14 ¦ Amaury n'aime pas le riz

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Amaury ne s'énervait pas souvent. Enfin, c'est ce qu'il aimait dire. Marcher dans de l'eau avec des chaussettes, ça, ça l'énervait. Comme se coincer la manche dans une poignet de porte, dire bonjour quand on lui répondait bonsoir, ne pas arriver à déballer son Malabar...

Mais, ce qui l'énervait par-dessus tout, c'était quand il se faisait réveiller par une notification à trois heures du matin.

Sauf quand cette fameuse notification venait de son meilleur ami qui l'ignorait depuis presque un mois, et que son seul message était :

"Frère, j'ai merdé de ouf. Aide moi, je t'en supplie, j'suis au parc."

Alors, Amaury ne s'inquiétait que très peu, habituellement. Ce qui l'inquiétait, généralement, c'était surtout quand il apprenait que l'épisode de sa série préférée ne sortait que la semaine prochaine ou pire encore, quand il apprenait qu'il y avait du riz à la cantine, alors que, de toute évidence, Amaury n'aime pas le riz.

Mais bon, ce texto de son meilleur ami venait de lui faire réorganiser ses priorités et sa tier list d'inquiétudes. Il n'avait pas mis plus de dix minutes à arriver au parc, lui qui en mettait habituellement vingt.

Elliot se trouvait là, sur un banc usé par le temps, à regarder dans le vide. Amaury s'approcha lentement, comme on le ferait pour apprivoiser un animal sauvage - ce qui était un peu le cas, à vrai dire -, et s'installa sur le bout de bois qui supportait déjà le blond.

A peine l'ébène fut posé que la tête de son meilleur ami tomba lourdement sur son épaule, qui, en quelques secondes, était déjà trempée par les larmes de celui ayant appelé à l'aide.

Puis, il essaya de parler. Des gargouillements incompréhensibles sortir de sa bouche, noyés dans la bave et les larmes, entrecoupés par les reniflements incessants disgracieux et les fois où il se collait un peu plus à l'épaule d'Amaury, ce qui étouffait ces semblants de mots.

"— J'te jure Amaury, même à ta naissance tu parlais plus clairement.

— Nestor, la ferme, murmura ledit Amaury entre ses dents pour ne pas se faire entendre par la masse qui lui détruisait l'articulation."

Car oui, évidemment, Nestor avait dû suivre son humain, bien qu'il aurait voulu dormir un peu plus. Vous l'avez deviné, ce n'était pas de bon cœur que l'ange était là, assis sur le dossier du banc, ses jambes traversant le corps d'Elliot sans la moindre gêne, alors qu'il maudissait la loi divine disant « Là où humain est, ange doit être aussi ».

"— Elliot j't'en supplie parle clairement, je peux pas t'aider là...

— Demande lui d'arrêter de se moucher sur ton sweat aussi, c'est moi qui lave ton linge après.

— J'vou-vou-lais paaaaas, j'te jureeeee, gémit le blond désespérément.

— Merci Seigneur de m'avoir retiré les larmes, quand je vois ce que ça donne..."

Douze minutes. Cela faisait douze minutes que ça n'avait pas changé. Amaury pensait devenir fou, quand tout à coup, le visage de poupon de son meilleur ami se releva, révélant un faciès ruiné par les larmes.

"— Putain ça fait du bien. Merci frérot.

— C'est tout ce que tu vas me dire, après avoir utilisé mon pull comme souffre-douleur ?

— Ah non, j'suis désolé de t'avoir fait la gueule aussi, je sais même plus pourquoi on est fâché, mais je t'aime très fort alors je veux bien du jeu vidéo et des excuses en fait... termina le blond dans un souffle, en jouant avec ses doigts.

— Câlin de réconciliation ?

— Câlin de réconciliation, approuva Elliot en joignant le geste à la parole.

Il l'a maudit 5 foisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant