Tournesol

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Je phase.
Je flotte.
Je suis lourde.
Je suis là sans être là.
La tête bourdonnante mais le corps vide, comme une vielle bâtisse où nulle âme ne puisse vivre.
Semblable à un sol fertile recouvert de sel.
La colère et la frustration m'assaillent m'étouffent et me font convulser silencieusement.
Sans trouver le moyen efficace de lutter dans l'instant T.

J'aurai aimé être aussi fermement ancrée dans le sol que les arbres centenaires pour pouvoir apprécier le présent.
J'aurai voulu être aussi fluide que le courant d'une rivière pour tout saisir sur mon passage et tout emporter avec moi.
Ne montrer aux autres et à moi-même que les plus belles branches des arbres de mon verger. Les plus fleuries, les plus fruités, les plus attrayantes.
Mais elles ne suffisent pas à cacher les plus frêles d'entre elles, celles qui ne passeront pas l'hiver.
Celles qui sont dégarnies, affaiblies par le passage du temps et abîmées par les autres.
Pleurant le peu de pétales qui leur reste comme seuls feux de détresses.

Que ne donneraient-elles pas pour être étreintes et retrouver un peu de leur vivacité d'antan ?
Celle de l'époque des jeunes pousses.

Bien quelles ne retrouveront jamais pareil bonheur, je prie pour que ces pauvres branches baignent dans la lumière la plus douce qu'il ne leur ait jamais été donné de sentir. Qu'elles bourgeonnent et fleurissent sans entrave pour produire les fruits de ce dur labeur.

Bien que l'hiver soit rude, la longue nuit de l'âme finira par passer. Et avec sa fin, les premiers vrais rayons de soleil poindront, apportant avec eux un élan de béatitude et de renouveau.

"petit guide des grandes Espérances"Où les histoires vivent. Découvrez maintenant