Chapitre 11 : Un grain de sable dans la machine

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Albane :

Je sors de mon rendez-vous avec Eugène, stupéfaite. Aimée a eu raison de me conseiller d'accepter, son danseur pas si gay s'est montré charmant, très charmant même, au point que c'en est louche, très louche même :

Il a le sens de la réplique, et je n'ai rien à prouver dans ce domaine.

Je le désire, et la réciproque semble vraie. Il est fait pour moi, et je crois être faite pour lui.

Voilà pourquoi je m'inquiète. Aurait-il montré d'autres imperfections que ses hésitations et je l'aurais pris sur le champ. Toutefois, aucun accroc n'avait daigné montrer le bout de son nez. J'ai à lui reprocher qu'il n'y a rien à reprocher. Voilà une réflexion que je devrais noter quelque part.

La porte de ma chambre claque derrière moi. Je dois y réfléchir plus longuement, je suis encore sous le coup de l'émotion. Un deuxième rendez-vous va être nécessaire. En attendant, je me laisse tomber sur mon lit. À moi la nuit de repos !

***

Eugène :

J'avais traversé mon rendez-vous avec Albane comme un fantôme. Mon corps et ma voix, portés par des ailes nouvelles, avaient exécuté un ballet que je n'avais pu que contempler, n'osant interrompre cette parade qui réjouissait visiblement celle dont je m'étais épris, si c'était bien là ce que je ressentais. À vrai dire, je ne comprenais pas comment cela avait pu se produire, mais je souhaitais que ça ne s'arrête jamais. Cet élan vers l'autre, cette fascination béate, cette vie ressuscitée, c'était addictif.

En rentrant chez moi, j'étais tombé sur mes mères. Elles n'eurent qu'à me jeter un coup d'œil pour comprendre. Pendant qu'Émilie hurlait sa joie, renseignant ainsi tout l'immeuble sur la situation amoureuse de son fils, Jade me bombarda de ses questions :

-C'est qui ? Quel âge ? Quel genre ? Quelles études ? Comment tu l'as rencontré.e ?

-Ce n'était qu'un café Jade, pas de quoi s'affoler.

-Notre fils a bu un café avec quelqu'un ! hurlait Émilie.

-Chérie, s'il te plaît, laisse-le nous raconter.

-Pardon mon cœur, raconte-nous Eugèninou.

-Il n'y a rien à raconter mères !

-Si tu ne nous dis rien, on vient te chercher à l'université chaque soir jusqu'à fin janvier, me foudroya Jade du regard.

Terrorisé, je capitulai avant qu'elles ne réalisent leurs horribles menaces :

-Albane, une amie d'Aimée, de mon âge, licence de physique, on s'est "croisé" en allant au cours de danse, et...

-Fait-elle de la danse elle aussi ? m'interrompit Jade.

-Non, elle venait voir Aimée danser sur sa demande.

-Vous aviez un cours spécial aujourd'hui ?

-Non...

-Ton Albane a l'habitude de venir voir son amie danser ?

-Non plus, où veux-tu en venir ?

-Oui mon cœur, où veux-tu en venir ? me soutint Émilie.

Jade eut l'air de se plonger dans une intense réflexion, main au menton, mais elle n'alla pas jusqu'au bout :

-Rien, rien, une idée comme ça. Continue.

-...et je l'ai invitée prendre un café. Elle a refusé au début mais à la fin du cours elle est revenue sur sa décision.

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