J'ai crevé tes yeux bleus
Avec un épieu pointu
Trempé dans les eaux de l'étang noir.
J'ai taché le blanc de notre Hiver
Du sang rouge des mortels.
Et j'ai attendu, les yeux rivés au ciel,
Que s'abatte sur nous la colère de la neige.
J'ai crevé mes yeux noirs
Avec une lame ébréchée
Plongée dans les eaux bleues de la mer.
Et j'ai noyé mon regard aveugle
Dans les profondeurs de notre enfer,
Pour te voir.
Et toi, tu n'as pas cessé
De m'observer.
Et j'ai erré dans les limbes tout là-haut
Que ne frôle aucun flocon ;
Dans la chaleur des cieux,
J'ai hurlé au froid de s'en aller.
Et le froid s'en est allé.
L'été a posé sur nous ses prunelles rouges d'un feu fade.
L'œil de la lune est devenu gris et humide - rien qu'un regret, qu'une trace brumeuse, rien qu'un fantôme, ombre vaporeuse. Et malgré nous, et malgré toi,
Nous nous sommes soumis au soleil.
Nous sommes devenus les enfants du jour. Le soir, nous guettions les miettes de nuit, la caresse du vent, la senteur de l'air sombre sur le pas de la porte. Elle est venue ainsi,
La nostalgie.
Et tes yeux d'hiver ne l'ont pas vue,
Eux que j'avais si bien crevés.
Et mes yeux de nuit l'ont ignorée,
Eux qui ignoraient encore le regret.
Et pourtant,
Nous savions,
Je savais.
J'ai brûlé le bandeau blanc qui couvrait mes yeux blessés,
Je suis montée aux enfers et descendue aux cieux,
Je me suis agenouillée devant la lune. Les rayons du soleil enveloppaient mon corps
Comme une cape trop chaude.
Et face aux abîmes
Où flotte la brume,
J'ai imploré le froid
De revenir en moi.
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A la lune insomniaque - Textes échoués
PoëzieLes Hommes brûlent, la lune observe, et les mots oubliés s'échouent en fragments. (Ici on se défoule et on se relit pas trop)