𝐏𝐋𝐈𝐆𝐇𝐓 ᴿᵃʸ ˣ ᴿᵉᵃᵈᵉʳ│Tome 1

𝐓𝐨𝐢 𝐨𝐮 𝐦𝐨𝐢

-Non! S'écrie Ray tandis que tu écoutes toujours derrière la porte, le cœur battant. Je veux dire, tu ne peux pas faire ça!

-Et pourquoi donc? Je suis l'éleveuse, vous êtes le bétail, c'est moi qui décide de votre sort, tu ne crois pas?

Quelques secondes qui te paraissent durer des heures passent sans que ni Maman ni Ray ne prenne la parole.

-C'est moi qui ai tout dit à Norman et Emma, déclare soudain Ray. Je suis de leur côté depuis le début. (T/p) n'a rien à voir là dedans, je suis le seul responsable de mes actes. Si quelqu'un doit être livré, c'est moi.

Tu écarquilles les yeux de surprise. Mais qu'est ce qu'il lui prend? Il ne compte quand même pas se faire livrer à ta place? Contrairement à toi, Ray ne peut pas devenir maman, lui!

-Tu la protèges.

Cette dernière phrase n'était pas une question mais une affirmation, tu le sais au ton de la voix de Maman, à mi chemin entre douceur et méfiance.

-Peut-être bien que oui, rétorque Ray, une once de défi dans la voix. Et? Qu'est-ce que ça change? Comme tu viens de le dire, tu es l'éleveuse et nous sommes le bétail. Je viens de mettre fin à notre marché, ce qui signifie que je peux révéler le secret de Grace Field aux autres, ce serait embêtant, tu ne crois pas?

Tu as envie de hurler, de pleurer, de supplier Maman de ne pas écouter le noiraud et de te livrer toi, comme elle avait initialement prévu de le faire. Mais tu sais que Ray a joué sa carte maîtresse: en annulant son contrat avec Maman, cette dernière se retrouve obligée de le livrer, sans quoi elle perdrait son poste d'éleveuse si ses supérieurs apprenaient qu'elle n'a pas respecté le protocole à suivre.

Ray est une menace pour les fermes, et elle le sait.

-Tu es obligée de me livrer, achève de la convaincre le noiraud. Pour une fois, c'est toi qui n'as pas le choix.

Nouveau silence, avant que la voix de Maman ne reprenne:

-Après six ans de coopération, c'est dommage d'en arriver là, mais si c'est ce que tu souhaites... Tu seras livré dès demain.

C'en est trop pour toi, tu ne peux pas accepter ça. Tu ne réfléchis pas et ouvres la porte d'un geste brusque.

-Ray!

Tu regardes tour à tour le noiraud, qui paraît horrifié de te voir là, puis Maman, qui n'a même pas l'air surprise de ta subite apparition.

-(T/p)? Qu'est-ce qu'il t'amène? te demande t-elle d'une voix douce.

Tu sais bien qu'elle connaît déjà la réponse. Tu t'apprêtes à tout lui avouer, quand tu croises le regard de Ray, ferme et déterminé. Tu comprends alors que sa décision est prise, et qu'essayer d'arranger la situation ne ferait que réduire son sacrifice à néant.

-Désolée de vous interrompre, finis-tu par dire d'une voix légèrement tremblante, mais Ray doit m'aider à mettre la table. J'ai déjà cassé trois assiettes, je ne pourrai pas m'en sortir sans lui. Tu viens Ray?

-J'arrive... fait l'intéressé, décontenancé.

Sur ce, vous vous dépêchez de fuir la chambre de Maman pour rejoindre le meilleur refuge qui soit dans cet orphelinat.

🗝️🗝️🗝️

Dès que la porte de la bibliothèque est refermée derrière vous, Ray s'assoit à même le sol, le dos calé contre une étagère, le regard vide.

-Ray... souffles-tu en t'accroupissant à côté de lui. Tout est de ma faute...

Le garçon relève la tête vers toi, ses pupilles grises te détaillant comme s'il essayait de mémoriser chacun de tes traits, avant qu'il ne prenne finalement la parole:

-Non, tu n'y es pour rien, déclare t-il sans une once d'hésitation. C'était toi ou moi. Je ne regrette pas ma décision.

Durant quelques minutes, vous vous observez silencieusement, la douleur dans vos yeux parlant pour vous.

-Est-ce que... tu peux me prendre dans tes bras? demandes-tu soudain d'un ton légèrement hésitant.

Ray acquiesce. Tu avances de quelques pas pour réduire la distance entre vous deux et te blottis contre lui. Ta tête calée sur son épaule, tu laisses enfin cet immense sentiment de désespoir prendre possession de toi. Tu as beau être submergée par le chagrin, tu ne peux t'empêcher de te sentir bien dans les bras de Ray, ce qui ne fait que renforcer ton impression que rien de ce qui vient de se passer n'est réel.

Vous restez ainsi pendant un long moment, chacun perdu dans ses pensées, si bien que vous entendez à peine la cloche sonner, vous arrachant à votre bulle et vous annonçant par la même occasion que le dîner est prêt.

-On était censés mettre la table, murmure Ray.

-Tant pis. De toute façon, je ne veux pas assister au repas, Maman va sûrement annoncer ta livraison aux autres.

Tu fermes à nouveau les yeux, essayant de te concentrer pour trouver un plan express. Mais tout ce qui te vient à l'esprit, c'est le visage du noiraud.

Pourquoi faut-il que je commence à accepter mes sentiments pour lui seulement maintenant? penses-tu juste avant de t'assoupir.