𝐕 - 𝐌𝐄𝐆𝐔𝐑𝐔 𝐁𝐀𝐂𝐇𝐈𝐑𝐀

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Dans mon lycée, nous n'avons pas d'équipe de football mixte. Les filles ne sont pas autorisées à participer aux clubs sportifs.
Décision vraiment stupide de la part de la direction qui n'a aucune idée que je suis capitaine de l'équipe clandestine féminine du lycée.

Après tout, pourquoi les garçons auraient le droit de jouer au football mais pas les filles ?

Mon équipe s'entraîne très tôt le matin et très tard le soir afin que personne ne remarque quoi que ce soit. Grâce à l'aide du gardien et de son trousseau de clés, nous avons accès au terrain avant et après les cours. Nous serions toutes renvoyées si cela venait à s'apprendre.

D'un côté, je trouve ça injuste d'en arriver là simplement pour faire ce qui nous plaît mais d'un autre, ça nous motive bien plus que les autres et nous sommes beaucoup plus soudées.

Pendant la journée, comme il nous est impossible de jouer sur le terrain, je reste dans les gradins à observer l'équipe masculine et « officielle » de notre école.
Navrée de le dire mais hormis un joueur, aucun ne sort du lot. Pas étonnant que notre équipe de football soit à la fin du classement régional.

Il porte le numéro huit, Bachira Meguru. Lui m'a l'air bien plus habile que les autres, ses dribbles sont exceptionnelles.
Ses coéquipiers, loins d'être à la hauteur sont incapables de le soutenir correctement, il n'est donc pas au maximum de ses capacités.
Son jeu est particulièrement singulier, je suis convaincue qu'il est capable de percer la défense à lui seul.
J'aimerais tellement jouer avec lui, voir jusqu'où il peut aller.

Nous sommes tous les deux avants-centres, je suis curieuse de savoir lequel de nous deux est meilleur à ce poste.

Les cours sont terminés, l'entraînement des garçons aussi, c'est bientôt notre tour !
Je quitta le terrain pour rejoindre les filles aux vestiaires.
Comme j'étais la dernière à être restée, les onze joueurs m'observaient tous partir à la hâte jusqu'à ce que quelqu'un élève la voix ;

« Je vois qu'on a une fan, à quoi ça t'avances de nous observer tout les jours ? T'espères quand même pas jouer avec nous, si ? Tu ferais mieux d'aller me faire un sandwich et de me rapporter une serviette propre ma jolie. »

J'hallucine, c'est quoi ces propos ? En plus il est super culotté de me dire ça, d'après ce que j'ai vu c'est le seul qui n'a pas touché le ballon une seule fois. Il aurait mieux fait de fermer sa bouche, je suis d'humeur à m'amuser.

J'étais sur le point de répliquer mais quelqu'un fut plus rapide que moi ;

« T'ouvres un peu trop ta bouche à mon goût, Torashi. Sur le terrain t'es complètement inutile à l'équipe et t'oses t'adresser à elle comme ça ? Commence par arrêter de marquer contre ton camps et ensuite tu pourras parler. »

Bachira, sa gourde à la main, continuait de ridiculiser le numéro dix.
Son coéquipier, très embarrassé de ce qu'il venait de dire, prit ses affaires avant de disparaître très rapidement, laissant le reste de l'équipe en fou rire.

Bachira s'approcha de moi tandis que les autres quittaient à leur tour le terrain.

« - Désolé pour ce qu'il t'as dit, il vit encore en 1950, s'excusa-t-il.
- C'est rien, c'est pas de ta faute. Merci de l'avoir remis en place cela dit. »

Ce garçon est super sympas, je m'entendais vraiment bien avec lui, à tel point que je ne vis pas le temps passer. Je venais à peine de réaliser l'heure qu'il était que les filles commençaient à arriver pour s'échauffer.

La panique s'empara de moi.

Que faire si Bachira découvre notre équipe clandestine ?
Nous dénoncera-t-il ? Gardera-t-il le secret ?

Je ne veux pas que ça s'arrête là, on a tellement de choses à prouver à cette école.

Trop tard, Bachira s'était déjà retourné et avait vu les filles en maillot, ballons en mains.

« Dit-moi, pourquoi elles sont là ? C'est quoi tout ça ? »

A peine avais-je eu le temps de répondre qu'une de mes coéquipières agita le bras, me faisant signe de les rejoindre au plus vite.

Personne n'a vu Bachira ou quoi ? Elles savent pourtant que personne ne doit être au courant.

J'ignora mes amies et agrippa le bras du numéro huit afin d'attirer son attention.

« Bon écoute Bachira, je vais t'expliquer. Je suis capitaine d'une équipe clandestine au lycée. Elle n'est composée que de filles parce qu'il nous est interdit d'intégrer les clubs sportifs du lycée et c'est injuste. On vient s'entraîner ici avant et après vous, juste pour faire ce qu'on aime. »

Je crois que c'est trop d'informations à assimiler d'un coup, il est resté bouche bée.

« Tu vas nous dénoncer à la direction ? »

Très soucieuse de sa réponse, j'attendis patiemment qu'il me réponde.
Il alla s'assoir sur les gradins, et me fit signe de le rejoindre.

Les filles avaient d'ores et déjà débuté l'entraînement sans mes instructions, inutile que je les dérange maintenant.

« - Je ne dirais rien, à une condition, dit-il doucement
- Oui ?
- Mesure toi à moi. Je veux voir ce que vaut une joueuse dans ton genre.
- C'est d'accord, j'avais justement très envie de voir qui de nous deux est meilleur sur le terrain, lançais-je d'un air narquois. »

Nous avions décidé de nous affronter une fois les filles parties afin de nous laisser suffisamment d'espace pour jouer le mieux et le plus librement possible.

Le duel débuta une demi-heure plus tard et étonnamment, nous étions au même niveau. Les dribbles de Bachira lui donnait un avantage mais ma rapidité me permettait de rivaliser.

Le ciel devenait noir et les lumières du terrain venaient de s'éteindre. Il devait être dans les environs de vingt-trois heures.
Bachira et moi étions toujours en train de nous affronter afin de déterminer le maître du ballon rond.

Désormais, plus rien n'éclairait le gazon et je trébucha sur le ballon qui me fit tomber à la renverse entraînant Bachira dans ma chute.

Essoufflée, je resta à terre, essayant tant bien que mal à retrouver ma respiration.
Le joueur que j'affrontais fit de même et avant que je puisse lui demander si tout allait bien, il pointa sa main vers le ciel ce qui me fit détourner le regard vers ce dernier.

Les grands spots gâchaient le superbe ciel étoilé qui venait de se révéler à nous.
Subjuguée par ce spectacle, je ne réalisais pas que Bachira s'était saisi de ma main avant de tourner son visage vers le miens.

La proximité me fit rougir un peu mais ne me dérangeait pas plus que ça. Je me sentais bien à ses côtés et en aucun cas, je n'avais envie de partir.

Le jeune garçon prit une dernière fois la parole un grand sourire aux lèvres ;

« Tu ne voudrais pas te rapprocher un peu plus ? J'aimerais t'avoir près de moi pour toujours ».

𝐁𝐋𝐔𝐄 𝐋𝐎𝐂𝐊 ❘❘ 𝐎𝐧𝐞𝐬𝐡𝐨𝐭𝐬 ツOù les histoires vivent. Découvrez maintenant