Hannah, Tome 2 ~ Nos blessures invisibles

Amitié nouvelle

( Hannah )

Je cours. Je cours comme j'ai rarement couru. Je cours non pas pour ma vie, mais pour une autre. Je cours parce que je me suis reconnue dans ses yeux tremblants. Je cours parce que je connais la bêtise humaine. Je cours parce que j'ai déjà été dans cette situation. Je cours pour la sauver.

Peu m'importe les cours.
Peu m'importe mon image qui vole en éclats.
Peu m'importe les on-dits et les rumeurs.
Peu m'importe les mauvaises notes.
Peu m'importe l'inquiétude d'Adam.
Peu m'importe l'abandon de Liam.
Peu m'importe la trahison d'Émile.
Peu m'importe tout.

Je cours et me fiche du monde, tout simplement parce que quelqu'un a besoin de moi. Cruellement besoin de moi. Ou du moins de quelqu'un à l'écoute.

Je m'arrête subitement. C'est là, je suis sûre que c'est là. Ça ne peut qu'être là. Parce que ce lieu est celui qui recueille les âmes brisées, parce que ce lieu ne juge pas, parce que personne ne pense à venir chercher ici.

J'entends des sanglots. Ils me brisent le cœur mais m''indiquent aussi où aller précisément. D'un pas silencieux, je rentre dans les toilettes des filles et m'arrête devant un box. Le seul occupé, celui d'où viennent les pleurs. Celui où Maya s'est cachée.

Je toque presque timidement, me sentant comme une intruse de la déranger. Mais je sais que, au-delà de tout, c'est au moment où on ne veut pas qu'on nous trouve qu'on a le plus besoin d'être trouvé. C'est un moment de bascule où tout devient possible. Si on est fort, on s'en sort tout seul. Si on est faible et que personne ne vient, on peut commettre l'irréparable. Comme je l'ai fait.

- C'est Hannah, je lui annonce doucement.

Il ne faut pas la brusquer. Il faut lui laisser le temps de décider si elle veut me voir, ou bien si le simple fait que je sois venue suffit. Je lui laisserai l'éternité entière s'il le fallait.

- Il avait dit que tu viendrais.

Je me fige. Ce « il » c'est Liam, à n'en pas douter. Mais comment fait-il pour me connaître si bien alors que j'ai l'impression qu'il est un mur insondable ? Je ne comprends vraiment pas comment il fait. Suis-je donc si transparente ?

- Et il avait dit qu'il serait toujours là pour moi.

Tiens, ça c'est nouveau. Il faut croire qu'il n'y a pas des sentiments que du côté de Maya... Quoiqu'il m'avait dit ça aussi. Avant de m'abandonner.

- Je ne sais pas où il est Maya, mais je pense qu'il n'y reste pas de son plein gré.

Du moins c'est l'espoir que j'ai. Parce que s'il s'est enfui sans se retourner après tout ce que je lui ai dit, alors ce n'est vraiment qu'un... qu'un connard fini.

- Ce dont je suis sûre, c'est qu'il serait fier de toi.

Du moins je l'espère. Elle a fait preuve d'énormément de courage aujourd'hui, on aurait dit une autre personne. En y réfléchissant bien, c'était peut-être le cas. Plus un masque, elle s'est montrée telle qu'elle est réellement. Une personne différente de celle dont elle jouait le rôle en tout cas.

- Je t'ai dit qu'il m'avait comparée à un panda ?

Je laisse échapper un petit rire. Non, je ne savais pas. Mais je me demande bien en quelle occasion il a fait ça...

- Si tu es un panda, lui est un chat, je laisse échapper sans réfléchir.

- Comment tu sais ?!

Je fronce les sourcils. Comment je sais quoi ? C'est lui qui s'est comparé à un chat, je n'ai fait que reprendre ses mots. Mais on dirait qu'il y a une signification particulière derrière tout ça...