12 ¦ Castiel le problème

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Le principal problème de Castiel, c'était qu'on ne parlait jamais de lui. On l'oubliait facilement, peut-être même un peu trop. On négligeait ses sentiments sans le vouloir.

Le plus souvent, il servait de pont. Exactement comme ces dernières semaines. Obligé de choisir un camp, il naviguait entre Amaury, June et Elliot.

Amaury l'égoïste, celui qui semblait tout rater, qui depuis son accident parlait des fois tout seul, mais pour Castiel, c'était surtout son sauveur. Sa morale voudrait qu'il soit là pour lui, exactement comme il l'avait été, mais son cœur lui hurlait de choisir quelqu'un d'autre.

Elliot l'imbécile, celui pour qui son organe vital dans sa poitrine faisait des fois ces sortes de petits loopings bizarres, celui qui faisait des blagues tout sauf drôle, mais surtout celui qui le faisait pleurer chaque soir.

Et puis, il y avait June. June elle était là sans trop l'être. Elle l'aidait quand il avait besoin, mais c'était tout. June, elle se préoccupait plus d'à quel point ses cheveux poussait et de comment sa poitrine ressortait plutôt que du petit homme aux cheveux bleus à ses côtés.

Finalement, il n'eût pas à choisir, puisque apparemment personne ne voulait de lui. Ils s'étaient tous séparés, et ils l'avaient laissé.

Castiel ne leur en voulait pas. Il avait l'habitude d'être mis à l'écart.

D'un point de vue extérieur, leur groupe d'amis était le plus solide, le plus soudé, le plus admirable. Du point de vue du presque bègue, c'était un immense château de carte.

Il suffisait qu'une se décale légèrement pour que tout s'écroule. Elles étaient toutes tremblantes, reposant sur une base fragile, et s'il y avait un coup de vent trop fort, elles tombaient.

Évidemment, un château de carte, ça se reconstruisait. Mais pour ça, il aurait fallu que quelqu'un les aide à se souder, vraiment se souder.

Alors, assit sur son banc et regardant les passants, Castiel s'alluma une deuxième cigarette.

Il riait un peu jaune, le Castiel.
Il pleurait aussi peut-être, le Castiel.
Mais surtout, il était un problème, le Castiel.

Un problème gigantesque même. Un peu inutile, un peu ennuyant. Il savait que s'il était une carte de cet immense château, c'était parce qu'il reposait sur une base de pitié et de jugement. Maintenant qu'il n'avait plus ses remparts de papier, le problème pouvait s'intensifier.

Avant de rencontrer Amaury, il les admirait de loin, lui aussi.

Amaury le fêtard, celui qui se tapait des 15 de moyenne sans rien faire, celui qui avait le meilleur groupe de pote de l'univers, et celui qui ne savait même pas qu'il était dans sa classe.

Elliot le riche, qui l'étalait sans vergogne dans ses joggings Louis Vuitton, qui semblait si confiant et qui adorait avoir toutes les femmes à ses pieds sans même bouger.

Et puis il y avait June. June qui s'assumait tellement, qui était présente pour tout le monde, qui avait un si grand cœur et une confiance en elle énorme.

Ouais, il les admirait vachement à l'époque.

Il se sentait honteux à les regarder de loin. Il pensait même qu'il les salissait du regard.

Lui, il n'était que Castiel. Castiel le gringalet boutonneux qui parlait trop et trop fort. Castiel le petit châtain qu'on pouvait se permettre d'insulter parce qu'on avait envie. Castiel le peureux, le pleurnichard, le dégueulasse.

La honte de la classe. Celui à qui on ne parlait jamais par peur de devenir comme lui. Dès qu'on le frôlait, on courait se laver les mains pour se désinfecter et dès qu'on le voyait, on le pointait du doigt et se lançait un concours de celui qui le ferait pleurer en premier.

Il l'a maudit 5 foisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant