L'énigme de Saint-Solgrève : Voyage vers l'entre deux mondes

Chapitre 2 : MAX

 19 janvier 2021,                                         

 8 h 30 – Commune de Saint-Martin-sur-Iveux

– Max !!! Lève-toi, tu vas être en retard !

J'ouvre les yeux en sursaut et pendant un instant je perds la notion du temps et de l'espace. Où suis-je ? Quelle heure est-il ? C'est quand j'aperçois Liam au-dessus de moi que je réalise que l'on est mardi matin et que j'ai encore raté mon réveil.

– Pourquoi ne m'as-tu pas réveillé avant ? Tu vois bien que je vais être en retard, m'écrié-je en esquivant le baiser qu'il tente de me faire.

Pour réponse, son rire résonne dans la chambre. Il connaît mon humeur détestable du matin et ne prend même plus la peine de rétorquer. Pour ainsi dire, cela fait tout de même six ans que nous sommes ensemble et plus rien ne pourra nous séparer. Je m'habille alors en vitesse, enfilant le premier t-shirt qui me tombe sous la main. Je ne trouve pas le temps de me regarder ni de passer par l'étape de la douche. Liam m'intercepte avant que je franchisse la porte pour me rendre à la cuisine, pose ses mains sur mes hanches et m'embrasse tendrement :

– Tu feras attention, chéri, tu as mis ta chemise à l'envers, me précise-t-il en rigolant à gorge déployée alors qu'il s'éloigne déjà pour lire son journal sur le canapé.

Après un café, je commence à me réveiller et je me mets à rire avec lui tant sa gaieté est contagieuse et tant il transpire la bonne humeur. Vivre à ses côtés est vraiment un bonheur quotidien. Je prends quelques instants pour l'observer.

– Tu sais que tu es gênant quand tu me regardes comme ça ?

Toujours en riant, je lui donne une petite tape sur son épaule musclée. Je n'y peux rien ! Il a tout simplement une bouille d'ange, encore davantage quand il est embarrassé. Ses traits sont fins et ses yeux étirés. Ses iris sombres, presque noirs, créent une harmonie sur son visage, incomparable à ce que j'ai pu voir en presque trente ans de vie.

– Dites donc, monsieur, vous allez combien de fois par semaine à la salle ? demandé-je entre deux éclats de rire en déplaçant ma main de son cou jusqu'à son torse.

Je peux discerner les traces de musculature de ses pectoraux et de ses abdominaux. Ses épaules sont naturellement très larges et son dos aussi long que ses jambes, quasiment.

– Arrête, tu sais très bien que c'est à cause du travail et que je n'aime pas le rendu, s'exclame-t-il en faisant une moue adorable et en se regardant dans le miroir.

– Et toi, tu sais très bien que j'adore ça ! Alors cesse de te plaindre ! haussé-je le ton en venant lui pincer les hanches, ce qui engendre un rire de sa part. Je dois y aller, bonne journée, mon cœur.

Avant de partir, je n'oublie pas de l'embrasser et de le serrer fort dans mes bras. Puis je sors de la petite maison que nous avons tout récemment achetée ensemble dans la commune de Saint-Martin-sur-Iveux, où j'occupe la fonction de lieutenant de police. Quand j'arrive au poste, je gare ma voiture à ma place attitrée et je me rends directement à mon bureau. Je m'assois dans cette même chaise, devant ces mêmes papiers. Que vais-je bien pouvoir faire aujourd'hui ?

Avant que je puisse commencer à m'ennuyer, mon téléphone de service se met à sonner.

– Lieutenant Andrew à l'appareil, j'écoute.

– Bonjour, lieutenant, ici Sam ! s'exclame-t-il d'une voix empressée, ce qui me fait me redresser et écouter d'une oreille plus attentive. Un cadavre a été retrouvé dans l'étang Pique-Tierre. Je faisais ma ronde matinale et j'ai croisé un chasseur tout paniqué qui dit avoir vu un corps à la surface ; avec le vent qu'il y a eu cette nuit, il a dû être ramené sur le bord.

– J'arrive tout de suite, merci, Sam.

Je raccroche et je fonce vers ma voiture. Enfin une enquête à résoudre ! Voilà pourquoi j'ai choisi ce métier ; je veux punir les assassins. Comprendre et élucider les mystères qui planent autour de l'horreur de la race humaine. Je mets les sirènes qui résonnent dans cette petite commune de cinq mille habitants à peine. Il est plutôt rare que je les allume, hormis pour faire peur aux quelques délinquants qu'il pourrait y avoir. Les têtes des voisins apparaissent à travers les fenêtres, eux-mêmes surpris d'entendre ainsi l'alarme envahir leur tranquillité quotidienne. Je finis par arriver sur les lieux où les équipes marines ont repêché le cadavre. Les techniciens en identification criminelle sont présents eux aussi. L'affaire va être sérieuse. Je m'approche de Sam, qui parle au chasseur :

– Alors, Sam, qu'est-ce qu'on a ? Quelle paraît être la cause de la mort ? demandé-je en cherchant la dépouille des yeux.

– On ne sait pas encore à l'heure actuelle. C'est compliqué, car le corps a déjà de nombreuses traces de pourriture à cause du contact de l'eau. Mais, à première vue, il semble n'y avoir aucune présence de contusions. On peut supposer qu'il n'est pas mort violemment. Peut-être a-t-il été empoisonné ou s'est-il noyé ?

Je hoche la tête en regardant l'équipe ramener le cadavre sur le bord. À l'observer, son teint cireux et le gonflement de sa peau indiquent un décès d'au moins quelques jours. Étrange, pourtant... Aucune disparition ne m'a été rapportée. À première vue, il n'a en effet aucune trace de sang ou de plaie engendrée par un choc. Il ne semble pas non plus avoir des hématomes liés à des hémorragies internes, mais vu l'état de décomposition avancé, nous ne pouvons encore rien affirmer. Il va donc falloir attendre les retours du médecin légiste et des laboratoires afin de connaître la cause de la mort.

– Vous avez trouvé des papiers sur lui ?

Sam acquiesce et me donne son portefeuille, dans lequel je déniche son permis de conduire ainsi que de nombreux documents en lambeaux.

– Adam Langaster. Mon Dieu... C'est l'ami d'enfance de Kiara...

Cela expliquerait pourquoi je n'ai pas eu de signalement ! Adam Langaster a déménagé à l'autre bout du pays il y a plusieurs années. Mais comment peut-il donc se retrouver ici après tant de temps ? Que s'est-il passé ?