2. Le mal est fait

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Aspen
Maintenant

Il y a des jours, comme celui-là, où je n'ai envie de rien à part me prélasser sur mon sofa. Friends en fond sonore sur ma télévision, mon téléphone allumé sur l'application de Wattpad pour lire des fanfictions sur Justin Bieber et mon chat au-dessus de mon ventre, ronronnant. Rien d'anormal jusqu'ici. Peut-être la vie intégrante d'une jeune femme qui ne cherche qu'à assouvir ses peines.

En d'autres mots, je n'ai pas envie d'être ici.

J'ai longtemps rêvé de ce moment, en revanche. Celui où le président de la faculté cri mon nom dans le micro, sur son estrade. Celui où ma famille se rend compte que c'est moi et proclame à gorge déployée et celui où je monte sur le podium, un sourire aux lèvres, prenant mon diplôme roulé attaché avec son nœud rouge extravagant. Je crois que c'est le moment fatidique que chaque élève attend le plus depuis leurs rentrées à l'université.

J'ai longuement répété mon discours devant mon miroir, quelque fois, c'était au volant de ma voiture et d'autres, c'était quand je n'arrivais pas à dormir et qu'une crise d'insomnie pointait le bout de son nez à trois heures du matin. Je m'étais mis la pression et pour quelqu'un de diplômé en art appliqués, spécialisé en lettre, ils doivent forcément contenir un discours en forme d'une future grande auteure ou éditrice. Sans éloges fastidieux ou rayures sur la feuille. Pourtant, je n'ai pas réussi à écrire un petit mot. Le néant, le trou noir, comme aucun mot ne me venait à part le "merci" que tout le monde pourrait attendre. Je me suis toujours demandé pourquoi doit-on remercier les autres pour avoir été diplômé. En général, c'est avec notre sueur, notre force, notre courage et notre dévotion qui a attesté que nous pouvons être sur l'estrade aujourd'hui. Cependant, c'est le seul mot qui m'est parvenu. Et je ne sais pas si je remercie mon ex petit-ami au premier rang, si c'est pour sa mère que j'ai tant affectionné durant ses longues années difficile, si c'est pour mes professeurs qui ont eu la patience avec quelqu'un comme moi ou si c'est pour mon père absent.

Lorsque la cérémonie se termine, chaque étudiants se lève, maintenant leur coiffe et quelques secondes après, ce sont des cris qui s'élèvent parmi les chapeaux qui se font jeter en l'air, atterrissant sur le jardin entretenu.

Sauf moi. Je me suis éclipsée loin de cette assemblée dès que l'occasion s'est présentée. Ce sont quatre années qui se sont achevées pour certains, six pour d'autres, comme moi. Et je n'aurais jamais voulu refaire une année parce que j'échouerais. Non, c'était deux années de suite parce que mes notes étaient si lamentables que mon père devenait soucieux pour moi. Enfin, j'ai compris bien trop tard que ce n'était qu'une façade parmi tant d'autres.

C'est peut-être pour ça qu'il n'est pas venu depuis Londres pour assister à ma remise de diplôme. Peut-être qu'il est trop déçu. Et il a raison. À sa place, j'aurais été déçu.

Je suis vraiment un cas désespéré.

J'ai déjà enlevé ma robe que j'ai jetée dans une poubelle au préalable. La toque a suivi et je m'apprête à rejoindre ma voiture quand j'entends des pas se rapprocher de moi. Lourdement, pressement.

Mes muscles se tendent, mon souffle devient erratique et mon cœur bat frénétiquement dans sa cage thoracique, si bien que j'ai une peur constante qui s'émane de moi.

Et si... il était venu ?

Je me retourne en valsant l'air autour de moi et je souffle quand je me rends compte de qui ça pourrait être. Je me sens idiote quand je porte ma main sur mon cœur devenu bien trop rapide à mon goût.

– Pardon, je ne voulais pas te faire peur.

La femme porte sa main près de sa bouche pulpeuse, tandis que je secoue la tête, ignorant sa remarque.

𝗪𝗢𝗥𝗡 𝗦𝗧𝗢𝗡𝗘 | 𝘁𝗼𝗺𝗲 𝟭Où les histoires vivent. Découvrez maintenant