V

442 32 17
                                    

TW : Mort, description gore, vomissement


A l'aube du deuxième jour, ce fut un cri qui réveilla Baptiste. Tous les sens en alerte, il sauta hors de son lit et se précipita dehors. Il suivit les cris qui ne s'étaient pas arrêtés, reconnaissant parfois des appels à l'aide, se dirigeant droit sur l'autre cabane voisine de la sienne. Quand il vit enfin la porte, les cris s'étaient apaisés, laissant place à des plaintes agonisantes. Il entra, ne voyant d'abord personne jusqu'à ce que son regard se pose sur le sol.

Il reconnut avec peine Zerator, Adrien, dans un état qui lui donna des haut-le-cœurs. Plus il regardait, figé, plus l'horreur l'imprégnait. Il réalisa que ce qu'il pensait être des vêtements en lambeaux pendant sur son corps et laissant s'échapper un liquide sombre n'étaient autres que de la peau lacérée. Des bouts de chair pendaient sur son torse, donnant vue sur des trous béants qui alimentaient une flaque rouge se dessinant autour d'Adrien.

Un râle sortit Baptiste de sa torpeur. La bile remonta dans sa gorge quand il comprit qu'Adrien était toujours vivant. Dans un élan d'empathie face à la douleur qui devait traverser ce qu'il restait de son corps, il lutta contre son envie de fuir et s'approcha d'Adrien. Il croisa son regard affolé, caché sous les éclats de sang qui parsemaient son visage. Une plaie plus grande qu'une main sur sa gorge continuait de déverser des flots de sang.

Il voyait de la peur et il ne savait pas quoi faire pour le soulager.

Doucement, il s'agenouilla à côté d'Adrien. Son corps était immobile, comme un pantin dont les fils avaient été coupés, le laissant s'écraser au sol, désarticulé. Il retint une grimace alors qu'il porta ses mains jusqu'à la blessure sur sa gorge. Il entendit ce qui ressembla à un sanglot au même moment où il fit pression avec sa main et qu'il put sentir son cœur, rapide, battre sous sa paume au rythme des flots qui s'échappaient entre ses doigts.

Il retourna ses yeux vers le visage pâle comme un linceul d'Adrien. Ils savaient tous les deux que peu importe ce que Baptiste faisait, il était foutu. Adrien ouvrit la bouche pour parler, mais seul un gargouillis de sang en sortit. Du coin de l'œil, Baptiste vit sa main bougée, lentement. Elle s'arrêta dans sa direction, le poing fermé à l'exception de l'index. Il le pointait du doigt.

Confus, il chercha dans le regard d'Adrien les explications qui lui manquaient. Les yeux d'Adrien lâchaient les siens pour regarder quelque chose un peu plus loin dans la pièce. Baptiste suivit le mouvement et repéra une feuille du livre rouge arrachée et posée sur le sol.

Il put lire : Zerator est la petite-fille.

Les yeux écarquillés, il les retourna vers Adrien. Mais les siens ne le regardaient plus. Son estomac vacilla, de la même manière que quand il descendait la marche d'un escalier pour ne rien trouver sauf du vide sous son pied.

Les battements de cœur avaient cessé sous sa main, de la même manière que le sang ne coulait plus. Il décolla précipitamment ses mains. Il devait s'éloigner. C'était de sa faute. C'était de sa faute, putain.

Mais il ne pouvait pas bouger, il était complètement engourdi. La réalité le collait au sol.

Il était à genoux dans une flaque poisseuse du sang qui séchait de celui qu'il avait un jour considéré comme un ennemi, et il éclata en sanglot.

Bientôt, il entendit des pas résonnés contre du bois. Quelqu'un était là. Il se retourna et reconnut Kenny, figé dans l'encadrement de la porte. Il le savait proche d'Adrien. Il aurait voulu dire quelque chose, mais quoi ?

Il décida de se lever, les jambes dégoulinantes de sang, et il passa à côté de Kenny pour sortir, pour fuir la scène de crime. Une fois dehors, le soleil agressa ses yeux rougis. Il les ferma un moment, prenant le temps de s'habituer à la lumière et respirer un air moins lourd.

Le Jeu du Loup Rouge - LOCKZIEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant