9 - Un Présage Rouge

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Le sang tournoyait dans le sceau comme une aquarelle. Je ne pouvais pas mettre ma main à couper que ce n'était pas là avant. Le pire que j'avais était une blessure à la tête, mais elle avait arrêté de saigner depuis. J'approchai mes mains du sceau, et une lourde goutte tomba d'en haut, lançant des ondulations rouges à travers toute la surface.

Fais pas ça...

Je ne voulais pas le faire.

Regarde pas...

Je levai lentement les yeux vers le plafond.

J'aperçus leur pieds en premier, flottants, pendants, de quatre corps raides. Ils étaient accrochés à des nœuds comme de la viande fraiche dans une boucherie, leurs bras lâches et tendus, leurs visages contorsionnés de peur. Des trous rouges fumaient toujours en dessous des mâchoires du premier homme et de Chemise Verte. A leurs côtés, la Reine de Carreau me fixait franchement, ses yeux éjectés de sang et ses joues gonflées et tachetées de bleu violacé. Juste au-dessus de moi, une nouvelle goutte de sang tomba de la poitrine de l'adolescente, son t-shirt trempé de liquide pourpre.

Un cri strident éclata dans la salle de bain, résonnant avec le carrelage et envahissant ma tête par sa pure intensité avant de réaliser qu'il venait de moi. Je ne pouvais pas l'arrêter, incapable de me détourner de ces silhouettes rigides suspendues au dessus de moi. 

Puis, un bruit sourd s'échappa de la porte de la salle de bain, le loquet claquant comme si quelqu'un essayait de forcer la serrure. Je me recroquevillai sur moi-même dans un coin à proximité de l'évacuation et cachai mon visage dans mes genoux où personne ne pourrait me trouver.

La porte céda finalement, suivie d'un silence. Les cris s'étaient arrêtés, maintenant remplacés par des sanglots étouffés. Je pressai mes paumes contre mes oreilles. Je ne pouvais pas les regarder. Je ne pouvais pas supporter d'entendre ces pleurs.

Quelqu'un prononça mon nom, mais cet appel se perdit. Des doigts attrapèrent mes mains et les tirèrent jusqu'à ce que je puisse identifier sa voix. Chishiya. Il répétait mon nom platement, comme s'il n'y avait rien d'autre qui existait.

Lève la tête.

Il tenait mes poignets en l'air, loin de mon visage, mais je gardai ma tête baissée dans l'obscurité. 

Regarde moi.

Je peux pas.

Regarde moi.

Non. Ces yeux éjectés de sang m'attendaient. Je ne pouvais pas leur faire face. 

Il relâcha mes poignets et commença à relever ma tête. Je résistai au début, et abandonnai rapidement, plissant mes yeux quand il me força à sortir la tête de mes genoux, loin de cette confortable obscurité.

Il émit un bruit de vague irritation. Tous ces cris pour rien.

Rien ? Comment il pouvait dire —

J'ouvris les yeux, seulement pour trouver la salle de bain comme elle avait toujours été. Sans corps, sans sang. Entièrement propre, de l'eau de pluie froide badigeonnant le sol et un porte grande ouverte avec une serrure cassée. Et, bien sûr, un Chishiya irrité accroupi sur le sol humide en face de moi.

Non... Je n'arrivais pas à trouver les mots. Non. Non. Ils étaient là. Je les ai vus.

Il leva un sourcil. Qui ?

La Reine. Et la fille que j'ai tuée. Les deux types de mon premier jeu aussi. Ils étaient suspendus là.

Le plafond n'était rien d'autre que de la peinture blanche, et je me sentis soudainement stupide. En revanche, Chishiya n'arborait pas son amusement habituel. Bien que son ton soit plus moqueur que jamais, il me regardait avec quelque chose de plus détaché. Avec un regard clinique. Il n'avait rien à dire, sa seule présence et le toucher de ses doigts avaient calmé la terreur. 

La Rame dans le Sable [Chishiya x OC]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant