// ... Chapitre dix-neuf ... //

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"Time - Jungle"


J'ai descendu doucement les marches de la tour pour arriver en bas sans m'en rendre vraiment compte. La mort s'étalait à mes pieds, mais nous avions gagné cette guerre. Oui, nous avions vaincu le mal aujourd'hui. Pourtant, rien n'arrête mes larmes, qui coulent contre mon gré. J'ai marché en évitant les cadavres dans un silence de mort.

« Maliha, si toutes les vies encore debout sont là, c'est aussi grâce à vous. La vengeance de Thorin, le destin de cette lignée n'est en aucun cas votre fait. Votre tâche est de sauver le plus grand nombre de vies possible et non de les choisir... »

Les mots du magicien revenaient en boucle dans ma tête, essayant de me faire une raison, mais en voyant le carnage, y avait-il encore assez de vie sauve ? Je ne vois que la mort, sous toutes ses formes. Les corps en charpies, les flaques de sang, les visages défigurés, les membres arrachés, tout s'étale à perte de vue sous mes yeux brouillés par les larmes.

La perte de mes amis me fend le cœur, le souvenir de Tauriel tenant Kili dans ses bras, Fili tombant dans la neige sans vie, Thorin en sang aux côtés de Bilbon. Les images tournent dans ma tête et aspirent les dernières gouttes de lumière.

Je sens une présence derrière moi, mais ne me retourne pas. Je n'ai vraiment pas envie de faire face, pas la force de sortir un mot. Pour dire quoi au juste ; ma seule envie est celle d'être seule dans mon désespoir. La personne s'arrête à mes côtés sans rien dire. Je continue de perdre mon regard sur les cadavres, les elfes, les nains, les orcs... Aurais-je encore la force de voir ça ?

Dans mon monde la mort est invisible, ce n'est qu'une idée. Une idée lointaine que je n'avais vu que dans les films ou aux infos. Maintenant la réalité est là, devant moi.

Au cours de mon ancienne vie, mon devoir était de concevoir des armes toujours plus efficaces, toujours plus mortelles... Je me rends compte aujourd'hui ce que ça fait d'en avoir une entre les mains et ce que cela peut engendrer. Un véritable carnage. Je m'en veux tellement à cet instant. D'avoir été un maillon dans la chaîne de la mort. Je m'étais toujours dit que c'était pour protéger mon pays, protéger les miens. La réalité est tout autre et elle me glace le sang comme jamais.

Mes yeux ne coulent plus et j'ose alors tourner la tête vers la personne qui reste silencieuse. Je croise alors les yeux bleus de Legolas. Je le scrute de haut en bas, il est dans un état aussi pitoyable que moi, des gouttes de sang noir un peu partout et le visage recouvert de poussières. Son regard ne laisse rien transparaître, toujours froid et nous regardons, ne sachant que dire. Je baisse alors les yeux sur les morts à mes pieds, incapable de tenir face à ce regard trop dur. Comme s'il lisait mes fautes. Celles d'avoir été une ignorante.

- Je ... je commence, mais ma gorge s'étrangle.

Je sens les larmes et la tristesse m'envahir encore, mais aussi celle de la culpabilité. Pourquoi je n'ai pas pu en sauver plus ? J'aurais pu être plus forte, être plus féroce encore. J'ai perdu mon visage dans mes mains pour cacher mes larmes de l'elfe qui doit me dévisager avec mépris. Mon cœur ne sait plus où il en est. La tristesse de la guerre, la perte de mes amis, mon attachement grandissant pour cet elfe, que je ne comprends même pas. Ce mélange est tellement contradictoire et horrible que j'en perds pied.

Je le regarde encore, il est tellement beau ce bleu, malgré la froideur de son expression, on se sent entouré par une chaleur de bien-être. On oublie tout dans cet abîme aux couleurs océan. Son mal-être, ses erreurs, son anxiété et sa tristesse.

La douleur de sa lame me revient. Pourquoi est-il là ? Pourquoi me regarde-t-il comme ça ? N'en a-t-il pas assez vu ? Non, il faut en plus qu'il me rappelle combien de morts je n'ai pas pu sauver. La mort de Thorin, Fili et Kili, comme son père ? Me faire regretter ce que je suis devenue...

TITANOù les histoires vivent. Découvrez maintenant