Les invités l'ont dévisagée, se sont regardés, puis se sont mis à rire.
"Je n'ai jamais entendu une histoire aussi absurde, s'exclama Henri, et pourquoi tu nous racontes une histoire de poisons en nous servant ton plat?" Tout le monde s'est tourné vers Marguerite.
- C'est vrai, excusez-moi, c'était très maladroit de ma part, affirma-t-elle.
- Excuse-toi oui, plaisanta Diane en leur coupant la parole, je rigole bien sûr ma belle."
La conversation reprit son cours, c'était au tour de Lydie de raconter son anecdote. "Bon, l'histoire que je vais vous raconter s'est passée avant mon mariage avec mon chéri Arturo. En fait, on était dans une maison en Catalogne avec mon compagnon, son frère et des amis à eux. J'étais la seule femme d'ailleurs. Je bronzais tranquillement sur la terrasse, quand les hommes ont voulu aller se promener dans les collines. Vous comprenez bien que je n'avais pas envie, mais ils m'ont forcée! La promenade était nulle! En plus, quand nous sommes revenus, des sangliers s'étaient introduits dans le jardin et avaient dévasté la terrasse. L'un d'entre eux a fini en saucisson, c'était bien bon!
- C'est ça vos histoires! Mais elles sont nulles, se moqua le vieil Albert!"
Lydie a fuit le général du regard. Pour apaiser les tensions qu'elle s'imaginait, elle a tenté une blague en mettant ses doigts espagnols dans le nez de Joseph, assis à côté d'elle. "Arrête ça! Je sais que tu es extrêmement tactile, mais à ce point! C'est du jamais vu, s'énerva l'enseignant." Lydie a vite fait profil bas. En attendant, les convives avaient fini le poisson, Marguerite est arrivée avec ses tournedos et les a servis.
"Si c'est comme ça, je vais vous raconter une vraie histoire d'épouvante, raconta Albert. Quand j'étais petit, dans le village où j'habitais, il y avait un vieil homme qui me narrait des contes, ou ses anecdotes personnelles; je pourrais toutes vous les raconter tellement qu'elles m'ont marquées. Bref, ce petit vieux avait une particularité, je dirais même un pouvoir magique. Il ne faisait qu'un avec les murs, il se camouflait dans le paysage..."
Le récit du vieillard a beaucoup fait rire Diane. "Silence Mademoiselle Legrand, écoute-moi au lieu de glousser! Je disais que cet homme pouvait passer à travers les murs. Cela peut vous paraître absurde, mais c'est véridique. Un soir, il fuyait le mari de sa maîtresse qui était revenu avant que celui-ci ne s'habille. Et tout nu, il s'est collé au mur en contre-bas d'un parc. Il était comme entré dans celui-ci et personne ne l'avait vu. Je crois que c'était une affaire de séparation entre le corps et l'âme de cet homme. Puis, un jour, il fuyait le préfet de police parce qu'il profitait de son pouvoir pour voler tout ce qu'il voulait. Il est "entré" dans le mur, et depuis ce jour, je ne l'ai plus jamais revu, il était comme bloqué dans celui-ci.
- C'est ça votre histoire Albert, s'indigna la catalane, vous dîtes de moi et de mon anecdote des sangliers, mais là, c'est complètement aberrant! Depuis quand un homme peut-il pénétrer dans un mur? En plus, j'ai l'impression de l'avoir déjà entendue. Je vous assure qu'à votre place, je me tairais avant de critiquer les histoires des autres!
- La différence avec ton anecdote ma chère, c'est que la mienne est intéressante, incroyable et vraie, ça j'en suis sûr, je l'ai vu de mes propres yeux, contrairement à ce vieux potin inutile qui nous a fait perdre du temps et a gêné grand nombre d'entre nous.
- Continuez ainsi et vous allez finir comme ce qui s'est passé avec le sanglier, répliqua Lydie.
- Bon, la gitane, ne te la ramène pas et arrête de menacer notre aîné, souligna Joseph, ce soir, personne ne se dispute. C'est juste une soirée entre amis.
- Sachez que si le repas ne se tenait pas chez Marguerite, je ne serais pas venue vous voir, conclut Lydie."
Le silence s'est alors fait entendre, les invités se sont remis à manger car l'hôte les a invités à manger tant que le plat était chaud. L'ambiance de ce soir, qui aurait dû être festive, était très tendue. Cela ennuyait Diane, qui n'avait qu'une envie, partir. C'est d'ailleurs l'Américaine qui a tenté de reprendre une conversation normale, elle leur a demandé : "Sinon, ça se passe bien au travail?" Tout le monde a répondu un vague "oui" sans précision. Désespérée, Diane, qui avait fini son tournedos, attendait impatiemment le dessert. C'est alors qu'Henri a apporté plus de précisions. "Moi ça se passe très bien au travail, cela me permet même de voyager donc je vais pas me plaindre, rit-il.
- Ah oui, c'est vrai que tu vas aux Etats-Unis, s'exclama Diane, où est-ce que tu vas déjà, dans quel état?
- Je vais souvent en Floride car j'ai des maisons là-bas, mais sinon je vais un peu partout, rétorqua Henri.
- C'est tellement beau la Floride! J'attends que tu nous invites, répondit l'avocate.
- Bien sûr, je pourrais vous inviter là-bas vous tous. En plus, sans vouloir me vanter, expliqua l'homme d'affaires, j'y ai une grande piscine, une immense terrasse, plusieurs chambres pour tous vous accueillir, ma grande salle à manger, qui est ma pièce préférée. Je me suis battu pour l'avoir par contre, mais ça a valu le coup, maintenant, je possède un paradis, à chaque fois que j'y suis, je me dis qu'il ne me manque plus que Marguerite..."
Henri s'est rendu compte, trop tard, de ce qu'il a dit. Tous les invités suspectaient déjà une éventuelle relation entre Marguerite et lui, après de tels propos, il n'y avait plus de place au doute, ils se sont regardés et ont compris. Marguerite a baissé la tête. Joseph sortit "Alors, Marguerite est ta maîtresse, on en apprend tous les jours!". Les deux amants se sont regardés, elle lisait dans son regard qu'Henri était désolé. "Ne vous inquiétez pas, rajouta Diane, tout cela reste entre nous, n'est-ce pas?
- Merci Diane, répondirent simultanément Marguerite et Henri.
- Finalement, les enfants, je pense qu'il faudrait arrêter de raconter vos anecdotes, évalua Albert. Cela ne crée que des ennuis, je sais que c'était ton idée Marguerite, mais ton soi-disant thème a crée des tensions entre tout le monde, enfin, j'en ai l'impression."
Les invités ont acquiescé. Joseph a d'ailleurs une très bonne idée. Il a demandé à Marguerite de mettre de la musique. La propriétaire a, de suite, pris un vinyle et l'a installé sur un tourne disque. Marguerite avait mis en premier lieu Rock Around the Clock de Bill Haley, sa chanson préférée, elle l'écoutait beaucoup quand elle était enfant. Puis, les invités ont chacun mis des chansons qu'ils appréciaient. Cette vaste salle à manger s'est alors transformée en salle de danse. Cependant, Henri remarquait le narrateur caché dans le couloir, d'un coup, il s'est énervé. "Qu'est-ce qu'il fait ici lui encore?"
Voilà pour cette deuxième partie, j'espère qu'elle vous plaît. Je vais maintenant écrire l'Acte 3, que je vais bientôt publier, à bientôt.
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Histoire à mourir debout
NezařaditelnéLe récit d'une femme et de ses invités lors d'une soirée mondaine.