5 ¦ Un œil tout moche qui vole

29 4 18
                                    

"— Dis, les anges c'est pas censé être un œil tout moche qui vole ?

— Dis, un humain c'est pas censé nous respecter ?"

Nestor et Amaury étaient allongés sur le sol de la chambre de l'ébène, admirant le ciel sans aucunes étoiles. Ce n'était pas la première fois qu'ils faisaient ça, ayant appris à se supporter durant les semaines qui s'étaient écoulées.

"— Ouais, je devrais sûrement. En fait, t'es là pourquoi ?

— Je suis ici pour assurer ta sécurité en tant qu'ange gardien assigné.

— Chaud. C'est pas ouf comme job.

— Surtout avec toi, répondit Nestor, le plus naturellement du monde."

Un ange passa — selon l'expression évidemment, Nestor n'avait pas vu ses collègues depuis des mois — avant qu'Amaury ne reprenne la parole.

"— Merci.

— Hm ? Répète, j'ai pas entendu, répondit Nestor, l'amusement dégoulinant de sa voix.

— Je te déteste. Eh ! S'exclama l'ébène, quand il se prit l'aile de son interlocuteur.

— Pardon, c'était tentant. Pourquoi tu me remercies ?

— De m'avoir arrêté, à Noël.

— Tu parles encore de ça ? Je n'ai fait que mon métier, c'est surtout toi qu'il faut remercier, rien ne t'obligeais à vraiment arrêter.

— Tu m'as littéralement brûlé l'épaule !

— Si tu fais attention aux détails aussi..."

Les deux hommes se regardèrent, avant d'éclater de rire. Rire ensemble, ils le faisaient plus souvent et naturellement maintenant. Comme si c'était parfaitement normal de — enfin, vous savez — parler avec l'Au-delà en le voyant et en le touchant.

"— T'aimais bien ton père ? Demanda soudainement Amaury, comblant le silence reposant qui les entouraient.

— Je suis un ange, je n'ai pas de parents.

— Genre t'es apparu et pouf t'étais un ange ?

— C'est à peu près ça, ouais.

— Comme dans Baby Boss !

— Amaury, on est dans la vraie vie là, pas dans un dessin animé pour gamin. En plus, je suis une créature du paradis, pas un bébé businessman.

— J'ai décidé d'abandonner l'idée qui dit que je suis encore dans la vraie vie à partir du moment où un dégénéré s'est assis sur mon lit d'hôpital en disant « Salut je suis ton ange gardien »."

L'humain se fit une nouvelle fois frapper par l'aile de Nestor, en pouffant.

"— Pourquoi tu m'as parlé de mon père ? S'interrogea le bouclé, intrigué par le comportement d'Amaury.

— Parce que... le mien n'a jamais été vraiment présent pour moi. J'veux dire... ouais. Genre, il aime ma mère et tout, pas de problème, c'est d'ailleurs pour ça que je me plains pas. Mais des fois, j'ai juste l'impression... je sais pas... d'être une erreur de parcours ? En mode, il s'est dit « pourquoi pas », mais il a changé d'avis à l'accouchement. Tu vois ?"

Nestor mit un peu de temps à répondre, et l'ébène crue presque qu'il s'était endormi, mais il l'entendit déglutir avant d'exprimer sa réponse, d'une voix un peu tremblante.

"— Ouais... Ouais, je vois. Tu te sens inutile et tu sais pas comment gérer ça, et t'essaie de le rendre fier tout en sachant que tu n'y arriveras jamais.

Il l'a maudit 5 foisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant