Contempler

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Zelda frissonnait. Même en cette fin d'été, les nuits étaient fraîches et une brise septentrionale balayait le balcon royal. Assise sur le garde-corps de pierre, dos à ses appartements, la jeune fille frottait ses bras nus mais ne lâchait pas du regard le ciel. Le temps avait beau être dégagé, la souveraine ne pouvait que constater la véracité des propos de son chevalier-servant : les étoiles se faisaient rares et timides au dessus de la citadelle. Tandis qu'elle essayait de distinguer une constellation, sa discussion avec Adonis l'après-midi même ne cessait de se répéter dans son esprit :

"Quel est ton plus grand rêve ?" avait demandé la jeune Reine au chevalier.

Ce dernier avait souri, naviguant avec nostalgie dans ses souvenirs, avant de répondre sans hésiter, comme s'il l'avait répété des centaines de fois :

"Rendre mes proches fiers de moi."

Devant le silence surpris et attentif de son interlocutrice, le brun avait expliqué :

"Depuis tout petit, j'ai toujours voulu satisfaire ma famille. Ne jamais les décevoir. Je voulais me rendre utile auprès d'eux, les rendre heureux de m'avoir à leur côté. Mon père a toujours voulu devenir soldat, lorsqu'il était jeune. Mais alors qu'il voulait s'enrôler, à l'âge de 15 ans, Ganon s'est réveillé et Astor a prit le pouvoir. Il n'a eut d'autres choix que de renoncer à son rêve d'aventure et de dévotion à la famille royale, et s'est résigné à travailler au relai du pied de la Montagne, où il a rencontré ma mère. Il m'a longtemps fait par de ce regret, et c'est pour cela que j'ai rejoins l'Armée, il y a 4 ans. Pour accomplir le rêve inachevé de mon père, pour le rendre fier de moi. Toute cette ascension militaire que j'ai entrepris, depuis mon arrivée, je l'ai faite pour voir la fierté et le bonheur luire dans les yeux de ma famille. Qu'ils soient fiers de dire que je suis leur fils, leur frère, leur petit-fils. Tout ce qui me manque pour que mon rêve soit complet, c'est de pouvoir lire moi-même cette satisfaction dans leur regard."

Zelda soupira et baissa le regard en contrebas, vers la citadelle illuminée. Sa réponse, en retour, la rendait honteuse :

"Je... Je ne sais pas, avait-elle balbutié lorsque le jeune homme lui avait retourné la question. Je n'y ai jamais vraiment réfléchi, je suppose que la pré-dominance de mon devoir m'a toujours interdit de réfléchir à ce que j'aurai voulu accomplir ou devenir..."

Le reste de la journée, la jeune femme avait tenté de répondre à cette question, en vain. Elle avait été si conditionnée par son rôle et ses obligations pendant 4 longues années qu'elle n'arrivait même plus à savoir ce qu'elle désirait vraiment. La souveraine s'était résolue à une routine morne et un quotidien constamment dictée par autrui pour elle. Et cela... jusqu'à la fin de sa vie ?

La jeune Reine en avait le tournis, et attrapa fermement le rebord de la rambarde de pierre en fulminant, en colère contre elle-même.

"Papa... Maman... Impa... Aidez-moi, qu'est-ce que je dois faire ? demanda-t-elle en levant un regard humide vers le ciel noir.

- Toujours pas endormie ?"

Zelda fit volte face vers Lucia, habillée d'un long haori jaune orangé par dessus une combinaison noire et qui venait de franchir la fenêtre en pied donnant sur le balcon, une robe de chambre sous le bras et un verre rempli d'un liquide transparent à la main.

"Ce n'est pas raisonnable, n'oublie pas que demain matin il y a la réunion de la guilde des marchands, il faut que tu sois reposée !"

La femme sheikah s'avança vers la souveraine et passa habilement ses jambes par dessus le garde corps pour s'asseoir à ses côtés. Elle posa la robe de chambre sur les épaules de la blonde et lui sourit chaleureusement.

Aventures de Zelda Raphaëlle Hyrule : 8.Le Fardeau du DevoirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant