Le dernier vendredi du mois de Janvier fut un jour particulièrement glacial ; la neige fondue tombait à grosse goutes, accompagnée d'un vent violent et humide qui gelait le bout des doigts. Nous avions eu un contrôle de maths en première heure et j'étais sorti dans les derniers ; mon niveau étant exécrable, je n'avais pas rempli la moitié de ma copie double. Je sortis de la salle avec un mal de crâne tel que je devais me tenir la tête de mes mains froides pour que la pression descende. Avec ma migraine, j'en avais oublié de regarder devant moi et avais percuter l'une des seules personnes qui se trouvaient dans le couloir à cette heure-ci. En relevant la tête pour m'excuser, je me rendis compte qu'il ne s'agissait d'autre qu'Abel. Je ne sus comment réagir et je sentis soudainement mes joues s'empourprer. Il me fit un sourire coincé ; il y avait des semaines qu'il ne m'avait plus souri. Alors, lui rendant son sourire, je repris mon calme et engageai une conversation sur le contrôle. Nous avions sport à l'heure d'après, alors nous nous dirigeâmes vers le gymnase du lycée, en face de l'établissement principal.
Du lycée aux vestiaires, et des vestiaires au gymnase, je n'avais pas cessé de scruter le moindre de ses gestes ; je ne pouvais être que surpris de cet abord aussi plaisant qu'étrange. Je me sentis, une fois dans les vestiaires, légitime de trouver qu'il avait de très belles jambes. Pendant ma petite "descente aux enfers", je n'avais pas osé les regarder ; et dire que je m'étais privé d'une telle beauté durant tout ce temps ! Je pense que je me suis fait remarqué alors que je dévorais ses cuisses des yeux, puisqu'il avait rougit et s'était recroquevillé pour enfiler son jogging en vitesse; il y avait longtemps qu'il n'avait plus baissé les yeux devant moi. L'espoir que l'année redevienne attrayante renaissait enfin.
Nous commencions un cycle de lutte et allions en avoir notre premier cours. Assis sur les tapis alors que le professeur faisait l'appel et donnait des explications inutiles, je me dis qu'il était grand temps, maintenant que nous avions repris contact, de continuer la partie de notre petit jeu là où nous l'avions laissée. Alors, en toute discrétion, je m'approchai d'Abel en me positionnant de telle sorte que je n'avais aucun problème à toucher sa main sans me faire remarquer. D'un doigt, j'effleurai sa main qui se rétracta aussitôt. Il jeta un coup d'œil derrière son épaule et se retourna immédiatement après m'avoir vu. Ma stupéfaction n'eut d'égale que ma joie quand je vis ses doigts fins se diriger timidement vers les miens. Je fus submergé d'adrénaline en un quart de seconde et souris instantanément jusqu'aux oreilles, sans quitter sa main des yeux comme si j'avais peur qu'elle s'envole. Mes doigts se confondirent aux siens, et je pus sentir les frissons qui parcoururent son corps. Il avait été l'un des principaux acteurs de ma dépression, mais il était à moi à présent et je comptais bien rattraper le temps perdu, ce qui me sembla bien plus simple vu sa rapidité pour céder au Vice. Nous étions presque à égalité ; il m'avait fait souffrir ? À mon tour de jouer.
Le choix des partenaires fut relativement facile. Le but du premier exercice fut d'immobiliser l'adversaire au sol pendant dix secondes. Abel et moi nous mîmes à l'écart dans un coin du grand gymnase et, une fois à genoux, nous nous fîmes face pour commencer (j'ai omis de préciser l'entraînement et les explications des bases de la lutte qui n'ont strictement aucun intérêt pour le récit). Comme j'avais fais du jujitsu pendant six ans, j'avais un très sévère avantage ; en quelques secondes, il fut à terre, sur le dos alors que je l'immobilisais à cheval sur son ventre (je sais, j'étais un peu trop haut). Je lui souris et d'un ton enfantin de dire : "T'es plus fâché ?". Il se tut et détourna son regard pour masquer sa gêne.
- Ta gueule, dit-il avec un petit rictus.
- Ha bah il se décoince quand même ! C'est pas trop tôt.
- Ça fait dix secondes, tu peux te relever...
- Non, pour moi t'es pas totalement vaincu.
La peur se lit sur son visage. Je l'empoigna fermement par le col et attrapa sa nuque de l'autre pour le redresser violemment et lui voler un baiser qu'il n'était pas prêt d'oublier. Le choque de nos lèvres entrouvrit sa bouche, se qui me laissa un chemin pour m'y introduire. Même décontenancé, il embrassait à merveilles. Le baiser ne pu durer plus de cinq secondes ; il ne fallait pas prendre le risque d'être remarqué, bien que nous étions dos à l'assemblée bruyante des élèves. Je le re-plaquai au sol pour lui dire, satisfait : "Là, ça fait dix secondes.". Il était devenu écarlate, telle la chevelure d'Erza (référence d'otaku) et le resta jusqu'à la fin du cours. Il lança un regard circulaire à l'assistance qui ne se souciait absolument pas de nous ; seule Capucine, qui l'avait vu, lui sourit avec un regard innocent et amoureux, qu'il ne sut même pas discerner tant son esprit était confus. La sueur de son front avait dérangé ses cheveux, d'habitude si bien ordonnés.
Le cours se poursuivit sans encombre. La journée se continua sans événement notable pour se finir à 15h30. En sortant de la salle, Abel m'attendait sagement adossé au mur. En fait, je ne le sus qu'après qu'il se soit avancé vers moi pour me demander rougissant "Je te raccompagne ?". La descente des escaliers fut accompagnée d'un silence à travers lequel résonnait les cris et les pas des élèves. Arrivés devant le lycée, je lui proposai de prendre un verre au Marin pour discuter de ce dont il fallait parler et il accepta.
Son café et mon chocolat chaud servis, nous pûmes enfin délier nos langues - si je puis parler ainsi - et moi le premier en engageant la conversation.
- Bon alors maintenant tu vas me dire pourquoi t'es revenu et pourquoi si vite ; parce qu'en général vous êtes pas du genre à vous décoincer, vous les cathos.
- D'abord tu vas arrêter de m'appeler "vous les cathos". Ensuite tu vas arrêter de penser que je suis coincé. Et enfin je ne suis pas parti, j'ai juste pris du recul.
- Ok, joues sur les mots si tu veux, mais ça t'empêche pas de répondre à mes questions.
Il prit le temps de boire une longue gorgée de café avant de commencer ses explications.
- Je suis catholique depuis ma naissance ; j'ai été baptisé à deux mois, j'ai fais ma communion, ma confirmation et tout, je vais à la messe au moins une fois par mois, bref je suis un bon petit catholique. Le seul problème, c'est qu'il y a trois ans, je suis tombé pour la première fois amoureux d'un homme : Colin, un pote de ma classe en quatrième. Au début, je pensais pas que c'était de l'amour. Et puis à force j'ai commencé à me poser des questions et puis je me suis résigné à la pensée que j'étais vraiment tombé amoureux de ce type. Sauf qu'on m'avait tellement dit que l'homosexualité est une maladie que j'ai eu peur de moi-même. Je l'ai caché à mes parents et je l'ai même caché au curé chez qui je me confessais ; enfin pas au début, mais après j'ai arrêté de lui en parler. J'ai fini par me dire que je n'avais pas le droit et j'ai enfouis mes sentiments au plus profond de moi, reniant mes pulsions et mes passions. J'avais réussi jusque là, mais bien sûr il a fallu que toi tu te ramènes avec tes regards en coin et ton p'tit cul moulé dans ton jeans... T'as tout gâché. J'avais bien vu que tu me draguais, mais à chaque fois j'essayais de parler de filles ou d'autre chose pour que t'arrêtes, mais tu t'es acharné sur moi comme un sauvage, quand t'approchais ta main, je reculais la mienne et tout... Mais c'était déjà mort, j'étais déjà tombé amoureux de toi. Alors j'ai préféré couper les ponts plutôt que de me laisser aller, et je pense que je te l'ai bien fais comprendre. Et puis pendant des semaines, je me suis demandé si j'avais pris la bonne décision, mais comme t'as fini par t'en foutre de moi... Et puis entre temps, ma cousine est venue pendant deux semaines chez moi pour un stage et comme je lui dis tout, bah je lui en ai parlé. Et elle, elle en a rien à faire de la religion, du coup elle m'a fait comprendre que ça servait à rien ce que je faisais, et elle m'a fait "voir la lumière", on va dire. Elle est partie hier, c'est pour ça que je t'ai reparlé que maintenant... Voilà.
J'étais sidéré. Je n'aurai jamais imaginé tout ça ; jamais je n'aurai pu croire qu'il m'aimait depuis le début et qu'il a luté contre moi et contre lui-même pendant tout ce temps. J'en eus presque les larmes aux yeux. Voyant ma confusion, et sans doute par réconfort, il prit ma main posée sur la table et la caressa doucement. Il sourit, je fis de même, et nos mains se confondirent.
- Je savais pas... Je suis désolé.
- Mais non arrête, tu pouvais pas savoir.
Nous n'avions cessé de parler jusqu'à chez moi. Devant mon immeuble, un long échange de regards ; je passai ma main dans ses cheveux, il me caressa la joue, et nos lèvres s'approchèrent pour donner suite à un long baiser passionné. Amen.
Coucou les gens ! Voici mon chapitre 4 ; un peu long je trouve, mais je voulais pas couper la journée en deux. Dites- moi ce que vous en pensez surtout ! Au fait, je voulais dire qu'il y aura du lemon sûrement dans l'un des deux chapitres suivants, mais je sais pas encore lequel... Voilà c'est tout... À bientôt !^^
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Rester digne
General FictionBonjour chers amis ! Voici une histoire qu'on pourrait qualifiée de romantique entre deux hommes, un peu à la Roméo et Juliette, mais avec un seul protagoniste qui se retrouve face au dilemme du corps et de l'esprit. Pas mal de remise en question su...