Chapitre 12

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27 novembre

— Debout la marmotte !

La voix trop enjouée de sa sœur résonna désagréablement aux oreilles de Chris.

[Je n'ai rien trouvé de pire que d'être tiré du sommeil par l'enthousiasme de quelqu'un. Laissez-moi comater le temps d'émerger. Laisser -moi râler le temps d'avaler mon café ! Laissez-moi le temps tout court !]

— Rentre pas chez moi, bougonna-t-il en rabattant sa couette sur sa tête.

— Je suis déjà chez toi, sinon tu m'entendrais pas, se moqua Lise. Alors, lève-toi ! Sinon j'ordonne à Renoncule de t'attaquer !

En entendant son nom, la chatte se redressa.

— Renoncule, fais pipi !

— Ca va, ça va, je me lève, soupira Chris, résigné. Mais si ta bestiole me pisse dessus, j'en fait une descente de lit. Ou des pantoufles. C'est bien, ça, les pantoufles. 

Une menace de qualité qui terrorisa tellement Lise qu'elle éclata de rire alors que son frère émergeait enfin, les cheveux en bataille, la mine chiffonnée de fatigue.

[Ce n'est un secret pour personne dans cette maison que je préfère la présence des félins à celles des humains, et ce même s'ils m'urinent dessus de bon matin.]

— Qu'est-ce tu veux, Lise ? Attends... pourquoi t'as un bonnet de père Noël ?

— Parce que c'est le grand jour ! Le jour de la déco !

— Tu te fous de moi ?

— Pas du tout ! J'ai été pas mal prise par... un truc, ces derniers temps, mais quand on est allé se promener hier, je me suis rendu compte qu'on était en retard !!

Un sourire fier aux lèvres, Lise brandit deux paquets débordant de guirlandes, puis, du pied, lui montra un carton griffonné d'un gros "santons" autour duquel commençait à trottiner Chardon.

— J'suis pas de corvée de crèche, cette année, c'est toi, protesta Chris.

[Et notre mère se montre intraitable avec la corvée de crèche. Chaque année, il faut trouver un nouveau décors, toujours naturel. Il faut tout agencer avec soin, trouver une cohérence et surtout, surtout, cacher une nouveauté. Elle est persuadée que les enfants du village regardent notre création en mode " Où est Charlie ?" En vérité, ce sont surtout des personnes âgées qui s'extasient devant. Ou des touristes. Ou des touristes âgés. Beaucoup de touristes âgés.]

Lise déposa les sacs et s'agenouilla pour farfouiller dedans. Alors que les chats s'approchaient d'elle, curieux, elle en sortit une guirlande lumineuse et un paquet de boules tout en babillant :

— Mais cette année, j'ai envie de le faire avec mon grand-frère adoré.

[Même si je m'entends plutôt bien avec ma sœur, elle ne réserve le "grand frère adoré" qu'à deux situations :  quand je viens de lui offrir un cadeau... ou quand elle a besoin de mon aide pour quelque chose.

Et même si ma simple présence est le plus beau des cadeaux (surtout pour Cam), il me semblait évident que ce n'était pas pour ça que Lise me léchait les bottes ce matin... ce midi-là.]

— Laisse-moi prendre un café avant de me bourrer le crâne avec tes problèmes, râla Chris en s'extirpant de son lit. 

Il ne fit que trois pas avant de se souvenir de l'état de ses placards. Bien malgré lui, il jeta un regard vers la porte extérieure, puis vers sa sœur.

— Cam est pas là, par hasard ?

Elle en suffoqua de surprise.

— Tu... oh mon Dieu, Alléluia ! Tu as ouvert les yeux !

Chris, ou comment se prendre pour Cupidon à NoëlOù les histoires vivent. Découvrez maintenant