𝗪𝗢𝗥𝗡 𝗦𝗧𝗢𝗡𝗘 | 𝘁𝗼𝗺𝗲 𝟭

18. Secret gardé

Aspen

La tasse chaude qui se tient en face de moi, la fumée qui en déborde tandis que la voix carnassier de Cian se profile au milieu du café. Ma tête est ailleurs, comme à peu près tous les jours... depuis trois jours. J'ai répondu à la dizaine de messages laissés par mon soi-disant demi-frère. Pour l'unique raison que j'étais en train de péter un câble.

Entre les quatres parois de la péniche, Moon qui ne fait que se dorloter sur mon coussin, la série Friends que j'ai finis et recommencer, les fan-fictions que j'ai terminées et que je n'en retrouve plus à mon goût... les papiers éparpillés sur le parquet à la recherche de la moindre explication. Sans compter la lettre écrite qui est érigée pour une certaine Heaven Bloomfield qui est posée soigneusement sur ma table de chevet, à côté du cadre photo de ma mère.

Ouais, je pétais vraiment un plomb.

– Tu m'écoutes, Aspen ?

Il dit en claquant des doigts devant mes yeux alors que j'étais absorbée par la fumée débordante de ma tasse.

– Ouais, pardon.

Je feins un sourire et le regarde en prenant la tasse dans mes mains.

– Tu disais ?

Il affiche une lignée de dent blanche tandis que je l'observe à plate couture. Merde, pour un adolescent de seize ans, il est vraiment beau à se damner. Il a des cheveux crépus au-dessus de la tête, une peau métisse et des yeux gris. Ses bras sont si musclés que je me demande s'il ne prend pas des stéroïdes après les cours de sport. D'après ce qu'il me raconte, il est dans un lycée public et il a refusé que Dean lui paye ses études.

Au moins, il est écouté...

... ce que moi, je n'ai pas eu le droit.

– Et donc, je lui ai dit d'arranger ça, parce que bon... et puis tu vois, je lui ai dit d'aller se faire foutre.

– Quoi ?

Il rigole en buvant une gorgée de son coca et secoue la tête.

– Tu ne m'écoutais pas.

– Désolée...

Mes excuses sont sincères et c'est rare en ce moment. Je ne pense qu'à la confidence de Shayn, qu'à son regard quand j'ai refusé d'aller plus loin, à l'assemblée qui m'a regardé partir en trombe, pied nus. Et je ne fais que penser qu'à l'absence de ce monde, qu'au manque que mon cœur ressens quand les jours passent... et qu'à l'ennuie mortel, putain.

– Ça ne va pas ?

Je relève la tête et le regarde avant de soupirer longuement, décalant une mèche de cheveux qui était posée devant mes yeux.

– Disons que ça ne va pas fort.

Je hausse les épaules et j'ignore pourquoi... mais je me confie. Parce qu'il est là et que c'est le seul qui a l'air de vouloir m'écouter, visiblement.

– Je viens d'apprendre que mon meilleur ami est mort d'un suicide, alors...

Je m'étrangle avec un sanglot qui s'empêche de sortir quand il pose sa main sur la mienne, caressant ma peau. Je souris faiblement et apporte la tasse à mes lèvres pour en boire le café.

– Aspen, je suis désolé.

Je regarde mes ongles rongés et je dis, amèrement.

– J'ai l'impression que c'est ma faute, que si je n'avais pas était assez conne, peut-être qu'il serait encore là.