[Sterek] Instinct de survie

Chapitre 2

Il rentre sa tête dans ses épaules, comme par réflexe. Peut-être que s'il se fait suffisamment petit, il l'oubliera, juste aujourd'hui. Il presse le pas, fixe les portes du lycée. Il a peut-être encore une chance de se mettre en sécurité avant que tout ne dérape.

- Stilinski !

Plus qu'une vingtaine de mètres.
Quinze mètres.
Dix mètres.
Sept.
Son corps est projeté sur sa gauche. L'élan qu'on lui a gracieusement donné l'envoie à quelques mètres et sa tête cogne le bitume dans un choc sourd qui le sonne.
Stiles se redresse en grimaçant, le visage en feu et l'esprit embrumé. Son sac a amorti sa hanche mais son épaule à tout pris. Il a mal à en pleurer, pourtant il serre les dents et fronce les sourcils pour se concentrer. L'objectif ? Rentrer dans le lycée. Ne pas perdre l'objectif de vue. Rentrer dans le lycée à n'importe quel prix. Il se hisse à la force de ses bras, se relève.
Mais les autres sont là, l'ont encerclé pendant qu'il reprenait ses esprits. Il tourne sur lui-même, les compte. Un, deux, trois, quatre. Et lui.
Tous ricanent, l'observent comme s'il était une bête de foire, comme toujours. Stiles grimace de dégoût, il les déteste tous.

- Bah alors, Stilinski, t'es devenu sourd ?
- Non.
- Alors pourquoi tu réponds pas, quand je t'appelle ?

Stiles serre les mâchoires, grince des dents en silence. Il sait qu'il doit se taire. C'est dur, il a la réplique facile et ne tient jamais très longtemps sans répondre. L'autre met un coup de poing dans son épaule blessée, lui arrachant un grincement en guise de réponse. Le type esquisse un sourire sadique qui fait monter la rage dans le corps de Stiles.

- Bah alors ? Tu t'es fait bobo, Stilinski ? Tu veux qu'on appelle ta mère ?

Stiles relève les yeux, le toise avec hargne. Il le connait, ce sont toujours les mêmes attaques, les mêmes paroles blessantes. Pourtant, il se laisse toujours atteindre de la même manière. Comme un débutant.
Il devrait se taire, oui. Evidemment, qu'il devrait se taire. Mais que faire, lorsque le sarcasme est sa seule défense ? Il ne sait pas se battre. Il n'a pas de crocs, pas de griffes, pas de force ou de rapidité plus développée que la moyenne. Il est plus commun que n'importe quel être humain sur cette planète.

- Elle est où, ta mère ?

Les autres ricanent, autour. Ils ricanent et ils soutiennent leur pote, parce que c'est ainsi que ça marche. Personne ne prendra sa défense, comme toutes les autres fois.
Alors Stiles se redresse, la rage au coeur. Il en a mare, lui, de recevoir ces remarques, d'être ainsi traité depuis des semaines. Il se retient si fort de parler, qu'une autre énergie menace de s'extraire de son corps. Il la sent frémir à la surface de sa peau. C'est une mauvaise idée, mais elle est plus rapide à émerger que son sens de la répartie.
Il lui faut juste une seconde. Un court instant de réflexion pour commettre l'irréparable. Il balance son poing fermé dans la bouche de l'autre, pour le faire taire une bonne fois. Un cri de rage sort de sa gorge pour accompagner toute l'énergie qui s'évacue par cet unique coup de poing. Il se passe juste un instant, et l'autre est au sol, assis sur son derrière, qui n'a rien vu venir.
Stiles le toise, se met en garde alors qu'il n'a déjà plus une once d'énergie dans le corps. L'autre se relève dans un grognement de rage, hué par ses amis, poussé dans ses retranchements par ses propres spectateurs. Il fait face à Stiles, qui ne se démonte pas et le fixe toujours dans les yeux.
Stiles a mal à l'épaule, mais l'autre saigne de la lèvre et ça lui met du baume au coeur. Cette fois, il se rappellera de lui pour une bonne raison.
Mais l'autre n'est pas aussi ravi que lui. Il est même carrément furieux. Il s'avance d'un pas menaçant et Stiles se tend de tout son être, prêt à recevoir ses représailles. Il est ainsi : incapable de courber l'échine même lorsqu'il s'agit d'une question de survie. Alors il se campe sur sa position, les poings levés, menaçants.

- Tu veux te battre ?

Stiles ne répond pas. Pas la peine, de toute façon il ne lui demande pas vraiment son avis. Déjà, l'autre s'avance, prêt à frapper. Stiles se dit qu'il peut peut-être parer. Sur un malentendu, peut-être que ses bras se placeront bien. Peut-être que ses poings amortiront un choc qu'il ne recevra pas.
Mais lorsque l'autre balance son poing vers son visage, ses propres poings désertent le champ de bataille et il reçoit le coup dans le nez, avec une violence qu'il n'avait pas imaginée possible. Il s'étale au sol dans un bruit sourd et la douleur qui irradie son visage, lui donne le tournis.
Il voit trouble, se demande si c'est juste le choc ou si l'autre a touché quelque chose d'important. Quelque chose coule de son nez, c'est chaud et épais. Stiles passe le revers de sa main sur son visage qui le lance atrocement. Il le frôle à peine et retire son poignet parce que bordel, ça fait un mal de chien ! Son poignet dégouline de sang. Le sien ? Probablement.

- Donovan, il saigne.
- La ferme ! Personne n'approche.

L'autre le regarde avec rage, il n'a clairement pas fini son oeuvre. Il veut encore en découdre, mais Stiles peine à se concentrer. Il écarquille les yeux plusieurs fois pour essayer de rendre sa vue plus claire, en vain. Il appuie sa main au sol, bascule le poids de son corps pour se redresser.
Debout sur ses pieds, il reprend son souffle une seconde.

- Regarde-moi !

Pour une raison qui lui échappe, Stiles relève les yeux. A la seconde où l'autre entre dans son champ de vision, un poing s'écrase à nouveau sur son visage, par la droite cette fois. Sa pommette est en feu, sa mâchoire aussi. Stiles s'étale au sol dans un grognement sourd. L'autre rigole grassement, visiblement le spectacle lui plait. Ses copains le soutiennent, rient avec lui.
Stiles se redresse encore, laissant les autres perplexes, cette fois. Il ne voit plus trop qui fait quoi, n'est même pas sûr que c'est toujours le même qui lui fait face. Son visage lui donne l'impression d'avoir été passé au hachoir à viande. Quelque chose coule de sa bouche et il ne saurait dire si c'est du sang ou de la salive. Peut-être un mélange des deux, après tout.
Stiles se redresse maladroitement, titube, tombe et se relève. Il se tient les genoux, tente de garder son équilibre. Les autres poussent des soupires étonnés tandis que son adversaire lui fait face à nouveau.

- T'en veux encore ?

Son oeil gauche ne voit même plus. Le droit perçoit seulement des formes, des ombres vaguement colorées. Il se met en garde. Hors de question d'abandonner. Il lâchera prise lorsque son cerveau s'éteindra, pas avant.
Il avance d'un pas, se sent sombrer. Une nausée le prend, qu'il retient fermement au fond de ses tripes. Il lui semble que l'autre approche. Il va se prendre un autre coup, il l'attend sans broncher.
Mais le choc ne vient jamais. Stiles piétine sur place, déterminé à rester debout malgré les flash qui l'aveuglent et la lourdeur de ses jambes. Quelque chose bouge devant ses yeux. Quelques chose de grand et de sombre, accompagné de bruits étranges. Il plisse les yeux, essaie de comprendre ce qui se passe, mais son esprit flanche à mesure que les secondes s'égrainent.
Finalement, il s'écroule. Il perd connaissance bien avant de toucher le sol et il remercie son cerveau de lui avoir épargné la douleur de l'atterrissage.