Année 415, Terre Noire — grottes des Montagnes Brumeuses
Elio
Né en plein dedans, la patience d'Elio s'y effritait avec le temps. La guerre. La supporter était pire que la vivre. Aller au front et se battre changeait la vision du monde, mais Elio s'en était lassé.
Face à ses équipements, Elio souffla. Tout comme les maîtres de son régiment, il ne possédait aucune arme, optant pour ses pouvoirs pour combattre. Ses supérieurs leur avaient interdit les armes, décrétant qu'elles leur seraient inutiles et encombrantes. Ce qui était idiot puisque les maîtres se faisaient plus rapidement repérées, et donc tués.
Le voile de la guerre était tombé il y a deux ans, alors qu'un groupe de soldats cherchaient des adolescents et adultes aptes pour l'armée. Elio avait été arraché de sa famille. Son entrainement intensif n'avait fait qu'éveiller le mépris de ses camarades à cause de ses pouvoirs. Le seul maître de son régiment. Cela l'exaspérait.
Les garçons ne cessaient de le harceler. Au début, ils ne posaient que des questions. Puis ils ne s'en étaient pas contentés, et lui ont presque ordonné de se servir de son don devant eux. Elio ne cédait pas.
Quand l'envie lui prenait, Elio adressa quelques ruses à ses compères, inspirées de celles de Mirri, sa sœur. De quatre ans son aînée, elle avait toujours été une farceuse. Parfois, Mirri mélangeait sa maîtrise du feu. Parfois non. Tout dépendait de son humeur.
Elio et elle étaient des maîtres, au plus grand malheur de leurs parents. Lorsqu'ils étaient âgés de six et dix ans, Mirri lui a montré comment jouer avec le feu. Nombreuses furent les boules de feu échangées lors de duels enfantins. Mirri gagnait tout le temps. Avec son expérience plus grande, l'aînée avait un avantage. S'occuper de tout aidait aussi. Son don se développait très vite, comme si elle n'avait pas besoin d'entraînement. Au fil du temps, Elio avait consenti à ce que ce soit inné d'être aussi douée. Elio la voyait comme la sœur parfaite ; forte, courageuse, intelligente.
Sa débrouillardise parlait pour elle. Parvenir à chauffer la cheminée du salon, couper des légumes pour le potage, chasser la vapeur de la cuisine tout en séchant le linge et en veillant à la luminosité de la maison, relevait de l'exploit. Mirri était l'une des rares maîtres à contrôler plusieurs sous-maîtrises en même temps.
Elio paraissait pour un débutant à côté d'elle. Ses flammes basiques et la propulsion par la pression, n'étaient pas très original. C'était du niveau d'un enfant. L'un de ses amis, Sorin, arrivait à manipuler son feu par la pensée pour créer des explosions à distances. La combustion. Sorin parvenait à changer la lumière d'un geste, mais aussi de gérer la chaleur et la fumée. Tant de compétences dont Elio jalousait. Tant de cordes à son arc. Tant d'imprévisions.
Avant de penser à ses proches, Elio inspectait ses bras. A peine dix sept ans, et ses muscles dus aux entrainements, se retrouvaient couverts de blessures. Avec la guerre, il avait grandi vite. Si bien qu'il avait déjà dû tuer pour sauver sa peau. Un acte dont il n'était pas fier, car retirer la vie était synonyme de perdre une partie de soi.
Son engagement dans l'armée à quinze ans, Elio suivait son père, qu'il dépassait de quelques centimètres à présent. Deux années à s'entrainer pour devenir le meilleur. Tel était son but.
Dans sa famille, il n'y avait que lui et Mirri comme maître. Les dons se transmettant par le sang, les médecins avaient conclu que l'un de leurs ancêtres devait en être un. Ils venaient tous de Luma, dans l'est de Braserra. Des générations s'étaient écoulées, et aucun de leurs aïeux ne possédaient le moindre pouvoir.
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La perte mémorielle
FantasíaCinquante années après la fin de la Grande Guerre, Néola se réveille amnésique. Perdue et désorientée, elle fera tout pour retrouver sa mémoire. Quitte à fréquenter des personnes qui lui veulent du mal, à se détruire, à rencontrer une bande de crimi...