Chanson dans le texte : "Into my body" by Upsahl (média tout en haut)
⚠️Warnings : Dépression, suicide.
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"I don't recognize the girl that I see on the screen looking mean. I don't wanna call my friends. So I'm home being lonely instead"
Détachée.
Ji Eun n'arrivait pas à trouver de meilleurs termes pour exprimer ce qu'elle ressentait depuis des mois.
Et si être déconnectée du monde et des autres en général était une chose compliquée, rien ne pouvait préparer à ressentir une telle distance entre-soi et les gens qu'on aime.
- Je ne savais pas comment vous le dire... Souffla-t-elle.
Les cheveux tirés vers l'arrière, les sourcils broussailleux et le teint terne, elle malmenait ses lèvres gercées entre quelques aveux, avant de reprendre.
C'était comme ça depuis le début d'après-midi. Depuis qu'après plus d'une dizaine de visites quotidiennes de ses deux meilleurs amis, à discuter de choses légères, une fois les larmes et la colère de l'inquiétude taries, elle avait décidé d'enfin leur parler.
Patients, ils avaient attendu longtemps, la regardant sombrer, impuissants, ne pouvant qu'assister à son naufrage pour ne pas qu'en voulant fuir leur inquiétude, elle saute d'elle-même.
Au final, c'est ce qu'elle avait presque failli faire.
Sauter.
Se jeter dans le vide dans l'espoir de saisir une étoile au passage. Un fragment d'espoir. Une lueur de vie.
Ji Eun n'avait pas l'impression d'avoir voulu mourir. Ni même d'y avoir songé à l'instant où, ses yeux fixés vers le ciel, attirés par un ailleurs trop rassurant, trop beau, pour être vrai, elle s'était accrochée à la rambarde glacée.
Même maintenant, dans cet institut où on la protégeait d'elle-même, elle ne se sentait pas suicidaire. Le mot seul lui paraissait étrange, distant.
Sans aucun rapport avec elle.
- Je crois que c'est là depuis bien plus longtemps. Reprit-elle. Avant Ô. Avant...
Marquant une très brève pause, griffonnant sur le calepin ouvert sur ses genoux, débordant des paroles d'une nouvelle chanson, elle finit :
- Avant sa mort.
Son col roulé gris, loin de son style habituel, ajoutait à son air austère, ce qui accentua le malaise que produisit le petit rire sans joie, presque forcé, qui franchit ses lèvres.
- Dans les films, c'est souvent la mort de la mère, l'élément déclencheur, pour les tueurs en série, n'est-ce pas ? C'est peut-être pareil dans mon cas !
