INFINI 1 Séparation

THOMAS

Assis sur la plage, regardant le soleil se coucher, je repense à ma vie, à ce qu'elle aurait dû normalement être, à tout ce gâchis. Six ans après j'ai une envie de crier ma colère, mais surtout ma douleur. Cette douleur qui ne m'a jamais quittée durant toutes ces années. Amy, mon Amy est vraiment partie et malgré tout ce temps j'ai toujours autant l'impression d'être dans un mauvais rêve et que je vais finir par me réveiller. Tout le monde autour de moi me dit de la laisser partir afin de faire enfin mon deuil. Moi je n'y arrive pas et je crois que jamais je ne pourrais. La nostalgie de nos moments passés ensemble est tout ce qui me reste. Je m'y accroche car par moment je découvre avec effroi que certains souvenirs s'effacent de ma mémoire. Je ne veux pas l'oublier, non je ne dois pas l'oublier, alors assis sur cette plage où nous sommes venus tant de fois, me rapproche un peu d'elle, de nos instants vécus ici. En général, les personnes qui perdent un être cher, se recueillent sur leur tombe. Pour moi cela représente la mort, or je veux garder Amy bien vivante avec moi, alors je choisis de me recueillir dans nos endroits favoris et à me remémorer tout le bonheur partagé, car même si je l'ai perdue, ces moments sont tout ce qui me restent. Au fil des années, mon entourage croyait que je guérirai de ce pan dramatique de ma vie. Mes parents ont tout fait pour me changer les idées, même Josh s'y est mis aussi mais voyant que cela ne servait à rien, ils ont fini par renoncer. A 21 ans, je vis comme les jeunes de mon âge, je sors, je rencontre de nouvelles personnes, des filles, néanmoins, je reste le Thomas de Amy et ça rien ni personne ne peut y remédier. Autour de moi, des couples s'installent, s'enlacent, s'embrassent, profitant du coucher de soleil. Je les envie, je devrais être moi aussi comme eux insouciant, heureux et croquant la vie à pleine dents avec la fille que j'aime, qui n'est plus mais que j'aimerai toute ma vie.
L'âme en peine, je me lève et je refais le chemin inverse, ce soir j'ai un rendez-vous très important et je ne voudrais pas arriver en retard, même si je n'ai aucune envie de m'y rendre, il le faut bien.

Putain ! Six ans que ce jour fatidique m'a enlevé Amy et avec elle tous mes espoirs, mon destin a été chamboulé de façon cauchemardesque. Ma vie est un trou béant, fade, sans saveur. Auparavant je me trouvais lâche d'être encore en vie, de n'avoir pas eu assez de cran pour en finir et la rejoindre. Jusqu'à ce jour où j'ai enfin trouvé une raison de continuer à vivre, depuis tout tourne autour de ça. Arrivé chez moi, je vois qu'il y a de la lumière, mon sixième sens se met illico en alerte, pendant que je descends de ma moto, quand j'aperçois la silhouette de ma mère.

Mais que t'elle là ?

Les années passent et elle ne change absolument pas d'attitude envers moi, pire elle est de plus en plus présente dans ma vie. Croyant qu'avec la prise de cet appartement et l'autonomie que j'ai acquise, elle lâcherait prise, mais non, je la retrouve souvent chez moi quand bon lui chante. Je descends de la moto, exaspéré, ce n'est pas le bon moment de se pointer ainsi chez moi, elle pourrait tout compromettre. Réfléchissant à l'argument pour l'amadouer, je pousse la porte d'entrée. A peine je franchis la porte que je la vois, occupée à ranger des affaires prenant çà et là, mon exaspération monte d'un cran, je souffle.

-ah, mon chéri tu es enfin là... comment fais-tu pour vivre dans un appartement aussi en bazar ?

Blasé, je me jette sur le canapé, je laisse vagabonder mon esprit, à mille lieux, si tout se passe comme prévu, je saurai tout bientôt. Je serai enfin fixé, sur ce qui s'est vraiment passé, avoir le fin mot m'aidera peut-être à guérir.

-tu m'entends ?

Je lève les yeux vers ma mère, qui se tient devant moi, les bras chargés, cette vue m'exaspère alors je prends la décision de changer la serrure de la porte. Je ne veux pas qu'elle continue de venir ici comme bon lui semble.