Raeni sursauta lorsque la porte claqua. Elle s'était pourtant retournée pour voir l'Ahal partir, mais sa fureur et la menace de se faire couper la langue l'avaient rendue nerveuse.
Une fois le silence revenu sur la petite pièce, elle reporta son attention sur le directeur. En cet instant, l'homme lui inspirait une profonde admiration : malgré ses frasques quotidiennes et tous les problèmes qu'elle avait pu apporter à l'orphelinat, il avait pris sa défense sans hésiter face à Vanador. Elle admirait son courage et se sentit presque honteuse de lui avoir causé tant de soucis. Elle s'en voulait même presque de l'avoir accusé, à de multiples reprises, de ne jamais montrer d'affection à ses pensionnaires. Il venait de lui prouver que même lui s'était attaché à eux. Elle se jura de limiter ses bêtises, à l'avenir.
Pourtant, le regard qu'il lui lança ne présageait rien de bon. Les éclairs furieux dans ses iris, qu'elle ne cessait de surveiller avec inquiétude depuis qu'elle était entrée dans son bureau, en disaient long sur sa pensée. Aussi, lorsqu'il laissa échapper un énième soupir avant de la fixer à nouveau, elle frissonna.
— J'espère que tu es fière de toi, Raeni.
La jeune femme pinça les lèvres. Déjà, la peur laissait la place à un profond dégoût pour cet alfombre qui se croyait tant supérieur à eux.
— Je n'allais quand même pas le laisser prendre la défense de Khassendrah ! se défendit-elle.
— Ta dernière remarque n'était pas nécessaire.
Malgré sa propre colère, elle admirait le calme dont il faisait preuve. Elle sentait sa frustration, certes, mais sa voix restait posée. Il en fallait beaucoup pour le faire sortir de ses gonds. Jusqu'à présent, ce n'était jamais arrivé, du moins à sa connaissance. Il semblait toutefois au bord de l'explosion.
— Je n'ai fait qu'énoncer la vérité, affirma-t-elle. Khassendrah lui a retourné le cerveau, à ce type !
— Parle autrement de l'Ahal, siffla-t-il.
A ses regards inquiets autour d'eux, elle devina qu'il craignait que le mage n'ait laissé des pièges magiques capables de les écouter. Cette pensée la fit frémir. De peur, mais aussi de dégoût.
Son tuteur s'éloigna d'elle pour commencer à faire les cent pas devant son bureau. En d'autres circonstances, Raeni l'aurait trouvé amusant, avec ses épais sourcils roux froncés et ses cheveux en bataille. Cependant, pour une fois, la gravité de la situation l'empêchait de se moquer. D'ordinaire, le directeur était un homme calme, posé, qui préférait discuter avec ses pensionnaires plutôt que de les punir. Ou, s'il y était contraint, leur trouver une tâche qui leur permette de prendre la pleine mesure de leur bêtise, sans pour autant les mutiler. Le voir ainsi agité ne rassurait pas Raeni.
— Quelle galère... grommela-t-il. D'abord ce vol, et maintenant ça...
— C'est Khassendrah la coupable, tenta-t-elle une nouvelle fois. Ayrik...
— Ton Ayrik est condamné, à cause de tes paroles ! s'exclama-t-il, furieux.
Il s'approcha d'elle, pour mieux la fixer dans les yeux. Un étrange malaise envahit la jeune femme.
— Si tu t'étais montrée plus délicate dans tes propos, j'aurais pu négocier avec l'Ahal pour lui épargner une punition trop violente, reprit-il. Mais ton interruption m'a non seulement forcé à me dresser contre lui, mais, en plus, tu lui as montré que tu étais tout, sauf saine d'esprit.
— Parce que, pour vous, c'est être sain d'esprit que d'accepter de se faire insulter ?
— Il y avait d'autres manières de le lui faire comprendre ! L'insulter en retour, ce n'était vraiment pas malin !
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Le Dragon des Mers
FantasyAn 7897 de l'Ère de Lumière. La guerre des Dragons s'était terminée quelques mois plus tôt, laissant des régions entières ravagées par les armées Humaines et celles des Peuples Premiers-Nés. Alors que tous s'unissaient pour reconstruire les terres s...