La mort à fleur de peau - MewGulf

Le conflit

Deux ans Auparavant

Je ne peux quitter des yeux l'image de l'homme sur l'écran en face de moi. Je dois enregistrer chaque détail pour le reconnaître dans toutes les circonstances. Son front dégarni, ses petits yeux perçants, son allure débonnaire. Je connais par cœur son travail, ses collègues, ses proches. J'ai retenu ses goûts, ses passe-temps, ses déviances. Tout ce que je peux utiliser pour l'approcher et le manipuler, jusqu'à atteindre mon but : obtenir des preuves.

Mes précédentes missions ont été peu fructueuses. Les différents laboratoires que j'ai infiltrés ne m'ont pas apporté de nouvelles informations. Mais, je suis plus motivé que jamais. Le vaccin anti-Covid a été mis sur le marché. Des centres de vaccination se sont ouverts à chaque coin de rue. Les gens affolés par la propagande des médias et la peur de contracter le virus, se sont rués sur ses traitements miracles.

Sauf que... à peine les premiers vaccins administrés, un variant du virus est apparu, Le Covid 21. Plus contagieux que le virus mère. Le nombre de contaminés augmente proportionnellement au nombre de victimes. Les laboratoires pharmaceutiques ont d'hors et déjà annoncé qu'un nouveau vaccin est en cours d'élaboration.

Un sourire cynique se dessine sur mes lèvres. Je n'ai aucune preuve que ce variant a été créé, comme son prédécesseur. Tout ce que je sais, c'est que c'est une manne d'argent inépuisable. La vibration de mon téléphone, dans ma poche arrière, me tire de mes sombres pensées. Je l'attrape et regarde, agacé, l'écran de mon smartphone.

Numéro masqué... Encore. Je fronce les sourcils. Je décide de décrocher, même si je sais que, comme à chaque fois, cela ne servira à rien.

— Allô ?

Un silence me répond.

— Qui êtes-vous ?

Toujours rien. Je raccroche et prends la décision de détruire l'appareil et de changer de numéro dès que je sors de l'immeuble. Je suis un agent double, je ne peux prendre aucun risque. Pourtant ce numéro était sécurisé... Je replace mon téléphone dans ma poche et me reconcentre sur ma future cible.

— Tu n'en as pas marre de toujours te taper les mecs dégénérés ?

Je souris, malgré moi, de cette question sans retenue. Puifai ne fait jamais dans la dentelle. Encore une chose qu'on ne devinerait jamais au premier regard.

— Les homosexuels ne sont pas des dégénérés...

— Bien sûr que non, mais lui... assure-t-elle en désignant du doigt l'homme sur l'écran, Il me fait froid dans le dos.

Elle frissonne de tout son corps d'une façon théâtrale. Mon sourire s'agrandit. Imaginer qu'elle puisse avoir peur d'un type qu'elle pourrait neutraliser en deux secondes, me fait franchement rire.

— C'est un homme comme les autres répondis-je, laconique.

— Justement, pourquoi c'est toujours toi qu'on envoie sur ce genre de mission ?

Je hausse les épaules.

— Je ne sais pas et je m'en fous. Le boulot, c'est le boulot.

— Tu n'es même pas gay...

Elle m'observe intensément. J'aime les femmes, c'est vrai. J'étais en couple, avant que mes parents ne disparaissent et que je ne m'enrôle dans ce groupuscule. Mais à l'heure actuelle, ma sexualité est la dernière chose qui m'inquiète. Je ne suis rien... ni hétéro, ni gay, ni bisexuel. Rien qu'un tas de rage et de haine.

— Ça ne me dérange pas...

C'est tout ce que je trouve à répondre. Elle penche la tête sur le côté et continue à me reluquer.