Qui sont les vivants ?

DÉSOLÉ

CHAPITRE 7 : désolé

Mardi 21 avril

Je soufflai en fermant les yeux et m'asseyai en regardant l'extérieur, les nuages glissaient dans le ciel, il y avait beaucoup de vent aujourd'hui. Je le sentis s'asseoir à côté de moi dans un silence pesant, maintenant je me sentais mal à l'aise à côté de lui et vraiment en colère. Je baissai la tête et jouai avec mes doigts, je regrettais quand même un peu ce que j'avais fait, sachant qu'il avait l'air gentil.

"Tenshi… Je suis désolé de t'avoir crier dessus tout à l'heure… Lui dis-je en n'osant pas le regarder.

-Non, c'est moi qui n'aurais pas dû fouiller dans tes affaires.

-Je suis gay t'as raison."

Mon cœur se serra et l'angoisse m'oppressait. Je n'aurais jamais dû lui dire. Il allait me rejeter comme tous les autres alors j'avais construit une carapace afin de me protéger et cette obduration me convenait même si c'était vraiment stupide et immature.

"Ok. Et alors ?"

Je fus surpris de sa réaction. Je relevai mon visage et plongeai mon regard dans ses yeux bleus glacés.

"Que tu sois gay, hétéro, trans ou autre on s'en fout. Ça ne change pas qui tu es et je te trouve plutôt sympa."

J'étais totalement ému. Je ne savais pas quoi dire, ni quoi faire. Pourtant il n'avait rien dit de particulier, mais c'était la première fois que quelqu'un me disait un truc comme ça. En général on me crachait à la gueule et on me jetait des vieux mégots de cigarettes devant le lycée, c'était ça de vivre dans les mauvais quartiers.

"Quand j'ai fait mon coming-out à mes amis… Commençai-je. Ils m'ont tous rejeté, insulté, harcelé et fait du mal… Avouai-je en passant mes doigts sur mes cicatrices. Tout le monde me déteste au lycée… Il n'y a que ma sœur qui est au courant. Ma mère ne l'est pas… J'ai peur de sa réaction. J'ai commencé à me détester pour ça. Je me suis mis en couple avec une fille et je me suis forcé à rester avec elle alors que ça ne me plaisait pas du tout juste pour essayer de persuader les autres que les rumeurs n'étaient pas vrai. J'ai tenté de me suicider il y a plusieurs mois. Ça n'a pas marché… Et c'est pour ça que je le cache à tout le monde…

-Le suicide ce n'est jamais la bonne solution. T'abandonnes tous les gens qui t'aiment, et ça fait du mal à tout le monde.

-Je sais mais quand tu te sens à ta place nul part et que tu ne reçois presque plus d'amour…

-Et tu t'es vraiment forcé à être avec une fille ?

-Oui…

-Ce n'est pas bien. Il faut que tu sois avec quelqu'un qui te plaît, sinon tu te fais du mal pour rien."

Tenshi baissa les yeux et posa son regard sur mes lèvres. Je fixai son visage angélique et mon cœur se mit à battre rapidement mais je me sentais plus embarrassé qu'autre chose.

"À chaque fois que quelqu'un me plaît il est hétéro ou c'est un connard qui ne veut que mon corps. Dis-je en détournant le regard pour venir le poser sur l'extérieur à travers la fenêtre.

-C'est que tu n'avais pas trouvé la bonne personne."

Je ne comprenais pas trop où il voulait en venir. Je relevai la tête et me tournai vers lui. Je passai mes yeux sur chaque trait de son visage. De ses yeux bleus bridés et les poches violacées en dessous, de ses petites tâches de rousseur, ses joues creusées et son teint rosie à sa bouche. Je lançai des regards furtifs sur ses lèvres et il fit de même.

"Si ça se trouve cette personne me déteste et puis je ne la connais pas vraiment… Avouai-je en détournant une nouvelle fois le regard, l'atmosphère commençait vraiment à me prendre la tête et me faire imaginer des trucs faux.

-Alors comment tu veux savoir ça si tu ne lui as pas demandé ? Répliqua-t-il en dégageant de son pied les pétales de roses tombées.

-Mais je… Je ne sais pas, je suppose c'est tout car c'est la vérité dans quatre vingt dix pour cent des cas…

-Mais si finalement elle aussi est attirée par toi ? Lâcha-t-il avec une voix suave.

-Et bah tant pis, j'aurais loupé ma chance.

-C'est triste…

-Pourquoi tu es attiré par moi ?" Dis-je subitement avec une pointe d'énervement, j'en avais un peu marre qu'il tourne autour du pot.

Silence. Je me sentis vraiment honteux d'avoir supposé ça, il allait me rejeter c'était sûr. Je baissai la tête et cachai mon teint rouge de honte sous mes cheveux bouclés. Je sentis ses doigts venir s'entrelacer entre les miens, il avait les mains froides. Je fixai ses doigts pâles en sentant mon rythme cardiaque augmenter. Premier contact avec lui. Mon corps entier fut pris d'une grande sérénité d'un calme remarquable. J'avais l'impression que la froideur de sa peau se transformait peu à peu en une douce chaleur qui venait envelopper mon cœur. Je levai brusquement les yeux et échangeai un regard avec lui. Il prit soudainement possession de mes lèvres en me surprenant un peu. Je ne m'attendais pas du tout à cette situation mais il fallait avouer que j'en mourrais d'envie. Je lui rendis le baiser et commençai à l'approfondir en passant mes mains des deux côtés de son visage. Je glissai ma langue dans sa bouche et m'allongeai sur le matelas. Ma libido était déjà très haute ces derniers temps et mon envie était insupportable. J'enroulai une cuisse autour de sa taille, la respiration tremblante et il l'attrapa avant de la caresser. Je passai mes doigts dans ses cheveux et il fit de même avant que je ne vienne lui embrasser le cou mais il sursauta. Il se releva brusquement et se figea, la bouche entrouverte et la respiration saccadée. Il me fixa avec un regard apeuré. On aurait dit qu'il venait de se rendre compte qu'il venait de faire une erreur.

"Désolé."

Il baissa la tête et partit rapidement de la chambre en claquant la porte. Je restai cloué dans mon lit totalement déboussolé. Je n'avais pas compris ce qu'il venait de se passer et mon corps en était aussi troublé. Je repris tranquillement ma respiration en essayant de comprendre ce que j'avais fait de mal, je pensais qu'il attendait ça de moi, comme tous les autres. De toute façon, je le savais, tout le monde me détestait et me rejetait alors il ne pouvait pas y avoir d'exception. Je me relevai et fixai la porte de la chambre, un silence de mort régnait dans la pièce et ça me dérangeait.
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