla paniquée, comme si elle avait révélé un secret qu’elle n’aurait jamais dû partager.

— Non… Oublie ça... Ce n'est rien, balbutia-t-elle, visiblement agitée.

Mais Santana n'était pas dupe. Elle savait que Louisa venait de faire une grosse gaffe, et elle n’était pas prête à la laisser partir sans en savoir plus. Elle attrapa doucement la main de Louisa pour la retenir.

— Ta sœur a disparu, c’est ça ? C’est l’homme au chapeau haut de forme qui l’a emmenée ?

À mesure que Santana posait ses questions, Louisa pâlissait. Elle semblait terrorisée, mais elle n'arrivait pas à détacher son regard de celui de Santana. Juste avant de répondre, son père la saisit par le bras et l’entraîna vers la voiture.

La fête foraine : La pomme d'amourOù les histoires vivent. Découvrez maintenant