UNE VIE MORBIDE

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CHAPITRE 1 : Une vie morbide

Jeudi 15 avril

Une journée pluvieuse assombrie par les nuages grisâtres. Un vent glacial balayant l'odeur nauséabonde d'essence s'échappant de vieilles autos et scooters des p'tits cons de mon lycée. La luminosité se ternissait, jeudi allait bientôt se terminer, enfin. J'en avais vraiment marre de rien foutre de la journée à ne pas bouger de ma maison délabrée tel un tétraplégique. Juste traîner la moitié de mon temps sur Grindr dans mon lit en critiquant les mecs qui jouaient trop les bogoss ou les vieux avec des tendances pédophiles, rattraper les cours chiants à en mourir que je manquais depuis plusieurs mois, dormir deux-trois heures et enfin mon exutoire favori, vider l'inventaire de Netflix sur la petite télé du salon jusqu'à finir par connaître tous les films et séries par cœur même en VO. Mais bon, c'était mon magnifique et passionnant quotidien qui me suivra jusqu'à ma mort.

J'entendis la porte d'entrée claquée, un coup brusque semblable à un coup de feu. Je sursautai et me levai péniblement de mon lit en frottant mes yeux sombres encore gonflés de ma petite sieste, puis rejoignis la personne qui était certainement ma sœur vu le boucan qu'elle faisait. Je descendis les marches d'escaliers d'un pas nonchalant et toussa légèrement en arrivant à la dernière marche. Ma soeur avait lissé ses cheveux noirs ce matin assez longtemps pour qu'elle parte en retard mais là, ils étaient redevenus bouclés et ses vêtements étaient trempés. C'était le genre de personne qui misait tout sur l'apparence et qui ne se gênait pas de dépenser le peu d'argent qu'on avait pour être la plus grégaire possible. La mâchoire serrée et le regard maupiteux, elle défit ses boutons avec difficultés, ses mains tremblaient sous la rage qui brûlait en elle.

"Celui qui à inventé la pluie, si je le trouve je lui arrache les couilles ! S'écria-t-elle en balançant son manteau à travers la maison, s'écrasant sur le carrelage blanc en le tâchant d'un mélange d'eau polluée et de boue.

-Salut Stella. Dis-je faiblement en allant chercher son manteau qui trempait le sol. Ça s'est bien passé ta journée ?

-M'en parle pas. Répondit-elle en faisant un mouvement bref de la main. En plus d'être trempée, mon lissage est foutu et j'me suis tapé un trois en histoire."

Je rangeai sa veste en jean noir dans le placard de l'entrée remplis d'autres manteaux divers et variés tandis je le la senti m'agripper par derrière en passant ses doigts gelés dans mes cheveux en bataille. Elle cassa mes boucles noires en frottant ses faux ongles blancs sur mon crâne.

"Mon p'tit Eden... Chuchota-elle en plongeant sa tête dans mon cou me partageant l'odeur de clope qui s'émanait d'elle.

-Je ne suis pas petit. Répliquai-je apodictement.

-T'es quand même mon p'tit frère, donc tu seras toujours petit à mes yeux.

-N'importe quoi. Répondis-je en rigolant.

-T'as mangé aujourd'hui ?

-Pas beaucoup...

-J'vais te préparer un p'tit truc.

-Non merci.

-Si si t'es obligé. Faudrait qu't'ailles te doucher aussi, parce que dormir toute la journée ne te réussit pas. Tu sens le chien.

-Ferme ta gueule." Dis-je en me dégageant d'un mouvement faible.

Je m'apprêtai à faire demi-tour quand je reçu une énième remarque.

"Mooh regarder moi ce joli p'tit cul ! Annonça-t-elle en me claquant la fesse droite.

-Stella !

-Bah quoi. J'me demandais juste c'est quand que ce p'tit Eden trouvera un mec, c'est sûre qu'en restant toute la journée à la maison c'est pas comme ça que tu trouveras quelqu'un. Et je parle d'une personne qui te mérite, pas de tous ces sales chiens à fond sur toi.

-Laisse moi avec ça.

-Nan parce que passer ta vie sur pornhub c'est pas cool, surtout que t'as taché ton short...

-Quoi !?"

Je paniquai et inspectai mon short noir sous tout les angles avant de remarquer ma grande soeur morte de rire. Ses blagues n'étaient pas vraiment marrantes. Je lui fis un faux sourire accompagné d'un doigt d'honneur avant de remonter dans ma chambre. Je ne manquai pas de cacher mes fesses avec mon large t-shirt blanc, histoire de n'avoir aucune réflexion de la part de cette pouffiasse qui me servait de soeur.

Soudainement, je me mis à tousser abondamment, brûlant ma gorge déjà bien amochée par la toux, je dû m'accroupir dans les marches d'escaliers en essayant de respirer normalement. Stella arriva en courant tandis que cette fameuse douleur intercostale fit son apparition, sensation qu'une main froide et rugueuse pressait mon organe de ses ongles acérés. Je me calmai lentement pendant qu'elle me caressait frénétiquement le dos de haut en bas en pensant sûrement que j'allais me sentir mieux après, qu'elle conne.

"Y'a besoin d'appeler l'ambulance ou pas ? Me demanda-t-elle en tâtant la poche de son jean cannelle, les ourlets crottés par ce temps.

-Non c'est bon ça va aller, merci. Mentis-je en lui adressant mon plus beau sourire.

-Ok... Tu m'appelles si ça va pas."

Je lui fis signe que ça allait et montai rapidement à l'étage, les muscles raides et l'allure crispée légèrement boiteux. Je fis genre que j'allais dans ma chambre en suivant les lignes du parquet guidant vers le bout du couloir, puis au dernier moment je tournai à gauche et partis m'enfermer dans la salle de bain à double tour. J'ouvris ma main que j'avais laissée fermée et découvris les quelques taches de sang qui résidaient dans ma paume. L'odeur nauséabonde d'un mélange de fer et de mucus me prirent les narines et je tirai une tête dégoûtée avant de donner un faible coup du revers de la main sur le robinet pour l'ouvrir.

"Stupide cancer à la noix." Soufflai-je en me lavant les mains avec un savon dégageant un parfum d'huile essentielle assez fort pour couvrir l'émanation de mes entrailles pourrissant de jour en jour.
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~Eden~

Qui sont les vivants ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant