5 - Le pied entre deux rails

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 En pénétrant dans son cocon, la première chose qui me sauta aux yeux fut les nombreux espaces vides qui semblaient dévorer le peu de mobilier présent. Le studio, spacieux en lui-même, comprenait une cuisine devancée par un salon intimiste qui devaient couvrir à peine un tiers de la vaste pièce, laissant un large néant en amont des fenêtres qui donnaient sur la rue. Le « coin chambre » se trouvait à l'autre bout, seul, séparé du reste par une grande bibliothèque ouverte et posté aux côtés d'une porte qui devait mener à la salle de bain. Dans le renfoncement qui servait d'entrée, un porte-manteau entouré de plusieurs paires de chaussures tentait de s'approprier le vide apparent.

Le tout, décoré dans un style industriel aux tons sombres, mêlant noir et marron foncé, convenait parfaitement à l'image que je me faisais de son propriétaire. Alors que j'amorçais un pas, une odeur attira mon attention. Je dus réfléchir un long moment avant de comprendre qu'une fragrance d'un subtil mélange d'épices volait dans l'air. J'inspirais plus fort, essayant de rester discret et appréciais seulement l'ambiance qui émergeait de ce parfum agréable.

Mon regard distrait se posa sur son lit, défait, où un plaid noir avait été abandonné là, roulé en boule. Je ne pus m'empêcher de rire, m'imaginant Logan emmitouflé dans cette couverture « pilou-pilou ». Puis, en scrutant à nouveau son appartement, la tristesse m'envahit. L'unique impression qui se dégageait de chez lui était la solitude. Ce sentiment brisa quelque chose en moi. Il était vrai que je le voyais rarement accompagné, en dehors de ses subordonnés et la question qui s'imposa à moi fut violente : est-ce que, quelque part, il était aussi seul que moi ?

— Ça va ?

Sa voix me ramena à la réalité et je lui montrai un visage amical.

— Oui. C'est beau chez toi.

— Hm. C'est habitable. Mais ça me convient, je n'ai pas besoin de grand-chose.

Tandis qu'il s'éloignait afin d'aller récupérer son ordinateur, je m'avançais à pas de loup sur le parquet sombre, furetant dans ce lieu vide de toute vie. Mon regard fut attiré par un sac de frappes sur pied posté près d'une fenêtre. Je fus d'abord interloqué de trouver un tel accessoire disposé entre un salon et une chambre, mais un coup d'œil vers Logan me fit me dire qu'au final, ce n'était pas détonnant. Je m'avançai, sans pour autant toucher à quoi que ce soit.

— Tu veux essayer ?

Une nouvelle fois, il me surprit et je sursautais. Je secouai la tête, gêné.

— Non, je vais me casser le poignet.

Un air moqueur passa sur son visage lorsqu'il s'approcha et me dépassa. Il ouvrit une malle imposante et en sortit deux gants de boxe.

— Ce serait pas plus mal que tu saches un minimum te défendre. Je vais t'apprendre à donner un coup de poing. Tu vas voir, ça va te faire du bien.

N'ayant plus la force de me battre mentalement, j'abdiquai et enfilai les protections en cuir noir. Mes mains me parurent soudain très lourdes.

— Bon, instinctivement, si je te demande de frapper, tu utilises quel bras ?

Je levai le droit. Il vint se positionner à côté de moi, fléchissant légèrement les jambes.

— Première leçon ; comme tu es droitier, tu mets ton pied gauche en avant et le second, plus loin en arrière pour être un peu de profil. Tu remontes les poings de chaque côté du visage. Surtout pas devant, d'un parce que ça te bouche la vue et de deux, car ton adversaire peut s'en servir pour te frapper. Plies un peu tes genoux, tu ne dois pas être raide comme un piquet !

Bon élève, je m'exécutai. Je reproduisis ses mouvements du mieux possible. Il s'approcha et poussa mon front du bout de l'index. Je basculai alors en arrière et fis deux pas afin de retrouver un équilibre précaire.

NIGHTMARE 2 - Dystopique [MxM] [terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant