Prologue

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« La croyance en une origine surnaturelle du mal n'est pas nécessaire, l'homme est à lui seul capable des pires atrocités.»

Joseph Conrad

Tu peux bien me regarder dans le blanc des yeux, qu'est-ce que tu veux que je te dise ? Tu veux savoir quoi sur moi ? Tu n'en sais pas assez ? Un silence palpable pesant sur nous deux, nous sommes seuls, tu sais que tu n'as pas le droit d'être là ? Mais c'est comme tout, tu t'en fous complètement. Les effluves de ta cigarette viennent s'incruster dans mes narines et me donne envie de vomir. Pourtant, le tabac me manque, tu crois que c'est le manque de nicotine qui me procure cette sensation ? C'est moche tu ne trouves pas ? Parle, cris, hurle, bouges, fais quelque chose, je n'en peux plus de te regarder comme ça, ton stoïcisme s'incrustant dans tous les pores de ma peau, me faisant couler la sueur dans ma nuque, détrempant mon col, ça pue. J'ai envie de te secouer, tu me répugne. Tu me répugne, Pourtant, je t'aime, tu le sais ça et t'en joue mon salaud. Silence. Paroles, si ce n'est toi qui fais ce pas, faut bien que je le fasse non ? On ne va pas passer la nuit à se regarder comme ça, comme deux contre abrutis que nous ne sommes pas, ni toi, ni moi...

« Tu penses que je suis un monstre ? Que je suis quelqu'un de mauvais ? Parce que la question n'est pas de savoir ce que je suis, où bien même d'où je viens, mais surtout de comprendre pourquoi je suis ce que je suis devenu. Il y a dans la vie de ces choses qui nous paraissent tellement invraisemblables. On refuse de le croire, c'est tellement illogique, peu rationnel, inconcevable, irréel. Mais pourtant, l'évidence est bien là. Quelle preuve ? Tu la connais, tu sais très bien de quoi je veux parler. Non ? Tu en es réellement certain ? J'ai fait des choses, j'ai vu des choses, je les ai désactivés, je les ai savourés. J'en étais devenu conscient, je crois, tout du moins, je le pensais.

Tu sais, je ne crois pas au bien dans l'être humain. Nous sommes tous un peu violent quelque part, ça ne se contrôle pas, c'est comme ça. Ou tout du moins, tu as les hommes qui le refoulent, qui ne vont jamais se l'avouer, ils vont enfermer ce mal au fin fond de leur être jusqu'à l'oublier, et apprendre à vivre avec. Ces hommes sont des frustrés de la vie à mon sens. Ils ne connaissent rien, ils sont aveugles, inutiles, ils ne servent à rien. Puis, tu as les hommes comme moi, ceux de ma branche, mes frères si j'oserais dire. Nous laissons parler la créativité, ce petit truc qui bouillonne en nous, qui nous fait vibrer, qui nous rend si... Marginaux. »

« Arrêté Jordan. »

« Pourquoi ? Je te fais peur ? Tu ne sais rien encore, laisse-moi donc continuer un peu. Prends un siège, nous en avons pour un certain temps tu sais. »

Oui assis-toi donc. Si tu es là ce n'est pas dans le simple mais de me tenir compagnie. Tu ne fais jamais rien d'irréfléchie, tu as toujours une idée derrière la tête, tu es comme ça. C'est plus fort que toi, c'est plus fort que tout. Tu aimes détruire, toi et moi, nous sommes de même raison et tu le sais aussi bien que moi. Tu me veux quoi, tu cherches quoi ? J'ai besoin de savoir, mais je le sais, tu ne diras rien. Non, tu ne dis jamais rien, ne dévoile jamais ce à quoi tu penses. Pourquoi tu ne me parles pas ? C'est si compliqué que ça ? Tu as peur de quoi ? De rien, non, tu n'as pas peur, tu ne peux pas avoir peur. Moi j'ai peur, car je ne sais pas ce qui tourne dans ton crâne Einstein. Je n'en sais rien. Et je le sais, que tu garderas le silence.

« Tu es un Jordan marginal. Tout comme ton histoire. »

« Mon histoire n'a sans doute rien de bien original arrête de penser ça. Elle est sûrement un peu banale et rappelle certainement, un peu furtivement ce que fut Charles Manson, ou bien, pourquoi pas Belle Gunness. Des fous, tu peux bien les nommer comme ça si ça te chante, j'en ai l'habitude, qu'on me colle l'étiquette « Fou » sur le front. Fou, malade, timbré, psychopathe, j'ai appris à vivre avec, à m'y faire, c'est comme ça. C'est comme tout, on apprend à s'immuniser contre les critiques, on s'auto vaccine. Puis un jour, on se lève, on se regarde enfin dans la glace et on comprend. Ils ont tort, ils auront toujours tort. »

Versus - Temps I : Le mauvais côté du cielOù les histoires vivent. Découvrez maintenant