Un brin de poésie

Clarté du mois d'Avril

A nouveau prise au piège des couches de béton, je laisse mon âme vagabonder et mes yeux tenir dans leur viseur le peu de monde que je vois au travers des carreaux tachetés, découpés inégalement dans l'enveloppe du mur qui me fait face.

Je ne peux m'approcher, mais déjà l'immensité du panorama me parvient. Mon regard s'échappe, le traverse de long en large et mon cœur langoureux d'envie me sonne de le rejoindre, quitte à sauter dans le vide inconnu.

Mais je ne bouge pas. Je ne peux qu'observer. C'est déjà suffisant pour en admirer la beauté, mais pas assez pour m'en enivrer.

Les ventres vallonnés des collines gondolent l'horizon d'un bleu pâle. Les masses mousseuses et touffues s'étalent le long des pans, rejoignant le creux des vallons. Les traits cotonneux s'étirent langoureusement dans la voute azurée, si pâles qu'ils se mêlent aux petits bouts de ciel blancs collés à l'horizon.

Si j'abaisse le regard, les créations humaines viendront tout gâter. Les maisons aux toits tuilés trancheront les courbes maternelles des touffes de feuilles vertes, jaunes, rouges pour les plus en retard et grises pour les plus fatiguées. Mais les briques de bétons, les déserts de goudron et les lianes électriques sont partout.

Où que mes yeux avides de beauté se posent, il y en a qui me jettent un voile grisâtre et morne au visage. Seule la lumière est capable d'adoucir la laideur de leur géométrie. Le soleil, encore jeune et en plein éveil, ébloui les mondes quels qu'ils soient, avec une douceur timide, encore fraiche et pâlotte. Ses langues claires se jettent sur les façades, lisses ou brumeuses, et jouent infantilement avec les ombres et les poussières.

 Des bleus aux verts, les couleurs se palissent ou se parent de frais pigments. Et ce tableau empli de douceur, berce mon cœur.