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J'ai senti mon âme se fissurer sous tes mots.
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__ « T'es à 2,67 secondes du meilleur temps. » M'informe Evander à la radio.

__ « Reçu. » Dis-je en accélérant sur la ligne droite avant le premier virage du circuit.

Ce circuit, je le connaissais par cœur, même les yeux fermés je le conduirais. Je l'ai parcouru, encore et encore, jusqu'à épuisement, pendant des heures et des heures. Dans le seul but de faire toujours le meilleur temps, les meilleurs secteurs, et prouver un jour au monde automobile ce que j'étais capable de faire.

Dans une course, nous devons trouver notre rythme, perfectionner à chaque passage, chaque virage, notre direction, jusqu'à ce qu'elle paraisse parfaite, et d'essayer de toujours plus la perfectionner.

Faire qu'un avec sa voiture, la sentir, la comprendre et l'écouter. En retour, elle fera le job.

Il faut un sang froid hors norme, des réflexes inhumains et un sens de l'observation à toute épreuve.

Ne rien avoir à perdre.

Jouer à en prendre le risque.

Le jeu en vaut la chandelle.

Courir ou mourir.

Une rapidité des gestes, une fluidité et une légèreté.

Connaître son véhicule. Se connaître.

Il n'est pas indispensable de connaître le circuit par cœur, il suffit d'être rigoureux, attentif et précis.

Ceux qui la joue agressif ne sont que des inconscients conduisant à l'instinct. L'instinct n'est pas et ne sera jamais égal à la régularité dont doit faire preuve un pilote.

Mais là, je n'étais pas dans une course, ma régularité je la connaissais et devais la repousser dans ses retranchements. La précision était indispensable mais là, je pouvais la jouer aggressive et pousser la voiture dans les échelons d'une rapidité et d'une puissance où elle n'était encore jamais allée.

Et cette adrénaline, elle me faisait vivre.

Cette vitesse que je contrôlais, cette puissance que je guidais.

Cette sensation de vie qui me submergeait.

Ce goût du risque de ne pas suivre la direction, de ne pas assez freiner dans un virage, de glisser.

Ce bolide qui nous guidait droit vers une mort certaine si il n'était pas conduit à la perfection.

J'avais l'impression d'être vivante.

__ « T'es au meilleur temps secteur 1. » Reçus-je dans la radio.

Je reste surprise qu'Evander soit aussi impliqué dans sa mission et je le soupçonnais discrètement d'admirer clairement l'automobile et son monde.

Le paysage défilait à grande vitesse devant mes pupilles cachées par la visière du casque sur ma tête, je descendais les rapports avec fluidité, tournais rapidement mon volant, et accélérais de nouveau, passant les rapports.

Ce que les morts laissent aux vivantsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant