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I'm hiding in the closet, I don't want to be seen
Je me cache dans le placard, je ne veux pas être vueI'm feeling like a monster, secrets inside of me
Je me sens comme un monstre, ce secret à l'intérieur de moiDont Let Them See – BEAR BEAR & FRIENDS & GILL CHANG
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Je rejette la tête en arrière, laissant ma serviette tomber sur mes épaules. Dans la buée qui recouvre le miroir, je discerne mes cheveux qui bataillent sur mon crâne alors que je me les ébouriffe comme pour me les replacer. De l'autre main, je brosse mes dents jusqu'à avoir un goût amer sur la langue. Esquissant une grimace, je crache dans le lavabo pour découvrir une tâche rouge glisser vers l'évacuation. Une nausée me saisit.
Qu'est-ce que...
J'essuie la vitre d'un revers de la main. Je regrette dans la seconde quand je croise le regard d'une fille qui a l'air de ne pas avoir dormi depuis une semaine. Un vrai zombi, pâle comme la mort, des cernes violacées tracées sous ses yeux injectés de sang. Heureusement, sa tignasse de boucles est assez longue pour tomber légèrement devant. Ses joues sont creuses, ses lèvres ternes sont gercées, fissurées... C'est de là que vient le sang : une crevasse au coin de la bouche, teintée d'un rouge horrifique et douloureux.
La prochaine fois, tient mieux ta garde, imbécile.
Ce reflet m'effraie, et ça peut se voir sur mon visage. J'analyse ce fantôme humain avec un désespoir qui me fait secouer la tête, puis faire volte-face vers les casiers.
J'en sors mes affaires. En les enfilant, je tire sur mes manches longues jusqu'à ce qu'elles recouvrent les bandages sur mes phalanges, et rabat ma capuche sur ma tête pour écraser mes boucles jusqu'au milieu du nez.Au moins, comme ça, je ne vois plus les dégâts.
Avant d'écraser mon sac dans mon casier, j'en sors mon téléphone et le fourre dans la poche de mon jogging noir.
Quand il faut y aller...
Je réajuste mes manches une nouvelle fois, puis me dirige vers la porte de sortie.
Je dois rester plantée là bien une minute de plus avant de trouver le courage de l'ouvrir et de m'engouffrer dans la jungle qui se dresse derrière elle.
J'entends marcher, frapper, soulever, souffler, courir... Chaque bruit, chaque son vient me percuter, et même la barrière rock de ma musique ne parvient pas à me protéger. Je me fige sur le seuil, bloquée dans une hésitation. L'angoisse déjà grandissante donne à ma bouche le goût âcre que sécrète le nœud qui a pris toute la place dans ma gorge. Même mon souffle ne passe plus, et je me retrouve pratiquement asphyxiée.
N'oublie pas de respirer.
J'enfonce un peu plus mes écouteurs dans mes oreilles, puis, la tête enfoncée entre les épaules, je m'avance dans ce vacarme en vissant mes yeux sur le sol.
Je peux sentir les gens me frôler quand je passe, me bousculer sans me voir, hurler à ma hauteur pour appeler leur partenaire...Quel enfer...
Je n'aime pas les gens. Je n'aime pas le bruit. Et ici, il y a une combinaison des deux : les gens font trop de bruit. Et je ne veux que le silence... Celui qui prend la forme d'une bonne playlist, chantée contre mes tympans, rythmant mes pas jusqu'au ring sur lequel je me cache toujours. Je passe entre les cordes et vais me placer en son centre. Ici, loin des autres, je ferme les yeux pour me concentrer sur le son de la guitare.
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Le monstre c'était toi
Non-FictionNous avons tous un monstre à l'intérieur de nous. Et nous sommes tous responsables de ce qu'il fait quand on le laisse sortir. Je pensais que le mien avait un regard noisette, un sourire bienveillant, et des dents de requins autour du cou... Mais p...