Acceptation

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Sursaut. Sueur. Respiration rapide. Il tourne rapidement sa tête vers le réveil. 3h47.
Il referme les yeux, essayant de se calmer. Il n'y arrive pas. Il se lève, et va chercher un verre d'eau. Se rafraîchir. Oublier ce cauchemar. Ne penser qu'à l'eau qui coule dans sa gorge.

Grande respiration. Reprendre le contrôle de lui.

Il passe sa main devant son visage. Ses cernes sont de plus en plus voyantes, témoignant ses nuits agitées. Il essayait, pourtant. Mais ces images lui revenaient sans cesse en tête. Ces images d'une belle jeune fille qu'il a aimé. Ces images d'instants de bonheur, qu'il a réussi à voler. Ces images de son paradis, désormais envolé. Parti. Loin. Et qui ne reviendra jamais.

Coeur qui s'affole. Yeux qui picotent. Se reprendre, vite ! Ne pas craquer. Grande respiration. Prendre sur soi.

Face à son miroir, Ikki sourit. Nerveusement. Un simple souvenir pouvait le mettre dans cet état là, et il se disait Chevalier d'Athéna ? Il osait combattre avec son armure, alors qu'il n'est pas capable de faire une croix sur ses sentiments ? Et il continue à avoir de l'ego ? A avoir de la fierté ? En vérité, il ne devrait même pas être encore là...

Claque mental. Se reprendre. Il ne devait pas penser ça. Il ne doit pas. Il est Ikki, le Chevalier du Phénix. Le premier a porter cette armure de feu. Il a réussi à vaincre Shaka de la Vierge. Il a tenu tête à Saga, puis à Kanon. Il a réussi à tenir face aux Trois Juges des Enfers, et éliminer l'un d'entre eux. Et il avait combattu Hadès.

Il est digne d'être celui qu'il est. Il y a eu des hauts, des bas, mais il est digne d'être Chevalier.

Oui mais... Cela lui fait quand même mal.
Mal de voir que cette guerre est enfin finie. Mal de voir que tous ont ressuscité. Mal de voir cette paix.

Car au final, à quoi rime désormais leurs existences ? À quoi ont-il servi ? À quoi serviront-ils maintenant ? La Paix a été signé. Ils ne se battent plus. Plus d'adversaires. Pourquoi avoir passé des millénaires à se battre contre diverses divinités, si pour qu'au final, un simple traité de paix soit signé ? Ont-ils vraiment été utile ? Les Dieux n'auraient-ils pas mieux fait de le rédiger plus tôt, évitant de gâcher la vie de milliers de personnes ? Car au final, cette paix laissait un goût amer dans sa bouche. Les Dieux les ont utilisé, les ont torturé, pour qu'au final tous veuillent la paix. Cette maudite paix. Qui ne cessait de lui rappeler cette solitude.

Car oui, tous ont ressuscité. Tous les combattants. Mais pas les victimes causées par les combats. Pas Elle. Et chaque jour, cette Paix était la pour lui rappeler à quel point les autres vivaient une vie superbe, désormais. Entourés d'amis, de famille pour certains, voir même d'amant. Tout le monde semblait trouver son bonheur là dedans. Sauf lui.

Loin de lui l'idée de préférer faire la guerre. Non, il ne préfère pas la violence à la tranquillité. Et puis comme ça, il peut s'assurer que Shun est en sécurité... Avec les autres. Pas avec lui.
Car sa colère et incompréhension grandissaient de plus en plus. Il n'arrivait pas à voir les autres sans leur en vouloir. Pourquoi ? Lui même ne savait pas. Peut être car il n'arrivait pas à comprendre comment ils avaient fait pour aller au delà de la guerre ? Il ne savait pas. Il ne savait plus rien. Et il ne saura sûrement jamais.

Il était perdu. Pourquoi était-il encore ici ? À quoi servira t-il désormais ? Son quotidien a toujours été fait de violence. De combats.

Sauf quand il était avec Elle. Quand Elle lui parlait. Lui souriait. S'il se réveillait chaque nuit, c'est car il La voyait en rêve. Belle. Magnifique. Rayonnante. Puis en cauchemar. Son attaque La touchant. Son dernier sourire. Son dernier souffle.
Il ne La reverrait plus. Il devait s'y faire. Il ne servira plus à rien. Il devra s'y faire aussi. Et accepter. Car il ne peut rien dire face aux Dieux. Et même s'il ose dire, au fond, qui comprendra ce qu'il ressent ? Tous sont heureux.
Tous.
Sauf lui.
Et c'est sur cette pensée, peu joyeuse mais peu lui importe, que le jeune homme sortit prendre l'air. Vers 4 heures et quelques du matin. Laissant le froid lui rafraîchir ses idées. Lui sécher ses larmes. Lui faire prendre conscience de ce qui l'entoure.

Lui montrer les perles d'eau couchées sur les feuilles vertes des plantes, qu'il pouvait enlever d'une simple caresse.
Lui montrer les feuilles orangées de l'automne tomber des arbres, sans qu'il ne puisse rien y faire.
Lui montrer tous ces petits êtres qui, les uns et les autres, bâtissent leur monde à une échelle si petite que personne ne le voit.

La vie est comme tout ceci. La vie est comme une fourmi. Insignifiante. Pourtant, chaque fourmi ajoute sa pierre à l'édifice. Chaque fourmi aide. Et même si elle vient à mourir, ce qu'elle aura fait restera, et une autre prendra la relève, afin d'achever son travail.
La vie est comme les feuilles d'automne d'un arbre. D'une couleur magnifique. Chaude. Réconfortante. Mais qui finissent, naturellement, par s'en aller, pour que d'autres prennent leur place l'année suivante, sans aucune intervention.
La vie est comme la rosée du matin. Belle. Étincelante. Pure. Qui donne une ambiance féerique à chaque lieu. Mais qui peut, d'une simple caresse, s'en aller. Qui peut, par une simple intervention, disparaître.

Les fourmis, les feuilles, l'eau... Tout ça représentait Sa vie. À Elle. Pure. Réconfortante. Considérée comme insignifiante, mais qui lui a permis de rester en vie. Par sa simple présence. Qui désormais, n'est plus.

Mais si Sa vie est telle que cela... Pourra-t-Elle un jour être remplacée sans soucis, telle une fourmis ? Pourra-t-Elle un jour revenir, poussant incessamment, telles les feuilles ? Pourra-t-Elle apparaître devant lui chaque matin, telle la rosée ?

Il rigola.

Il ne La reverra jamais. Il le sait très bien. Même mort, ils ne seront pas ensemble. L'Enfer n'accueille pas les anges comme Elle.

Il prit une feuille dans sa main, et regarda le ciel commençant à s'éclaircir. Se souvenant de deux enfants regardant ce même ciel, il y a des années de cela. De deux enfants, et d'une promesse. Celle d'un jour, découvrir ce monde. Au delà de cette terre de feu et de cet océan bleu.

Ikki sourit à nouveau.

Au fond, n'était-ce peut être pas mieux ainsi, se demandait-il ? Il devait accepter. Et essayer d'aller de l'avant. Malgré tout.
Le monde lui ouvrait ses bras. Le monde l'attendait. Il pouvait le découvrir.

Pourquoi attendait-il encore ici, à déprimer, alors qu'il avait le monde à sa portée ?

OS- MangaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant