Réconfort

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Surpris, nous dévisageons la femme qui se tient à l'entrée de la cuisine. Grande, brune et aux alentours de la vingtaine, elle me semble assez sympathique. Mais qui est-elle ?

- Oh, salut Héloïse ! la salue Romain comme si de rien n'était. Qu'est-ce que tu fais là ?

- Et bien, il se trouve que c'est ma maison, rétorque celle-ci avec un sourire en coin. Espèce d'imbécile.

Je pouffe silencieusement. Décidément, tout le monde l'appelle de la même manière...

- La question est plutôt : qu'est-ce que deux jeunes hommes de votre âge, fracassés de partout, font dans ma cuisine alors qu'il fait nuit et qu'il y a cours demain ?

Nous détournons tous les deux les yeux. Personnellement, je ne veux pas dénoncer Miss Parfaite alors qu'elle nous a aidé...

- Oh Hélo je suis désolée ! s'excuse ladite coupable en entrant sans gêne dans la pièce. C'est moi qui t'ai réveillée ?

- Ma chérie, tu as fait un tel boucan que je ne comprends pas comment Ad parvient encore à dormir...

- On est une famille de marmottes je te rappelle.

- Quand bien même ! Tu aurais réveillé un mort avec un bruit pareil !

L'autre pouffe sans paraître désolée le moins du monde.

- D'accord d'accord. Mais tu comprends bien que je ne pouvais pas les laisser dehors quand même !

- J'en conviens. Mais tu aurais pu nous demander !

- Vous dormiez.

- Il n'empêche. Bref, tu as préparé la chambre d'amis je suppose ?

- Oui, tout est prêt ! Il y a juste un petit problème...

- Vas-y, je t'écoute, soupire l'adulte.

- Je préférerais qu'ils ne marchent pas.

La femme hausse les sourcils.

- Et bien on va les porter, voilà tout. On s'y met ?

Miss Parfaite lui adresse un grand sourire, puis elles se dirigent toutes les deux vers moi. Avant que je puisse comprendre ce qu'il se passe, je me retrouve dans les airs, soulevé sans effort.

- Bon dieu, mais tu es au régime ou quoi ?! s'exclame la dénommée Héloïse.

- Au moins, il est plus facile à porter comme ça !

Les deux échangent un sourire complice, puis me déplacent prudemment à travers la maison. Je passe ainsi devant la porte d'une chambre, monte les escaliers et suis déposé en douceur sur un lit deux places. Je redécouvre alors le confort d'un vrai lit. Je suis tellement à l'aise que je sens mes paupières s'alourdir de plus en plus et, avant même qu'elles n'aient rabattu la couette sur moi, je m'endors profondément.

§§§§§

Je cligne lentement des paupières. Je suis allongé dans le noir, bien au chaud. Le lit est si confortable, la couette si douillette que je n'ai pas envie d'en sortir. Je me sens bien, en sécurité. Comme si j'étais de retour à l'époque où je me faisais border par ma mère, l'époque où mon père me racontait des histoire pour m'endormir...

Je me recroqueville sur moi-même. Pourquoi je pense à ça maintenant ? Je sais très bien que ça me fait mal de me souvenir de ces moments de douceur. Alors pourquoi je me les remémore ?

Je serre les dents. Les enfouir. Il faut que je les enfouisse le plus profondément possible pour les oublier. Il faut que je pose une nappe d'indifférence sur eux. Il faut...

Hannah, Tome 2 ~ Nos blessures invisiblesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant