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Le seuil de la forêt franchi, ils se retrouvèrent dans l'herbe, devant la cabane de Lucas. Baptiste s'arrêta, incapable de le suivre.

D'un côté, il ne pouvait s'empêcher de penser qu'il allait peut-être mourir ce soir si Corentin avait décidé de le voter, entrainant inexorablement Lucas avec lui. Et de l'autre, si c'était Kamel qui mourrait, cela signifiait que Baptiste allait devoir éliminer Arif avec les loups. Et il ne savait pas lequel était le pire.

Est-ce qu'il devait le dire à Lucas ? Il allait peut-être devoir éliminer un de leur meilleur ami. Il ne pensait pas en être capable.

« Baptiste ? Ça va ? »

Lucas était revenu sur ses pas quand il avait réalisé que Baptiste ne le suivait pas à l'intérieur. Il sembla chercher son regard, malgré l'obscurité.

Baptiste ouvrit la bouche, voulant dire : « Non, ça ne va pas. Je vais peut-être devoir éliminer Doigby tout à l'heure alors que je préférerais mourir plutôt que de faire ça. Mais je ne peux même pas me sacrifier sinon tu mourras avec moi et ça, c'est mon pire cauchemar. »

Mais à la place, il dit :

« Non, mais euh, je pense que je vais passer la nuit chez moi, au cas où Gota' m'a voté.
- Il ne t'a pas voté. »

Bien sûr que la naïveté de Lucas le poussait à se croire dans le monde des Bisounours et à s'attendre à ce que le pouvoir de l'amitié les épargne. Si seulement c'était si simple.

« Ouais bah t'en sais rien.
- Mais si, je l'ai vu. »

Un poids s'ôta de ses poumons et Baptiste put enfin respirer. Il n'allait pas mourir. Lucas n'allait pas mourir. Pas ce soir.

Malheureusement la bouffée d'oxygène fut bien maigre, une nouvelle masse s'abattant sur sa poitrine. Cela signifiait qu'il allait devoir tuer Arif. De la bile remonta dans sa bouche et brûla son œsophage. Il se contint et cacha les spasmes d'émotions qui secouèrent son visage. Il ne devait pas inquiéter Lucas.

Il avait besoin de s'isoler. Pour crier, pleurer ou n'importe quoi. Il voulait juste être seul, mais il ne pouvait pas dire pourquoi à Lucas. Les nerfs toujours à vif, il lâcha :

« Ouais, bah peut-être que t'as mal vu. »

Il regretta tout de suite le ton acerbe de sa phrase, souhaitant seulement de pouvoir la ravaler. Lucas eut un mouvement de recul et croisa les bras. Baptiste baissa la tête.

« Désolé, c'est pas-
- Ok, t'es fatigué et t'es tendu. C'est normal. Mais là il y a autre chose. C'est quoi que tu me dis pas ?
- Rien. J'suis juste éclaté. J'veux aller dormir. Et toi aussi tu dois te reposer.
- T'as dit que si on voulait tenir, il fallait qu'on se dise les choses. »

Lucas attendit, pas énervé mais seulement inquiet. Et Baptiste voulait le rassurer, lui dire ce qui n'allait pas et diviser le poids qui pesait sur son cœur par deux. Il ouvrit la bouche pour parler mais se rattrapa de justesse. Il ne pouvait pas infliger ça à Lucas.

« J'peux pas.
- Okay. D'accord. Mais t'es sûr que c'est bien pour toi d'être seul là ? »

L'inquiétude de Lucas lui tordait le ventre mais il devait se faire violence. La vérité lui ferait bien plus mal. Il se contenta d'hausser les épaules.

« C'est par rapport au vote des loups, c'est ça ? Tu veux que j'utilise ma potion de vie ?
- Non. Il faut qu'on la garde pour nous. »

Lucas se pinça les lèvres.

Il allait le haïr demain matin.

« Tu rentres maintenant, du coup ?
- Je pense, ouais. Ça va aller ?
- Ouais. Oui, ouais. Ça va le faire. Tranquille. »

Le Jeu du Loup Rouge - LOCKZIEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant