Chapitre 14

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Ça faisait plusieurs jours que Sylvain avait laissé son portable dans un coin de chez lui et qu'il ne répondait à rien. Ni appels, ni messages. Particulièrement ceux de Pierre. Il ne voulait pas le confronter, même si ça allait arriver un jour ou l'autre, il voulait repousser au maximum.

En fait Pierre ne lui avait pas laissé le choix, car il avait décidé de venir directement à sa rencontre aujourd'hui. Ça faisait des jours qu'il n'avait pas de nouvelles et qu'il se torturait l'esprit depuis l'Italie. C'était trop maintenant, il fallait une discussion. C'était la fin de journée, le soleil commençait à disparaître et Pierre se gara en bas de chez Sylvain. Il ne l'avait pas prévenu de sa venue et tant pis s'il tombait mal. Il prit une grande inspiration une fois face à sa porte et toqua avec peu d'assurance. Un jeune homme lui ouvrit, son visage afficha la surprise et avant qu'il ne puisse dire quoi que ce soit, Pierre força la porte et entra dans l'appartement avant de refermer derrière lui. Il ne voulait vraiment pas lui laisser le choix. Sylvain fit plusieurs pas en arrière et heurta sa table. Pierre retira sa veste et la posa sur le canapé avant de se planter devant lui.

"Bonjour déjà, Sylvain.

-Bonjour, Pierre...Tu veux boire quelque chose ?

-Non.

-Manger quelque chose ?

-Non Sylvain. Je viens pour parler."

Sylvain s'était dirigé vers la cuisine en parlant et resta dos à son interlocuteur. Il préférait s'occuper de ranger son plan de travail que d'être totalement attentif à ce que Pierre avait à lui dire. Il ne voulait pas de cette discussion et essayait de changer de sujet en abordant le boulot, les futurs tournages ou rendez-vous. Quand Pierre parlait il ne répondait pas et ça irritait particulièrement celui-ci. Au bout d'un moment, il perdit patience et se précipita vers Sylvain, agrippant son bras pour le forcer à lui faire face. Il haussa le ton malgré lui.

"Sylvain Levy ! Tu vas m'écouter ?!"

Sylvain eut un sursaut et un mouvement de recul face à l'attitude de son ami. Pierre le lâcha instantanément. Il laissa un petit silence avant d'enchainer, un peu plus calmement.

"Pardon. Je ne voulais pas t'effrayer... Je voudrais vraiment qu'on parle. Sylvain, tu ne peux pas faire semblant. Tu ne veux pas faire comme si il n'y avait rien eu.

-Tu veux parier ?

-Non ! Ce n'est pas sain... Il faut qu'on en parle. Je ne veux pas faire semblant, moi. Je n'ai pas rêvé ce soir-là, tu m'as clairement invité. Et j'ai cédé. Je me suis jeté sur toi car bordel j'en avais terriblement envie. Ça fait beaucoup trop longtemps que j'en ai envie. Ton corps, ta bouche, juste toi. Je te veux Sylvain, je ne t'ai pas menti. Je n'ai pas arrêté ce soir là car je ne voulais pas plus, bordel que si je voulais plus. Mais... Pas que ton corps. Je ne cherche pas ça. Ça fait si longtemps... Ce que je ressens pour toi c'est beaucoup plus que de l'amitié. Et jamais j'aurais cru un jour te l'avouer mais putain après ça... Je ne peux plus faire semblant de rien ressentir."

Sylvain l'écoutait, les yeux baissés sur ses mains qui jouaient avec le cordon de son jogging. Merde. Pierre était vraiment en train de lui faire une déclaration ? Il sentait sa poitrine lui faire mal. Tout ce qu'il essayait de garder pour lui ne pouvait finalement pas rester enfermé dans un si petit corps. Tout ce qu'il avait ressenti depuis la première fois jusqu'à aujourd'hui... C'était Pierre, c'était lui qui avait tout déclenché. Sylvain resta silencieux et les larmes commencèrent à couler sur ses joues. Pierre s'approcha de lui et passa une main sur sa joue pour relever son visage.

"Eh... Je ne veux rien gâcher entre nous. Et si tu le choisis. Si vraiment c'est ce que tu souhaites, je remets tout ce que je viens de te dire dans une boîte que j'enferme au plus profond de moi. Et on continue comme avant.

-Non...

-Non, quoi ?

-Je ne veux pas que tu fasses ça."

Pierre lui sourit et hocha la tête en réponse. Il caressait la joue humide de son ami avec son pouce et le regardait avec tendresse. C'était doux. Pierre déposa un tendre baiser sur le front de Sylvain qui ferma les yeux à ce contact. Les bras du plus petit se calèrent autour de la taille de Pierre. Il releva la tête quand celui-ci recula, réclamant autre chose. Pierre souriait encore plus à cette attitude et délicatement, il l'embrassa. Le temps semblait suspendu autour d'eux et ils ne voulaient penser à rien d'autre. L'autre main de Pierre venait se perdre dans les cheveux de Sylvain, les serrant et les caressant en même temps. Les deux garçons savouraient ce moment, ne voulant pas qu'il s'arrête. Sylvain s'était un peu hissé sur la pointe des pieds pour atteindre correctement les lèvres de l'autre homme. Ses mains serraient désespérément le t-shirt de Pierre, comme s'il avait peur qu'il parte à nouveau. Celui-ci recula doucement mais il resta proche. Sylvain posa sa tête sur le torse de son ami, écoutant son cœur qui battait beaucoup trop fort. Mais il était bien là, dans ses bras. Après un long moment de silence, le plus perdu des deux prit la parole.

"Pierre. Tout ce que tu m'as dit, je...

-Eh. Je n'attends pas de réponse ou quoi que ce soit, d'accord ?

-Je veux te répondre. Mais dans l'immédiat, je ne peux pas. Je... C'est le bazar dans ma tête. Tout est encore trop nouveau. Je découvre encore une partie de moi que je ne pensais pas exister il y a encore deux mois. Je suis perdu. Et en plus, c'est de ta faute.

-De ma faute ?

-Oui ! J'ai commencé à me poser des questions il y a quelque temps parce que, je te regardais différemment... Je ne sais même pas pourquoi, d'un coup comme ça. J'ai commencé à te trouver du charme, puis à aimer ton parfum. Beaucoup trop aimer ton parfum..."

Pierre ne put se retenir de rigoler en l'entendant puis il le serra encore plus dans ses bras pour le faire taire. La voix de Sylvain tremblait un peu et Pierre ne voulait pas l'obliger à parler plus. Il caressa son dos pour l'aider à se détendre un peu avec ce qu'il venait de se passer. Beaucoup d'émotion d'un coup. Pierre savait Sylvain sensible et il voulait au maximum le soulager de ce moment.

"Je ne te mettrai jamais de pression sur tout ça, Sylvain. Tu as besoin de temps et je te le donne volontiers. Et je n'attends rien en retour, vraiment. Mets toi ça dans le crâne. Je n'attends pas que tu partages mes sentiments, je veux juste que tu sois en paix dans ta tête. Et je t'aiderais si tu le veux, bien évidemment.

-Je n'ai pas envie de te blesser ou quoi.

-Eh ! Tu parles à qui là ? Me blesser ? Jamais. Même si tu le voulais, tu ne pourrais pas. J'ai un cœur de pierre.

-C'est pas vrai. Tu es une guimauve.

-Peut-être.

-Tu adores les cafés mignons, les pâtisseries, Mylène Farmer et Madonna. Je continue?

-Oui, bon. Toi, tu adores Animal Crossing et Taylor Swift."

Les deux jeunes hommes ne pouvaient se retenir de rire. Ils continuaient leur étreinte, c'était vraiment agréable comme moment et aucun ne voulait briser ça. Ils continuaient de parler de tout et de rien. C'était parfait, ils avaient besoin de ça.

Pierre avait passé le reste de la soirée chez Sylvain, il lui avait cuisiné un plat simple mais qui ravissait le cœur du plus petit. Des pâtes carbonara. Ils s'étaient installés devant un film et c'était un moment rien que pour eux. Mais c'était exactement ce qu'il fallait. Pierre faisait attention à ses gestes pour ne pas envahir Sylvain. Ils étaient tous les deux fatigués émotionnellement. Tout ça les avait épuisés. Pierre quitta finalement l'appartement tard dans la nuit, laissant son ami endormi sur le canapé.

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