Rencontre nocturne

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Au fil de la semaine je reprends peu à peu des forces : je ne grimace plus de douleur dès que je bouge, et je ne me suis jamais autant reposé.

Chaque soir, Hannah (j'essaie de m'habituer à l'appeler par son prénom) me passe les cours et m'explique tout ce que je ne comprends pas. Si au début j'étais assez réticent, son insistance et la clarté de ses explications m'ont vite convaincu. Grâce à elle, je parviens à rattraper mon retard petit à petit.

Pendant la journée, Romain reste avec moi. Nous discutons, jouons, lisons... Mais je ne sais toujours pas pourquoi il est venu jusqu'ici. J'ai perçu des éclats de voix un soir, mais je n'ai pas osé demander ce qu'il s'est passé. Il n'accepte de parler que de sa petite-amie ou bien de ses amis, du lycée, mais jamais de sa famille.

Je n'ai pas non plus questionné Hannah ou Adam sur leurs parents, ou plus précisément sur leur absence, pas plus que je n'ai posé de questions sur la fillette représentée sur un grand tableau à l'étage. Et j'ai encore moins songé à demandé à Héloïse, la femme d'Adam, d'où elle tient la cicatrice que j'ai aperçue sur sa tempe gauche, qu'elle cache avec ses cheveux la plupart du temps.

Parlant d'Héloïse, je n'ai jamais mangé de plats aussi bons ! Elle a une manière de cuisiner qui rend divin le plus atroce des légumes, comme si elle était magicienne. Je déguste sa cuisine sous l'œil amusé d'Hannah et d'Adam, accompagné de Romain qui ne cesse de la couvrir de louanges.

Mes journées se résument donc à passer du temps avec Romain, suivre des cours avec Hannah et manger avec tout le monde, comme une vraie famille. Ah, et à appeler Chef pour lui dire de vive voix que je vais bien. Quand il ne m'a pas vu arriver pour travailler le soir du combat sans que je ne l'ai prévenu, il a tellement paniqué que je me suis juré de ne plus jamais lui faire subir ça.

J'inspire profondément. L'air de la nuit est toujours aussi serein, doux et sucré. Mère Lune me sourit cette nuit encore, accompagnée de ses nombreux sujets étoilés. Je ferme les yeux et effectue lentement des mouvements dans l'obscurité. Chaque nuit, je me lève en douce et m'assure de ne rien perdre, que ce soit en matière de réflexes ou de muscles.

Un bruit derrière moi. Je me retourne vivement et retient mon poing de justesse. Hannah s'avance tranquillement, ses longs cheveux châtains flottants autour d'elle lui donnant une aura mystique. Cette fille est un véritable mystère. Je ne sais toujours rien d'elle, alors que j'ai l'impression d'être totalement transparent.

Chose pourtant étrange, Hannah ne me sourit pas. Je me suis habitué à ses sourires parfaits, ses sourires tranquilles et ses sourires inquiets. Mais jamais je ne l'avais vu sans aucun d'entre eux.

- Qu'est-ce qu'il se passe ? je lui demande d'une voix douce.

Elle sursaute brutalement et semble découvrir ma présence. A moins d'un mètre d'elle. Debout. A une heure du matin.

- Mais qu'est-ce que tu fais là ?! s'exclame-t-elle en écarquillant les yeux. Tu es censé dormir à cette heure !

Je lève un sourcil.

- Et pas toi ?

Ma remarque fait mouche. Elle reste figée.

- Je sais très bien que vous m'avez tous dit de me reposer, je soupire me passant la main dans les cheveux. Mais je ne veux pas perdre tout ce que j'ai si durement acquis juste à cause de quelques bleus. Par contre, je reprends en abordant cette fois un air sérieux, toi tu n'as rien à faire debout au beau milieu de la nuit. Tu as cours demain.

Habituellement je ne me serais jamais permis de faire la morale à qui que ce soit, mais le visage vide d'Hannah me préoccupe. Qu'est-ce qu'il a bien pu se passer ? Elle qui s'applique toujours à sauver les apparences me laisse découvrir, simplement par son absence d'expression, l'étendue de sa détresse.

Hannah, Tome 2 ~ Nos blessures invisiblesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant