Chapitre 20

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So much to tell you
Tellement de choses à te dire

And most of all : goodbye
Mais plus que tout le reste : au revoir

Words – SKYLAR GREY

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               J'ouvre doucement la porte d'entrée. Le grincement qu'elle produit me donne envie de l'arracher pour la balancer.

La discrétion, ce n'est vraiment pas mon truc.

Pourtant, quand je passe la tête dans l'entrebâillement de la porte, je découvre que tout est plongé dans un silence de mort. A travers la musique qui siffle une douce mélodie dans mes oreilles, je ne perçois que le bruit de l'air conditionné, et cette goutte insupportable et incessante qui tombe à rythme constant dans l'évier de la cuisine. Oh, et évidemment, l'insupportable boule de poil qui vient à ma rencontre dans des roucoulements qui me font grincer des dents.

Je m'avance dans l'entrée pour ne pas qu'il s'enfuit – pas que ça ne me plairait pas, mais bon – et découvre alors un appartement bercé d'obscurité. Pas une lumière, pas une guirlande... Rien. Il fait sombre, et il n'y a pas un bruit. A part ce fichu chat.

Je lui fais signe de se taire avec un « chut » agacé, puis m'avance vers le salon sur la pointe des pieds. Mauvaise idée, puisque cette position demande un équilibre dont je manque à cet instant. La douleur produit comme un éclair dans mes jambes, et elles me lâchent alors que j'essaye de me rattraper de justesse au dossier du fauteuil devant moi. Entraîné par mon poids, il se décale d'environ cinq centimètres, produisant un grincement d'enfer.
Presque simultanément, une ombre sur le canapé que je n'avais pas remarqué jusque-là se redresse brusquement.

— Quoi ? Qu'est-ce que qui se passe ?

Elle bondit du sofa, en alerte, et prend une position défensive au moment où elle se jette sur la lampe de chevet sur la table basse pour l'allumer.

Cette soudaine lumière m'arrache une nouvelle grimace. Ça lance une migraine qui se percute dans mon crâne comme un tambour de fanfare. Je plaque ma paume sur mon front pour la calmer, sans grand succès.

— Ley ?

La voix est encore endormie et pâteuse, mais je reconnais aisément celle de Rae, qui se tient devant moi. Elle se frotte les yeux en même temps que moi, puis nos regards se croisent, le mien terrifié, le sien dubitatif.

Eh merde...

Je secoue la tête pour cacher mon visage violacé derrière les boucles de mes cheveux, et me redresse aussi promptement que je le peux pour ne pas éveiller ses soupçons.

Elle ne doit pas savoir...

— Ley, c'est toi !

Le fait qu'elle se jette dans mes bras pour me serrer de toutes ses forces ne me facilite pas du tout la tâche. Mon corps a envie d'hurler le mal qu'elle me procure ; mes membres se contractent avec une telle force que je serre les dents sur ma langue jusqu'au sang pour ne pas piper un seul son. Cette fois, je casse mon mantra pour ne surtout pas respirer. Au moindre mouvement, mon corps cèderait ; ça ne doit pas arriver.

Quand Rae me lâche, c'est comme une libération. Je lâche un souffle de soulagement que, dans la précipitation, Rae ne semble pas remarquer.

— Mon Dieu Ley, tu vas bien ? Je me suis fait un sang d'encre pour toi !

Le monstre c'était toiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant