Chapitre 5

151 30 13
                                    

26 novembre

Debout devant son placard vide, Chris lâcha un juron. Quand Cam avait évoqué le problème, Chris n'avait pas imaginé que c'était à ce point-là. 

Les étagères désertes le narguaient, les trois grains restant au fond du sachet de café aussi. 

— Je suis sûr de pas avoir fini le paquet hier, bougonna-t-il.

[ S'il est une chose à savoir sur moi, c'est que mon stock de mauvaise foi est inversement proportionnel à mon stock de café.]

Chris fouilla encore dans le placard, puis dans le frigo, et même dans son armoire, en vain.

— Bourbe. J'vais devoir sociabiliser avec les darons...

Il jeta un œil à son horloge et gémit :

— C'pas humain de devoir sociabiliser aussi tôt dans la journée.

[Nous pourrions traduire ce fameux « si tôt » par... 14 h 30. Mais la mauvaise foi, tout ça...]

D'une humeur massacrante, Chris enfila un jogging et traîna ses pieds nus jusqu'à la porte de son studio. Avec un peu de chance, et même si c'était samedi, personne ne se trouverait dans la cuisine.

Il arrivait en haut de l'escalier qui reliait son couloir au reste de l'habitation quand il se figea net juste avant de percuter Cam. Le voisin, encore emmitouflé dans sa doudoune, un bonnet enfoncé jusqu'à ses yeux, cligne plusieurs fois des yeux avant de sourire :

— Oh, bonjour !

Chris se gratta la joue et recula, déstabilisé.

— Qu'est-ce que tu fais là? Normalement, tu passes par l'escalier extérieur... je veux dire, je t'avais jamais vu... à l'intérieur, encore, c'est un peu bizarre.

— Je... voulais te réveiller avec un bon café... mais je me suis fait alpaguer par ta sœur et ta mère. Elles sont ravies que tu aimes autant ma présence et...

— Café ? Tu as dit Café ? Tu as du café ! 

Un rire nerveux secoua Cam, qui montra les tasses qu'il avait en main.

— Eh bien, oui, j'ai du café !

[ Parce qu'en plus d'être de mauvaise foi, le Chris privé de caféine est un fin non-observateur. Et ce n'est pas là le pire que j'ai fait de la journée.

Oui, je me suis vraiment surpassé ce jour-là. J'ai enchaîné les idioties les unes après les autres. Pauvre Cam... je me demande comment il a eu la patience avec moi...]

— Et il y en a un pour moi ? Sans que je doive aller dans la cuisine ?

— Oui, bien sûr ! Sans sucre et avec un nuage de lait.

— Je sais pas comment t'as eu cette info, mais bourbe, je t'aime !

S'il n'avait pas été guidé par un fond de savoir-vivre, Chris lui aurait arraché la tasse des mains pour l'engloutir. 

— Moi aussi, même si je perds un peu espoir, souffla Cam d'une voix presque inaudible.

[On ne peut que comprendre ce pauvre Cam.]

— Hein ?

— Rien, je te disais, on devrait retourner dans ton studio avant de renverser le café. Et puis, j'ai un peu chaud.

[Voilà donc la première des idioties de la journée. On aurait pu penser qu'une illumination se ferait dans ma cervelle... mais que nenni ! Si je pensais bien, l'espace d'une seconde, que Cam n'avait pas pu proférer une phrase aussi longue, je ne m'attardai pas dessus et préférai rebrousser chemin dans l'espoir de récupérer au plus vite mon café.

Chris, ou comment se prendre pour Cupidon à NoëlOù les histoires vivent. Découvrez maintenant