Chapitre 7 - Nina

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Je me réveille avec un sentiment d'oppression dans la poitrine. Mickaël a réussi à me briser en une seule phrase : « On a fait une connerie ». Ses mots résonnent dans ma tête, alors que je me prépare pour la dernière journée du salon. Je repense à la journée d'hier, à la chaleur de son corps contre le mien, à la tendresse de ses baisers, à ses mains tatouées caressant ma peau. C'est tout ce que j'ai toujours voulu, et maintenant, tout est ruiné. Il ne veut même pas en parler, il ne veut pas m'écouter. Comme si ce n'était rien.

Après tout, peut-être que ce n'était rien pour lui ?

Au salon, Mickaël garde une distance avec moi. Il me jette des regards occasionnels, mais ils sont remplis d'une réserve que je n'ai jamais vue auparavant.

– T'es prête ?

Il me pose la question sans vraiment me regarder, sa voix n'est qu'un murmure froid.

– Prête, je réponds laconiquement.

Les sourires sont forcés, les conversations sont évitées. J'installe mes flashs restants au-dessus de ma table de tatouage. Il m'en reste peu, j'en ai même redessiné quelques-uns cette nuit, alors que je ne trouvais pas le sommeil. Le salon ouvre et tout autour de nous commence à s'agiter.

Du coin de l'œil, j'aperçois Mickaël. Chaque mouvement qu'il fait me rappelle à quel point il est proche, et pourtant si lointain. Il y a des moments de silence gênants, où je sens son regard sur moi, mais lorsque je me tourne vers lui, il détourne les yeux. À chaque fois. Je ne peux pas supporter qu'on en soit arrivé là. Je vais perdre mon meilleur ami en même temps que l'homme que je désire plus que tout.

C'est pire qu'hier.

Au moins hier, il a essayé de réamorcer un contact. Le tatouage sur ma hanche en est la preuve. Il me brule, mais je ne regrette pas.

La journée est longue, pénible. Je passe des heures à tatouer, chacun de mes clients apportant un moment de répit, éteignant momentanément mes pensées sombres et tristes. Le nombre de flashs restants diminue drastiquement, même les nouveaux partent rapidement. Je devrais être contente qu'ils aient du succès, mais le gout du bonheur est amer dans ma bouche. Parce que je ne peux pas le célébrer avec lui.

Je n'arrive même pas à faire la conversation à mon client. J'aime bien discuter d'habitude, ça m'occupe et ça permet au client de penser à autre chose. Mais aujourd'hui, je n'y arrive pas. Je me contente de répondre à ses questions.

– Alors, comment ça se passe ? On dirait que tu es ailleurs.

– J'ai bientôt fini. Tu seras bientôt libre.

Je lui souris faiblement, le cœur n'y est pas aujourd'hui.

J'enchaine les nettoyages de la table, les poses de stencils et les tatouages. Je dessine un flash de loup hurlant à la lune sur un homme musclé, une colombe en vol sur le poignet délicat d'une femme, un bouquet de roses filiformes sur le bras d'une autre... Chaque fois, je me perds dans le processus, permettant à ma passion de me distraire de ma douleur.

Mais dès que je m'arrête, la réalité me frappe de plein fouet. Entre Mickaël et moi, rien n'est plus pareil. Il m'évite, et chaque fois que nos regards se croisent, je vois une tristesse et une culpabilité qui me déchirent la poitrine.

Je le vois parler avec d'autres artistes, rire à leurs blagues, et l'étau autour de ma poitrine se serre un peu plus. Il a créé une barrière invisible entre nous qui m'empêche de lui parler comme avant. Je n'aurais jamais cru que c'était possible.

Je profite d'une accalmie de quelques minutes pour me rapprocher de lui.

– Mickaël, on peut en parler...

Tatoue-moi, Choisis-moiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant