19 - Verre brisé

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Après ce Noël tumultueux, les quatre Maraudeurs poursuivirent leur cinquième année à Poudlard, dans une ambiance étonnamment sereine. Le drame du pensionnat Wimbley avait quelque peu refroidi les ardeurs de ceux qui partageaient les idées de Voldemort – ou du moins, les avait momentanément dissuadés de s'en vanter. De plus, les professeurs avaient redoublé d'efforts pour maintenir le calme dans l'école, et pour abriter leurs élèves des préoccupations extérieures, afin que leur apprentissage se fasse dans les meilleures conditions. Grâce à eux, le jour de l'épreuve de BUSE de Défense contre les Forces du Mal, tous les cinquième année se concentrèrent sans peine sur l'épreuve, et une fois celle-ci terminée, la plupart des élèves sortirent du château pour rejoindre leurs camarades qui profitaient du soleil éclatant. Ils en profitèrent pour comparer leurs réponses à propos des signes permettant d'identifier un loup-garou, ou, pour les plus studieux d'entre eux, pour réviser l'épreuve du lendemain.

Les couloirs du château de Poudlard étaient donc déserts, parfaitement calmes, et ils le restèrent tout au long de la soirée. Alors que les élèves s'éternisaient sur la pelouse baignée par les rayons du soleil qui déclinait, au deuxième étage du château, Mimi Geignarde s'amusait à inonder les toilettes des filles, ravie des reflets dorés que cela produisait sur le sol.

Et soudain, elle poussa un cri aigu : quelqu'un venait d'entrer.

Le souffle court, Severus Rogue fit irruption dans les toilettes. Il était encore plus pâle que d'habitude, et avait également une attitude des plus étranges : il tirait fermement sa robe de sorcier vers le bas, comme pour empêcher une main invisible de la soulever, et des bulles de savon sortaient de sa bouche, le faisant tousser et cracher.

– Ah, Severus, c'est toi, couina Mimi Geignarde. Dis donc, qu'est-ce qu'il t'arrive ?

Mais Rogue ne l'entendit pas. Il n'avait même pas remarqué sa présence, et à vrai dire, il n'avait pas tout à fait conscience de se trouver dans les toilettes du deuxième étage.

– Eh bien, tu ne me dis même pas bonjour ? Ça n'est pas très aimable... Moi qui n'ai dit à personne que tu venais ici tous les jours pour fabriquer des potions interdites...

En effet, dans un coin sombre des toilettes, quelques chaudrons de tailles diverses s'alignaient, remplis de potions ou de décoctions qui mijotaient, décantaient, bouillonnaient. Autour des chaudrons, on pouvait voir quelques cadavres de rat, des morceaux d'insectes et des livres couverts de runes et de dessins effrayants. C'était là que Rogue se réfugiait, après les cours, pour faire la seule chose dans laquelle il excellait : la confection de potions, toujours plus complexes et exigeantes. Concentré sur le découpage et le dosage des ingrédients, il ne voyait pas le temps passer. C'était le seul moment de la journée où il arrivait à se persuader qu'il n'était pas insignifiant, qu'il était même plus doué que tous les autres, même si personne ne voulait le remarquer...

Et depuis quelques mois, il s'y rendait particulièrement souvent. Sa cinquième année avait été bien plus pénible que les précédentes, et pour une raison simple : depuis Noël, Regulus n'était pas revenu à l'école. Le jour de la rentrée, début janvier, Rogue l'avait attendu, sur le quai du Poudlard Express, puis à la table des Serpentard, puis dans la salle commune, et enfin dans leurs dortoirs ; mais le lit de Regulus était resté vide. Le lendemain, Rogue avait reçu un hibou de son ami, accompagné d'une lettre expéditive :

Sev,

J'ai été blessé pendant les vacances, et je ne peux pas retourner à l'école.

Je t'expliquerai à mon retour.

À bientôt,

Reggie

Rogue espérait qu'il serait de retour rapidement, mais il avait progressivement perdu l'espoir de voir son ami revenir avant la fin de l'année. Plus seul que jamais, il avait été toute l'année à la merci des railleries et des humiliations que lui faisaient subir James et Sirius. Sans compter que l'équipe de Quidditch de Serpentard avait perdu son attrapeur, et avait donc subi les défaites les plus écrasantes de l'histoire de Poudlard, au profit de James Potter, qui, depuis que son équipe avait gagné la coupe du tournoi annuel, se promenait dans le château en jouant avec le Vif d'Or qu'il avait chipé pendant la finale, avec plus de prétention que jamais.

Secrets de Serpentard (II) : Le Pensionnat WimbleyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant