Mafia Segreta (première partie réécriture : 01/11)

10.

GIULIA

FLASHBACK :

5 ans plus tôt, Italie

« Ligotée sur une chaise, la bouche scellée par un scotch, j'attends dans le silence. La pièce est plongée dans un noir total. Que dis-je, seule une bougie tourne encore et encore autour de moi.

-  Ma douce fille... résonne la voix abîmée de mon père.

Mon cœur se serre. J'ai beau me débattre, la corde s'accroche et ne me libère point. Je me sens même de plus en plus serré.

-  Allons, tu es une grande fille. Reste froide et impassible. Même si ça fait mal, même si tu veux hurler de douleur ou même si tu as la sensation de mourir... ne bouge pas. La souffrance ne bougera pas si tu t'agites. Tu es prisonnière, la seule technique qui te sauvera, c'est de sembler infaillible.

Joli cadeau pour mes seize ans.

-  Me fais-tu confiance ? Chuchote-t-il dans mon oreille.

J'agite la tête de gauche à droite.

-  Tu as bien raison. Maintenant, fais en sorte d'appliquer mon conseil. Sinon je ne m'arrêterais pas tant que tu n'auras pas compris.

La flamme s'approche doucement de mon visage.

Mon cœur va lâcher. Ma poitrine se comprime. »

Face à la cheminée, un raclement de gorge m'extirpe de ma rêverie intensive. Pensant voir Néréo, c'est un vieil homme mal en point qui me tend une bouteille de whisky. Je refuse poliment afin qu'il puisse se reposer au plus vite.

Discrètement, je dépose le bout de mon pouce sur la petite entaille que m'a infligé Néréo plus tôt.

Je n'arrive pas à croire qu'il nous ait tous deux blessés pour avoir le dernier mot. 

Ça ne m'a pas fait mal, je suis immunisée par ces coupures. Pour autant, s'il est capable sur un coup de tête de m'entailler la peau, je n'ose imaginer ce qu'il me fera quand nous finirons par nous faire face. Car je le tuerais, qu'il en soit certain.

Une ombre se dresse sous mes yeux. Marc a une emprise ferme sur mon menton qu'il relève. Sa bague s'enfonce dans ma mâchoire.

Reste froide et impassible.

-  Il t'a si bien éduqué.

Le tuer fait partie de mon contrat, j'espère. Ce que j'aimerais le bousculer dans les flammes derrière lui.

-  Tu n'as pas dû t'amuser. 

D'un geste calculé, je me retire de son emprise et me mets face à lui, déterminée à lui montrer la réelle femme que je suis. Oui, j'ai morflé et j'ai pleuré des tonnes et des tonnes de litre à cause de mon père. Et ce n'est certainement pas pour me laisser marcher dessus aujourd'hui. 

Je n'ai eu qu'un seul objectif depuis ma jeunesse tortueuse : dominer chaque homme de ce monde ignoble. 

-  Arrêtez de me traiter comme une soumise. 

Un verre qui casse résonne dans mes tympans. Pour autant, je ne cède pas et garder mes yeux rivés dans les yeux noirs du sexagénaire. Sa main ferme sert ma mâchoire. Son index appuie là où sa bague s'est enfoncée. Il sait faire mal, avec minutie. 

Néréo se relève coléreux. Devant nous, il semble communiquer avec Marc qui finit par me relâcher.

Je n'avais pas besoin de lui. Lorsque je m'apprête à dire ce que je pense, Néréo me fait un geste qui invite à me taire.