Iiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii
Un sifflement strident me transperce la boîte crânienne. Un noir profond traversé par une nuée de flocons jaunes pâles, gris clairs, blancs m'obscurçit la vue. Puis le poids de mon corps. Lourd. Si lourd tout à coup.
Retour de la conscience.
_ Enfin parmi nous petit.
J'ouvre les yeux. Don Barnard et Firmin me dévisagent. Sylvestre se poste à une quinzaine de mètres et fait mine de surveiller les alentours.
Don Barnard. _ Firmin y va parfois un peu fort mais il faut comprendre qu'il n'aime pas être pris pour un imbécile. Il possède le gros défaut d'être quelqu'un de très exclusif. Il est très fusionnel, si tu montes un peu trop le son avec moi ça l'électrise. Capisce ?
H.O. _ Des monstres, vous êtes des monstres !
Don Barnard. _ D'abord on survit comme on peut et y'a pas de mal à mettre du beurre dans les épinards ensuite ça serait génial que tu fasses ta mise à jour car le système tel que tu le connais a disparu depuis un petit moment. Les changements sont nombreux. Il y'a bien trop longtemps que tu es déclassé. Maintenant grâce à la robotique la productivité s'améliore sans l'apport d'une main d'œuvre humaine. Le monde ouvrier périclite de jour en jour. La société se réorganise. La notion d'état bat de l'aile car la redistribution des impôts est très inégalitaire, elle favorise des minorités dominantes au détriment des autochtones. Les caisses de solidarité nationale ne fonctionnent quasiment plus faute d'adhérents. Petit à petit un système privé se met en place. Est-ce que tu as déjà possèdé une voiture dans ta vie ?
H.O. _ Bien sûr mais où est le rapport ?
Don Barnard. _ Tu vas vite comprendre. Le système fonctionne avec des acteurs privés. Les affiliés payent des cotisations plus ou moins élevées selon le degré de couverture qu'ils souhaitent comme tu le faisais pour ton automobile. En cas de pépin, ils n'appellent plus les pompiers, ils ne se rendent plus à l'hôpital qui de toute façon n'intervenaient plus pour les déclassés. Vrai ou faux ?
H.O. _ Vrai, les abus de pouvoir commis par les agents des services publics sont insensés !
Don Barnard. _ Maintenant, tu appelles ton assurance qui s'occupe d'organiser la prise en charge la mieux adaptée pour ton problème comme ça les refus de soins n'existent plus. Suivant le contrat, cela peut aller jusqu'à la mise à disposition d'organes humains. Tout est légal. Actuellement la durée de vie d'une femme peut aller jusqu'à cent cinquante ans. Durant l'année deux mille vingt deux, un homme a réussi à vivre un mois avec un cœur de cochon greffé mais ça c'était pour l'éthique et le récit national car rien ne remplace pour un homme les organes d'un autre homme. En deux mille vingt sept, quand le parti fasciste est passé au pouvoir en France, une loi a tout de suite été voté en ce sens. Toute personne jugée nuisible peut se voir condamnée à mort et obligée de faire don de ses organes. La loi fonctionne également dans le cadre d'un contrat privé entre un vendeur et un acheteur. Il suffit que le donneur stipule sur papier libre qu'il accepte en toute conscience de céder ses organes à sa mort. Pourquoi crois-tu qu'ils ont élu un parti fasciste ?
H.O. _ Je sais pas.
Don Barnard. _ Car les extrêmes ont la capacité de fabriquer à volonté des boucs émissaires et à créer des parasites ! Tu as vraiment cru à leurs sornettes de zones hors contrôle ? T'as vu des bidonvilles ?
H.O. _ …...........
Don Barnard. _ Le lobby financier pour lequel je bosse siège dans les conseils de nations membres de L'OTAN. Les déclassés alimentent d'immenses camps de travail sous prétexte de réinsérer les chômeurs par l'emploi et la formation. Quant aux parasites (opposants politique, journalistes, entrepreneurs...), ils sont envoyés dans des villages de précautions pour y être rééduquer. La bidoche se conserve mieux sur pied que dans les frigos. La quantité d'organe disponible est immense. Ici, dans le Berry, je travaille de faibles volumes. Par exemple en Normandie, ils gèrent leur stock de manière industrielle. Ils alimentent tout le bassin parisien. Des cliniques privées haut de gamme. Des gens du monde entier viennent en France pour ces prestations. Ils arrivent tout de travers et repartent avec un nouveau moteur et une carrosserie rutilante.
Le type qui t'a alpagué devait être de bonne humeur ce jour là. Encore un de ces extrêmes qui pactise avec l'ennemi soit disant pour affaiblir le pouvoir en place et qui tournera sa veste dès qu'il sentira le vent tourner, comme entre quarante et quarante deux durant la seconde guerre mondiale. T'as vraiment du bol dans ton malheur, non ?
H.O. _ Je sais plus quoi dire Don Barnard.
Don Barnard. _ Déjà, arrête de faire ta mijaurée, t'as pas encore compris que je voulais te faire une proposition ?
H.O. _ Non, je vois pas.
Don Barnard. _ Je veux faire plaisir à Enna, elle le mérite. Alors si t'es d'accord pour devenir son copain, je suis prêt à te prendre dans mon équipe. J'ai besoin de quelqu'un pour livrer la marchandise. T'auras un véhicule et les papiers nécessaires pour circuler librement. Tout est légal, clean. Alors ?
H.O. _ Écoute Don, je veux bien essayer mais je te promets rien.
Don Barnard. _ Ben voilà gamin, c'était pas plus compliqué. Bienvenu parmi nous.
H.O. _ Merci Don Barnard.
Don Barnard. _ Tu vas voir, je vais te requinquer mon gars. Viens, je suis sûr que depuis bien longtemps tu n'as pas mangé un bon steak. Tu verras la bidoche que je sers, elle est encore meilleure que la meilleure viande de cheval.
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History Ov
Random23/06/2028. a.m. Quand tu reprendras connaissance tu seras dans une zone hors de contrôle. Je me réveillais las là. Les yeux secoués, entrebaillés, agités par la lumière blafarde d'un néon défaillant. History Ov est un récit d'anticipation, un tél...