Riley
« Look, if you had one shot, one opportunity to seize everything you ever wanted, in one moment. Would you capture it or just let it slip ? » [1]
Lose yourself - Eminen
La secrétaire finit par toquer à la porte, l'ouvrant avant même qu'on ne lui accorde l'accès. Je suis du regard le mouvement de cette dernière, les yeux braqués sur la plaque où est inscrit le terme directeur.
— Riley Sutton est arrivé, monsieur, annonce la petite rousse sur ma gauche.
Arrivé ? Je poireaute dans le couloir depuis quinze minutes.
Monsieur Palson – ou c'est Polson ? – se retourne, un vaporisateur dans une main et relâche la plante qu'il tenait dans l'autre. Je pourrais en rire, tellement ça ressemble au cliché d'une série télévisée, sans déconner, c'est quoi ce type ? Il n'a que ça à foutre un mercredi matin, alors que j'attendais comme un tocard qu'il se décide à me recevoir ? Il se redresse en souriant, remuant sa moustache grisonnante dans un tic.
Sur son estrade, lundi, il paraissait plus grand. Je dois le dépasser d'une tête, maintenant qu'il se tient debout et j'avance vers son bureau. La pièce est à l'image du reste de l'établissement : outrancier. Si je doutais encore que l'argent coulait à flot ici, ce n'est plus le cas. Ça pue l'aisance financière, comme tout Evergreen. Nous sommes loin de ce que j'ai eu l'habitude de côtoyer dans les autres lycées que j'ai fréquentés.
Honnêtement, je ne m'attendais pas à ce que ma mère mette à exécution ses menaces. Ça n'aurait pas été les seules qu'elle aurait abandonnées. Disons qu'avec le métier qu'elle exerce et le temps qu'elle passe au bureau, elle a d'autres priorités que de me couver. D'habitude, j'ai droit à quelques remontrances, une ou deux fois j'ai même été privé de sortie, mais dès l'instant où elle était obligée de s'éclipser pour le travail, les contraintes disparaissaient. Je suis lucide sur mon éducation : c'était le paradis. J'ai toujours été scolarisé dans des établissements publics, malgré ses changements progressifs de salaires, et ça m'allait très bien. J'ai tendance à exécrer les gosses de riches.
Et me voilà dans l'une des écoles les plus réputées du pays. Entouré de gosses de riches.
Pour certains, ça ne serait pas perçu comme une punition. Pour moi, il n'y a pas pire sanction. L'idée même d'être obligé de rester enfermé entre ces murs, cinq jours sur sept ; devoir répondre aux ordres des professeurs, être discipliné, attentif, me plier à toutes les exigences du corps enseignants... Ça me fout la haine.
J'observe avec dégoût les murs de la pièce, couverts de peintures d'artistes qui me sont inconnus. Un canapé fait l'angle, une table en verre dont les inscriptions gravées scintillent est placée juste devant. À tous les coups, c'est de l'or ! Le bureau en bois massif prend presque tout l'espace et un ordinateur dernière génération d'une célèbre marque américaine est posé dessus.
Ouais, c'est ce je disais, ou-tran-cier. Je n'ai vraiment rien à foutre là.
— Riley, comment vas-tu ?
Je reste un instant silencieux, l'oeil circonspect face à la familiarité que le directeur tente d'instaurer, puis marmonne les lèvres toujours pincées :
— Bien, merci.
— Assieds-toi Riley, prend tes aises ! J'ai envie que tu te sentes ici chez toi.
Je lorgne les deux fauteuils qui me font face puis la plaque nominative près d'un cadre photo. Polson y est écrit en lettres noires.
Au moins, je suis fixé.
VOUS LISEZ
BLACK BLOSSOM (édité aux Editions Addictives)
RomanceColocs, partenaires de musique... et bien plus encore. Harper Tate est en dernière année à l'institut Evergreen et n'a qu'un seul rêve : que son groupe de musique, les Black Blossom, perce enfin ! C'est avec cet espoir fou que les musiciens s'inscr...