Chapitre 5 : La Comté

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— ... que la pollution de l'air constitue un plus grand risque pour la santé publique que le tabagisme, alors même que la loi du trente décembre 1996 reconnaît à chacun le droit de respirer un air qui ne nuise pas à la santé. Fin du bilan des informations, Prioritaire.

Bercée par la Voix, Emeline est allongée sur son lit, quelques boîtes vides ou entamées sur sa table de chevet, une armée de mouchoirs dispersée sur sa couverture. Elle lève les yeux de son livre, sentant le regard du chat depuis le pied du lit. La jeune fille fixe l'animal, immobile, la tête légèrement penchée de côté : une parfaite imitation du Gollum.

— Tu vas arrêter de me dévisager ? Je n'arrive même plus à lire... on croirait que je fais face à un juge, en attente de mon verdict !

Maintenant complètement déconnectée du monde imaginaire de son livre de fantasy, l'adolescente se perd dans ses pensées. Il faut me l'avouer, c'est encore un échec cuisant : trois jours passés à déprimer dans ma chambre, pas un seul contact avec mes parents ou Ben, beaucoup trop de calories ingérées pour aucune activité... à part la lecture, bien sûr.

Emeline en a assez de son isolation boudeuse. Tout ça à cause d'un manque d'enthousiasme sur la plateforme ! Ce n'est qu'un site web idiot en fin de compte, trouvé il y a trop peu de temps pour lui accorder autant d'importance. Elle pourrait facilement dénicher un meilleur endroit.

— À croire que je me suis vexée... marmonne-t-elle à voix basse, son nez légèrement froncé.

Elle se remémore tous les appels manqués de Salomé, avec qui elle s'entendait pourtant bien. Plusieurs fois, elle a hésité à la recontacter pour se confier et pour lui demander conseil, sans jamais savoir par où commencer. Cette fille m'impressionne, elle me liquéfie ! Elle est toutefois particulièrement sous-qualifiée...

— À croire que j'ai un problème d'ego ! lance-t-elle au chat, sa voix se cassant sur la fin de sa phrase.

Emeline enfouit sa tête dans l'oreiller avec un grondement énervé. Elle renifle l'odeur de renfermé qui imprègne le tissu. Il va falloir parler lessive... encore une occasion pour une conversation forcée avec maman. Em ne distingue pas de solution, c'est comme un tunnel sans fin. Elle n'a pas l'impression d'avancer, et ne visualise pas non plus de possibilités de retour en arrière ou de prendre une autre direction. Que du sur-place, de la passivité, enfermée dans le monde fantastique de ses livres. Et la porte maintenant bien fermée au nez de ses proches.

— Appel en cours, plateforme vieillotte, Good Pirate, accepter ou refuser ?

— C'est une blague ou quoi ?

— L'appel ne spécifie pas cette information, Prioritaire, répond la Voix.

C'est peut-être une hallucination... songe Emeline, qui se relève d'un bond, et s'attable à son cockpit en se passant les mains sur le visage comme pour sécher quelques larmes fictives. Assise bien droite, rassemblant tout son courage, la jeune fille se rend compte que l'appel n'émet plus.

Trop tard... Elle imagine déjà se traîner vers son lit pour retourner à son occupation initiale. C'était trop beau pour être vrai, personne n'est gentil au point de me rappeler après que j'ai été aussi inapprochable pendant des jours... pas même Ben. Pourtant, par erreur ou pas, Salomé a bien tenté de la joindre. Elle qui devrait échafauder une nouvelle stratégie, il lui trotte dans la tête un passage de son vieux bouquin préféré du siècle dernier :

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