3# 20 avril

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Cela fait plusieurs semaines que je vais voir Jean tout les soirs. Le travail est de plus en plus dur, mais je ressens vraiment les progrès. Au niveau scolaire par contre... Je n'ai plus une minute à moi mais cela m'importe peu. Je n'arrive pas à rester concentrée pendant deux minutes tant je suis excitée et mes notes sont en chute libre. J'ai clairement oublié de réviser pour le bac et je pense que le talent ne marchera pas. Je suis pleinement consciente que je risque gros, mais mon cerveau ne peut pas s'arrêter de penser au casting. Tellement que je ne fais plus de piano et ne compose plus aucune chanson. J'ai des tonnes de textes annotés regroupés dans un classeur pour que je m'entraîne à les jouer devant ma glace. A chaque fois, je ne me trouve pas convaincante, mais Jean me dit tout le temps le contraire. Je ne sais pas qui je dois croire...

Ça y est, le grand jour est arrivé. Jean s'est proposé pour m'accompagner au casting. On se retrouve à la gare. Mes parents m'ont accompagnée. Je n'aurai pas pensé qu'ils souhaiteraient me dire bonne chance avant que je parte. Il est très tôt et j'ai peu dormi. Le casting commence à 10h mais je ne passe qu'à 15h30. Selon Jean, il ne durera qu'une vingtaine de minutes. Ils me demanderont certainement de lire un texte et d'en faire ressortir tout les sentiments.

Le trajet était très rapide, Jean m'a fait faire des exercices pour déstresser. On a mangé ensemble au restaurant, il s'est borné à payer et je l'ai remercié. On arrive sur le lieu du casting avec une heure d'avance. C'est un petit théâtre qui ne paie pas de mine. Les couloirs sont froids et la peinture s'écaille par endroits. Je suppose que tout les théâtres sont ainsi pour arrêter mon angoisse.

Nous arrivons dans les loges où des jeunes filles qui me ressemblent toutes plus ou moins attendent aussi. Jean me donne quelques dernières petites indications mais je ne l'écoute pas vraiment. J'ai les oreilles qui bourdonnent et ma vision se trouble. Ce n'est vraiment pas le moment d'avoir une migraine ! Je décide d'aller aux toilettes quelques instants. Me connaissant bien, j'avais emporté mon traitement. Je l'avale sans broncher et ferme les yeux un moment. Quand je les rouvre, ma vision est de nouveau normale et mes oreilles se sont calmées. Je regarde dans le miroir et aperçois une fille derrière moi. Elle me dévisage, je fais de même. Elle est grande, ses cheveux noirs de jais descendent jusqu'à ses reins. Elle est longiligne et a des vêtements noirs en cuir. Elle est maquillée d'un trait noir sous les yeux, il coule, elle a dû pleurer. Malgré tout, je suis hypnotisée par ses traits fins et son charisme.

- Salut je m'appelle Jeanne, me dit-elle.
- Je suis Ema.
- Tu es pâle, tu es sûre que tout va bien ?
- Oui merci, ça va aller. Tu es déjà passée ?
- Oui je viens de passer. Je stressais énormément et j'ai l'impression d'avoir tout raté.
- Mince, j'espère que ça va aller. Tu fais du théâtre ?
- Oui, depuis que j'ai 5 ans. Ah, je ne comprends pas... Jamais un casting ne s'était passé comme ça... Et toi, tu fais du théâtre ?
- Oui, depuis une dizaine de jours. Elle se pince les lèvres mais j'essaie de l'ignorer.
- Essaie de rester naturelle, souriante et regarde-les dans les yeux, ça leur donne l'impression que tu as confiance en toi. Parle fort et n'hésite pas à improviser.
- Ils vont nous demander d'improviser ?
- Pas aujourd'hui, mais si tu vas à l'étape d'après, peut être.
- Wow, ok merci beaucoup pour ces conseils ! Je ferais mieux d'y aller... Merci énormément !
- Attends ! Donne ton tel, qu'on reste en contact !
Elle me fait un clin d'œil au moment où elle attrape mon téléphone. Elle rentre son numéro dans mes contact et s'envoie un message. Elle me rend mon appareil qui à l'air d'avoir pris de la valeur maintenant qu'une fille aussi belle l'a touché. Je la remercie, lui souhaite bon courage et essaie de lui envoyer mon sourire le plus encourageant. Je crois qu'elle m'envoie son meilleur sourire aussi.

Je file aux côtés de mon prof. Il ne reste plus beaucoup de temps avant que je passe et mon rythme cardiaque accélère de plus en plus. Quelques minutes plus tard, un jeune homme d'un vingtaine d'années arrive. Il est grand, blond et a des yeux bleus magnifiques. Il est habillé simplement mais cela met ses muscles en valeur. Je ne le quitte du regard qu'au moment où il m'appelle.
- Ema Brotelet s'il vous plaît.
- C'est moi, dis-je en me levant.
- Bien, suis-moi. Je lui emboite le pas et il me donne les mêmes conseils que tout le monde le temps du trajet dans le couloir. Bon, reste naturelle et fait de ton mieux. Je sais pas pourquoi je dis ça à tout le monde, on est tous au courant que c'est ça qu'il faut faire...
Je ris nerveusement.
- Ahaha ouais... C'est toujours bien de les rappeler... Il regarde derrière le rideau.
- Il y a encore quelqu'un, on a quelques instants. T'as snap ?
J'hésite.
- Oui.
Il me donne le sien et me tapote l'épaule au moment où je monte sur la scène. Mon cœur s'emballe, mais je ne saurai pas dire si c'est à cause de lui ou du casting.

In Ema's lifeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant