Chapitre 12

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- Tu as une sacrée chance d'avoir des amis loups-garous, Stiles.
- Ouais, on me le dit souvent.
- Je suis sérieux. La toxine présente dans la salive des wendigos est un acide puissant, couplé à un neuro-dégénérateur. Je n'avais aucune idée du temps qu'il allait te falloir pour l'éliminer, ni même si ton corps y parviendrait.
- Mais je suis là, bien vivant, non ?
- J'ai bien peur que ce ne soit pas suffisant pour te juger sorti d'affaires.
- Qu'est-ce que vous voulez dire ?
- La toxine est encore présente dans ton sang et sans les efforts de la meute pour maintenir ton état stable, j'ai peur que l'acide continue de détériorer ton organisme.

Un silence pesant s'installe quelques secondes entre les deux hommes. Stiles essaie de faire ses propres déductions en observant le visage fermé du médecin. Son air tendu ne lui dit rien qui vaille.

- Je suis inquiet, pour être honnête. Je n'ai jamais vu ou entendu parler du cas d'une proie de wendigo qui aurait survécu. Cette espèce consomme le fruit de ses chasses dans les heures qui suivent la capture et personne n'est allé chercher une victime pour la sauver.
- Vous êtes en train de me dire que mes amis ne font que retarder l'échéance ?
- Je n'en n'ai pas la moindre, idée, je suis désolé. Ce que je constate, c'est que la toxine est toujours bien présente dans ton organisme. Scott et les autres l'empêche d'agir à chaque fois qu'ils absorbent ta douleur, mais le temps va les épuiser et je ne sais pas encore si leurs efforts donneront un quelconque résultat. Je vais te faire une prise de sang pour faire des analyses et comparer les résultats avec celle que je t'ai faite hier soir.

Stiles reste silencieux, perdu dans ses songes. Il a toujours eu peur d'avoir la même maladie que sa mère. Il a toujours craint de finir comme elle, incapable de reconnaître ses proches et poussé dans une paranoïa excessive qui le mènerait à faire du mal à son entourage. Malgré tout, jamais il n'aurait imaginé que son heure viendrait si tôt, et encore moins à cause d'une créature surnaturelle.
Sans plus échanger un mot, Deaton s'éloigne vers ses étagères pour y récupérer une seringues et plusieurs tubes stériles, qu'il dépose à côté de Stiles. Les jambes pendant dans le vide, l'adolescent se concentre sur ses pieds. Il ne peut pas demander à la meute de tenir son chevet jusqu'à son dernier souffle : il ne sait même pas combien de temps il lui reste.

- Je ne me sens pas si mal, pourtant.

Du moins, tant que les loups ne sont pas loin, il supporte la douleur. Peut-être s'intensifierait-elle, si il restait plus longtemps sans avoir la visite de ses amis. Il soupire doucement, tandis que le vétérinaire remplit les fioles les unes après les autres.

- Eh, vous m'en laissez un peu ?

Un maigre sourire étire les lèvres d'Alan, juste avant qu'il ne pose un coton sur l'aiguille pour la retirer du bras de Stiles. Il emmène aussitôt les tubes de sang chaud pour les stocker dans son réfrigérateur après les avoir étiquetés, puis il retire ses gants qu'il jette dans une poubelle.

- Je ferai les analyses cet après-midi et nous en reparlerons dans la soirée.
- Si je suis encore en vie d'ici-là.

Son air résigné fait peine au vétérinaire, qui s'essaie à une mine pleine de compassion malgré l'inquiétude qui le taraude. Il ne sait pas si Stiles vivra jusqu'au soir. Il nage dans l'inconnu et déteste cette sensation d'urgence qu'il ne peut combler.

- Derek, tu peux entrer.

Stiles redresse la tête, intrigué d'apprendre que l'Alpha était tout ce temps resté dans la salle d'attente. Il pose sur Deaton un regard inquisiteur, auquel le vétérinaire répond par un haussement d'épaules.

- Alors ?
- Emmène Stiles, il a besoin de repos et je doute que ma table d'auscultation soit aussi confortable qu'un vrai lit.

Stiles soupire doucement. Il aurait aimé que les autres ne soient pas en cours. Il se sent mal à l'aise en présence de Derek et l'inquiétude du loup déborde presque par ses yeux. Stiles quitte la table, s'appuie dessus pour prendre son élan et se met en marche en direction du loup qui l'attend devant la porte.

- Je vous le ramène ce soir ?
- Inutile, je viendrai dès que j'aurai les résultats. Merci, Derek.
- Merci à vous.

Sans plus porter un regard sur le vétérinaire, Derek quitte la pièce pour suivre Stiles jusqu'à sa voiture. L'adolescent est silencieux mais l'alpha ne cherche pas à combler le vide : il a entendu toute la conversation dans le cabinet, et lui aussi est inquiet. Il voudrait consoler Stiles, lui promettre que tout ira bien. Mais si même Deaton ne sait rien, ils ne peuvent qu'attendre et espérer que Stiles s'en sortira.
Sur le trajet, Derek serre les mâchoires face au mutisme de Stiles. Il le sauvera, c'est décidé. Et s'il doit y laisser son statut d'Alpha, ce sera sans aucun regret. Plutôt vivre en oméga que sans Stiles dans sa vie.

- Tu veux que je te ramène chez toi ?
- Non. J'ai dit à mon père que je passais la nuit chez Scott et que j'irai en cours avec lui. Je n'ai pas envie de lui faire face maintenant.

Derek obtempère, changeant de direction pour rejoindre son loft. Au moins, Stiles y sera en sécurité, en attendant d'en savoir davantage sur sa santé. L'adolescent ne dit rien, mais le loup voit très bien ses traits tirés par la souffrance qu'il endure. Il voudrait lui prendre la main mais n'ose pas, de peur d'être rejeté par le jeune malade. Alors il se contente d'accélérer, lorsqu'il remarque que l'adolescent sombre peu à peu.
Stiles, épuisé, essaie de se concentrer sur la route et de réfléchir aux solutions qui se présentent à lui. On dit que lorsque la mort approche, il faut mettre ses affaires en ordre. Mais Stiles réalise qu'il n'a aucune envie de mourir maintenant et qu'il aurait voulu vivre bien d'autres choses durant sa vie. Il n'avait jamais réfléchi à la question, mais aujourd'hui il voudrait pouvoir avoir un gâteau d'anniversaire avec plus de bougies qu'il ne pourrait en supporter. Et puis, il aimerait balancer à Derek ce qu'il ressent pour lui, avant de s'en aller. Juste pour voir sa tête au moment d'encaisser un tel choc. Il pose un ultime regard sur le profil du loup-garou, à côté de lui. Ouais, il faudra qu'il lui dise, avant de mourir. Ce sera sa toute dernière farce pour son fichu loup grincheux. C'est dans un sourire las qu'il se laisse finalement aller au sommeil. Tant pis pour les soubresauts de la voiture qui lui cognent la tête contre la vitre. 

[Sterek] Instinct de survieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant