Chapitre 3

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A peine arrivée, je me débarrasse d'un coup de pied de mes bottines pour enfiler mes chaussettes en laine, troquant au passage mon jean et ma blouse pour un jogging et un large t-shirt d'Asimov que je traîne depuis l'adolescence. D'un coup de baguette je lance la casserole dans la préparation de mon habituelle chocolat chaud. Après avoir récupéré mes copies dans ma besace je branche la télévision, m'enfonce dans le canapé entre deux oreillers duveteux. Puis je dégaine ma plume pour me mettre à corriger les premiers devoirs des sixième années. Mon mug enchanté de chez Cornelia et Horace rejoint sa coupole sur la table basse sagement. Sur l'écran Gandalf s'en retourne à la Comté. Je souligne les fautes d'orthographe avec lassitude, sentant que la soirée risque d'être longue.

Trois coups à la porte.

Je relève le nez, remonte mes larges lunettes sur mon nez. Quelle heure est-il ? Gandalf vient de tomber de Khazag Dum dans les mines de la Moria. Wow... corriger les copies est réellement un voyage dans le temps, on ne voit pas le temps passer.

« Sib ! Ouvre c'est moi ! »

J'agite ma baguette, relevant le charme qui ensorcelle la porte sans serrure. Mon petit frère déboule en un instant dans le salon. Sans demander son reste il s'effondre sur mon canapé en s'exclamant.

« Encore ce film !

- Oui encore, répondis-je en me replongeant dans mes copies, mais tu n'es pas obligé de rester si tu n'aimes pas...

- Pas que j'aime pas, corrige-t-il en s'allongeant sur le sofa, un bras soutenant sa tête, m'enfin après la vingtième fois j'comprends pas comment tu peux ne pas t'en lasser ! »

Je préfère ne pas relever, il ne pourrait pas comprendre la sensation qui me saisit à chaque visionnage. La sensation de retrouver des amis et marcher dans des lieux qui m'ont fait rêvé enfant quand je lisais le livre cachée sous ma couette, ma lampe torche à la main pour déchirer les pages. Sursaut au moindre bruit, de peur que ma mère ne me prenne en flagrant délit de nuits blanche.

« Puis j'vais pas partir, j'adore ce passage ! Fait-il.

- Ah ben finalement, ironisé-je.

- Y reste du chocolat chaud  ?

- Je t'en pris fais comme chez toi. »

N'ayant pas attendu ma permission il est déjà dans la cuisine, à la recherche d'une tasse. Je l'entends trifouiller dans ma pile de lettres sur le comptoir.

« Hey ! T'as reçu une carte d'Ea !

- Toi aussi je crois, rappelé-je. Il serait temps de te pencher aussi sur ta facture, il n'y a plus maman pour faire les chèques pour toi !

- Elle a l'air de se plaire en Irlande dis donc ! »

Eanna, notre grande sœur, fête son vingt-neuvième anniversaire dans notre pays d'origine. Toujours à la recherche d'un chemin de vie et d'une motivation qui la fuient depuis qu'elle a quitté l'école à dix-huit ans. Toujours à essayer de s'extirper de l'ombre de notre aînée, Abaigh, dont les décisions et les réussites nous ont été placée en modèle par nos parents. Je crois surtout que d'apprendre qu'Abaigh, mariée et heureuse mère au foyer, attendait son deuxième garçon a provoqué chez elle une crise existentielle et son départ pour Dublin.

« T'as pas un truc à grignoter sinon ? »

Une heure plus tard, mon frère, le ventre plein, s'endort sur le canapé alors que Boromir s'effondre à Parth Galen.

OoOoOo

« Et c'est ainsi que l'empereur Rad'gak le Tonnerre des Montagnes, leva sa hache, lève-t-il la sienne, et dit à ses généraux : MORTS AUX GOBELINS ! »

Au fait, il se passe quoi en salle des profs ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant